Algérie

Une seule devise, pas de dominos



Une seule devise,  pas de dominos
Deux ans après avoir été détruit par un kamikaze, le plus célèbre café culturel de la capitale irakienne a enfin rouvert ses portes. Ses colonnes, ses murs et son plafond s'étaient effondrés dans le souffle de l'incroyable explosion. Tout a été reconstruit à l'identique. De vieilles photos en noir et blanc ou en couleurs de l'époque de la monarchie ont même été accrochées aux murs, comme avant. Autour d'un thé ou d'un narguilé, assis sur des bancs, les habitués ont repris les discussions qu'ils avaient dû interrompre le jour où un kamikaze a fait exploser son camion piégé rue Moutanabbi, tuant plus de 30 personnes et blessant au moins 60. Le 5 mars 2007, le patron du café, Mohammad Al Khachali, 77 ans, a perdu ses cinq fils, dont les photos ornent aujourd'hui les murs, barrées d'un bandeau noir avec la mention « Café des martyrs ». Son épouse est morte de chagrin un peu plus tard. Malgré son malheur, M. Khachali a décidé de faire face au défi : « Je ne voulais pas que le café soit affecté par la tragédie de la mort de mes cinq fils. Je ne voulais pas que cela affecte le statut et l'histoire du café. Maintenant, cela me rappelle tous les jours mes cinq fils », ajoute-t-il.En 1963, il avait décidé de louer cette imprimerie qui existait depuis 1917 et en faire un café dans cette rue où il n'y avait que des librairies et des bouquinistes. « La seule règle que j'avais fixée est toujours valable : ici, pas de dominos ni d'autres jeux. Ici, on vient parler », confie cet homme assis derrière une table où il encaisse 500 DA (0,44 USD) par tasse de thé. La rue Moutanabbi est considérée par les Irakiens comme l'un des centres littéraires les plus importants du monde arabe. Elle fut inaugurée en 1932 par le roi Fayçal II et baptisée du nom d'un grand poète arabe. Selon M. Khachali, le Chabandar a bénéficié de son emplacement : « Sa proximité avec l'ancien Parlement et les ministères irakiens est un facteur important de son succès », assure-t-il. Mais depuis l'invasion menée par les Etats-Unis en 2003, la proximité avec les bâtiments officiels n'est plus un avantage, les sièges du pouvoir étant visés par les insurgés.En novembre 2007, le gouvernement irakien a lancé un projet de plusieurs millions de dollars pour reconstruire la rue et dans la rue Moutanabbi comme dans le reste de Baghdad, la vie semble avoir repris son cours, signe de l'amélioration progressive constatée depuis fin 2007 dans le pays de la sécurité, en particulier dans la capitale. « C'est notre maison culturelle, notre deuxième maison. J'y ai passé plus de 25 ans », affirme l'écrivain et critique Kamal Latif Salem, 61 ans, en désignant le Chabandar. « Comme le café est près de chez moi, je venais tous les jours, surtout après ma mise à la retraite. J'ai eu de la chance le jour de l'attentat, je remplissais des papiers au département des retraites », affirme un autre habitué du café, Chams Al Zahawi, 70 ans, en sirotant un thé. « Ce jour-là, j'ai reçu beaucoup de coups de fil. Ils ont pensé que je faisais partie des victimes parce que j'y étais tous les jours. Avec la reconstruction du café, me voilà de retour », dit-il.  >   


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