Algérie

Une tradition et un patrimoine en perdition



Une tradition et un patrimoine en perdition
Autrefois bichonnée, lavée, peignée et étalée fièrement dans la salle de séjour, la peau de mouton ne garnit plus les maisons. Les raisons invoquées par les uns et les autres sont aussi variées que complexes. Pour certains, les allergies provoquées par la laine ont dicté leur décision de s'en débarrasser. Salima, une quinquagénaire, femme au foyer, avoue : « Lorsque l'allergologue a déterminé que ma fille de 18 ans présente une allergie due à la poussière et m'a demandé d'éviter d'utiliser des coussins en laine, j'ai tout de suite retiré les oreillers en laine et les toisons placées sous le matelas » dira-t-elle. Pour son amie, les raisons sont tout autres. « Le manque de temps et d'énergie pour nettoyer, laver la peau chaque saison comme le faisait nos mères et nos aïeules m'a contrainte à ne plus garder les peaux des moutons sacrifiés chaque Aïd. Chez moi, je n'ai gardé que la peau du mouton égorgé le jour de mes noces et celle de la naissance de mon premier enfant » affirme cette autre dame. Désormais, l'intérieur des maisons algériennes ne renferment plus cette belle toison étalée devant un matelas ou dans un coin garni de plateaux et de cafetières en cuivre. Cette image reflétant nos us et nos coutumes est désormais enfouie dans les livres d'histoire et les cadres accrochés dans les musées. Aujourd'hui, la femme algérienne a tronqué ce lainage contre le synthétique. Des tapis en plastique et en polyester ont pris le dessus sur le tapis en laine et la toison. Ce changement dans le mode de vie n'a d'explication que ce sentiment de ne plus se fatiguer davantage dans l'entretien de la laine. Malika, qui reste attachée à ces peaux de mouton, d'ailleurs très bien entretenues, n'exclut pas l'éventualité de s'en débarrasser en les délainant pour en faire des paillasses. « Je prends de l'âge et mes filles ne veulent plus lessiver les peaux et les secouer à chaque fois afin de ne pas laisser la poussière s'y incruster » dira-t-elle. Elle affirmera, par ailleurs, que « la laine étant à 400 DA le kilogramme, il y a de quoi méditer sur l'abandon de ces peaux dans les ordures après le sacrifice ». Aujourd'hui, la peau de mouton, hier les ustensiles de cuisine en terre cuite ou en bois, nos traditions se perdent et peinent à trouver place dans un marché gangréné par le plastique. Ce dernier, vendu à moitié prix et facile à nettoyer, est prisé par la ménagère qui trouve son compte en déboursant peu. Ce choix est chèrement payé par les artisans dont le nombre régresse de jour en jour. Toutefois, l'espoir reste permis avec la prise de conscience de certains citoyens et l'engagement du mouvement associatif. Ils sont nombreux à organiser des semaines d'exposition et de vente de produits artisanaux confectionnés par des mains habiles, expertes, dans des ateliers ou encore dans les innombrables maisons de l'intérieur du pays où la peau de mouton continue à être sur le piedestal.




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