UN PEU DE GEOGRAPHIE.
C’est la ville d’Algérie française où je suis né en 1953. Une ville qui était alors pleine de charme, de verdure, carrefour du Département d’Oran, qui ouvrait du nord au sud, les grandes routes conduisant à la mer ou au Sahara, de l’ouest à l’est, celles menant au Maroc ou celles permettant d’aller vers l’Egypte, la terre d’Israël et l’Inde. Chaque année les cigognes et les oiseaux migrateurs emplissaient le ciel de la ville.
Les romains avaient nommé Tlemcen ‘Pommaria’, les « vergers » en latin .Ils y avaient installé une colonie importante et un poste de cavalerie pour surveiller la grande voie d’Altava ( Lamoricière) à Numerus Syrorum (Marnia) .
Ils avaient également établi à ce carrefour économique de leur empire des magasins de stockage de denrées tels olives, vins, huile.
Ils avaient développé l’irrigation des jardins par un canal de sept kilomètres qui conduisait en ville l’eau fraîche des cascades d’El Ourit. Les berbères nommaient la ville ‘Tlimcin’, la « source » .La ville fut également nommée « la Petite Jérusalem » de l’Orient
Tlemcen se trouve en contrebas de grands plateaux calcaires entourés de montagnes. Les points culminants des « Monts de Tlemcen » vont de 1616 à 1843 mètres.
Tlemcen est située à huit cent trente mètres du niveau de la mer et à 400 mètres de la Plaine d’Hennaya, sur un large plateau, à proximité immédiate de forêts de pins et de chênes, des cascades ‘d’El Ourit’, du grand Pont ferroviaire métallique conçu et construit par Gustave Eiffel ainsi que des ruines de ‘Mansourah’ et de leurs grandes tours ocres entourées de champs d’oliviers.
En hiver la neige tombait souvent en abondance. Dans cette région naissait une importante rivière, la « Tafna », ainsi que certains de ses affluents comme l’Oued ‘Chouly’ et le ‘Mefrouch ‘qui alimentait les grandes cascades
Il y avait aussi ce grand arbre couché que l’on nommait ‘l’Arbre de Fer’ qui était au bord de la « Route des Cascades » et qui figure sur les anciennes cartes postales des année cinquante .
UN PEU D’HISTOIRE.
Des tribus judaïsantes ont habité cette région depuis plus de dix siècles.
Certaines tribus ont « fusionné » avec des tribus berbères et se sont réfugiées lors des invasions arabes du 7ème siècle dans les hautes montagnes de l’Atlas afin d’échapper aux conversions de force et à la violence des envahisseurs.
Les Almohades ont entièrement détruit la ville en 1146.
Les juifs l’ont habité alors une seconde fois pendant un siècle, ils étaient localisés dans un quartier du nom « d’Ejjadid ».
L’ambassadeur d’Aragon, « Abraham Ben Halil » s’y est établi en l’an 1291.
Le rabbin, médecin et écrivain « Ephraïm Enkaoua », fils de Israël Enkaoua, chassé d’Espagne avec plusieurs familles juives obtint l’autorisation de s’installer au centre de la ville, car les juifs étaient cantonnés à l’extérieur des remparts et ne bénéficiaient d’aucune protection. Le Rabb y fit construire une synagogue. A son apogée la ville comptait 7 synagogues.
Parmi les sages de cette génération qui laissèrent une trace, on trouve :
Yehoudia et Saadia Nejjar, Marzouk Ben Taba et le médecin Moché Lachkar.
En 1467,face aux persécutions des arabes, de nombreux juifs quittent Tlemcen, dont Yéochoua Ben Yosseph Halévy, auteur de « Halikhot Holam ».
En 1492, du fait de l’édit d’expulsion d’Isabelle de Castille et de l’Inquisition, des familles juives s’installent à nouveau à Tlemcen, parmi elles :
Les « Gabizon, les Lévy-Barkat, les Stora, les Sasportes, les Ben Mahaya ».
En 1517, les Turcs détruisent la ville et obligent les juifs au port distinctif de vêtements jaunes ( on parle alors à ce sujet du« jaune juif »).
En 1534, ce sont les Espagnols qui attaquent avec leur flotte et leur armée et prennent la ville.
Des juifs furent alors emportés comme esclaves et ne furent libérés contre rançon que grâce à l’aide des communautés juives d’Oran et de Fez.
En 1830, quand les français conquirent la ville de Tlemcen, ils recensèrent 1585 juifs.
Malgré cette série de souffrances endurées, la Communauté forma des sages tels « Nathan Djian » et « Isaac Moati ».
Aux environs de 1881, les juifs combattirent pour la France, puis à nouveau, lors des deux guerres mondiales.
En 1940, des lois françaises de Vichy, discriminèrent à nouveau les juifs par des mesures dégradantes et humiliantes. Les juifs n’eurent plus le droit d’aller à l’école publique. De nombreux jeunes en âge de servir dans l’armée furent envoyés dans des camps ou les conditions de survie étaient très dures.(Camp de Bedeau) .
La population juive paya une lourde contribution humaine aux deux guerres mondiales.
La guerre d’Algérie de 1953 à 1962 conduisit à l’exode de l’ensemble de la Communauté juive dont tous les biens furent nationalisés et confisqués par le nouveau gouvernement algérien qui les déclara « vacants » ainsi que tous les biens du domaine public.
Les accords d’Evian ne furent pas respectés.
En juin 1962 , 140 000 juifs quittent massivement l’Algérie.
Quelques juifs restent encore un peu pour tenter de sauver leurs biens, sauver des livres saints et les sephers Torah. Tous les juifs des communautés d’Algérie font de même pour échapper à la violence de la Guerre et aux menaces.
Les juifs d’Algérie qui avaient obtenu la nationalité française depuis le « Décret Crémieux » de 1870 n’ont jamais bénéficié du statut de réfugiés contrairement à d’autres populations dans le Monde.
Ce statut leur aurait permis de percevoir des indemnités qu’ils n’ont pas eues.
L’indemnisation française des biens laissés en Algérie fut une sorte de grande mascarade qui dura plus de 25 ans et correspondait finalement à une indemnité ridicule de l’ordre de 2 % de la valeur des biens estimés sur la base de la valeur d’achat des terrains.(beaucoup ayant été acquis lors de la première guerre mondiale).
La communauté juive de Tlemcen et ses descendants sont maintenant dispersés, éparpillés dans le monde entier avec cependant 3 zones de choix importantes : La France, Israel et les Usa.
PB
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Posté Le : 09/06/2023
Posté par : tlemcen2011
Ecrit par : Photo : Hichem BEKHTI
Source : judaicalgeria.com