Algérie

Une tradition perpétuée par des légendes locales


Découpés et arrosés par la soupe de poulet, Laftat est le plat de l'année exclusivement réservé pour la fête de Ras el-âam avec, à la clé, la visite de la Fettacha venant prendre sa part du festin familial.Etroitement liée à la fête du nouvel an amazigh, appelé localement Yennar ou encore Ras el-âam, l'histoire de la Fettacha est encore omniprésente de nos jours dans l'héritage du langage local à El-Milia (est de la wilaya de Jijel). "Vous croyez à la Fettacha" est la formule ironique la plus prononcée à chaque fois qu'il est question de s'adresser à une personne faisant preuve d'une certaine crédulité.
Personnage fictif, la Fettacha est une vieille et méchante femme qui vient rendre visite aux enfants la nuit du festin familial, à l'occasion de Ras el-âam. Une histoire relayée dans les légendes locales pour donner à cette fête une saveur encore plus particulière. La Fettacha est un terme qu'on peut traduire par "inspectrice", ce qui lui donne le sens d'une femme qui vient inspecter.
C'est en plein hiver, d'une journée au froid glacial, qui ne peut coïncider qu'avec cette date du 12 janvier, que l'histoire de cette femme revient chaque année pour accompagner la fête de Ras el-âam, synonyme de Yennayer du calendrier amazigh.
Cet événement est vécu comme un rendez-vous majeur dans les coutumes locales à El-Milia. Dans les traditions de cette région, cette date est marquante et elle est tellement ancrée dans les m?urs familiales que la nuit de Ras el-âam toute la famille se réunit autour d'un feu incandescent pour déguster, en toute convivialité, le repas spécialement mijoté pour cette occasion.
C'est dire qu'aux visites et échanges de cadeaux entre les familles nouvellement unies par les liens du mariage, des mets préparés pour cette fête viennent s'ajouter au rituel des célébrations du nouvel an amazigh dans cette région. Le mets en question est un incontournable plat préparé à base de feuilles fines de semoule découpées en petits morceaux.
Le met est assaisonné d'une soupe mijotée à base de légumes et de poulet. À cette soupe s'ajoute le fameux coq au plumage multicolore de Ras el-âam qu'on ne se prive pas d'égorger pour la circonstance et qu'on ajoute à ces ingrédients symbolisant tout le sens qu'on donne à cette fête.
Quant au mérite de ces préparations, il revient à ces femmes qui ont l'art et la dextérité de préparer les feuilles à base de semoule, localement appelées Laftat. Découpé et arrosé par la soupe de poulet, Laftat est le plat de l'année exclusivement réservé pour la fête de Ras el-âam. La veille de cette fête, c'est toute la famille qui se réunit autour de ce festin.
Et c'est là qu'intervient la Fettacha, cette femme fantôme qui va rendre visite, la nuit, aux enfants pour... les éventrer s'ils ne lui laissent pas sa part. Le fantôme de la Fettacha ne quitte pas l'imaginaire des enfants, n'hésitant pas alors à laisser une part à la vieille femme.
Cette histoire a le mérite de dissuader les enfants d'être trop gourmands en cette nuit d'un festin spécial et ainsi leur éviter la survenue d'indigestions et de troubles digestifs.Quant à la visite de la Fettacha, elle n'a jamais lieu, tout comme ce personnage horrible qui n'a existé que dans le récit populaire, tiré des légendes de Yennar à El-Milia.
Si de nos jours cette légende reste liée à un événement dont les célébrations sont devenues nationales, la fête de Ras el-âam telle qu'elle a été célébrée par le passé est quelque peu oubliée. Certains s'en tiennent cependant à la célébrer en préparant le fameux Laftat, non sans l'accompagner du coq à égorger pour la circonstance.

Amor Z.
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