La problématique du don et des prélèvements de reins demeure un sujet d'actualité en Algérie, au vu du nombre important des insuffisants rénaux qui viennent grossir les rangs des dialysés.La question est encore posée avec acuité, en dépit de l'arsenal juridique mis en place par le législateur, mais aussi des recommandations des hautes autorités religieuses quant à la nécessité de prélever des reins à partir des cadavres pour sauver des vies humaines.
Cette question a été abordée dans un ouvrage intitulé Dons et prélèvements de reins - Enjeux juridiques, éthiques et sociétaux, cas de l'Algérie à Constantine, édité en 2014 à compte d'auteur, à l'Office des publications universitaires (OPU), et qui est l'?uvre de Dr Rahima Bouameur, médecin de formation, ex-médecin coordinatrice des assurances sociales et ex-enseignante universitaire en médecine sportive. Un livre sérieux, très intéressant, bien élaboré, richement documenté, avec chiffres et statistiques à l'appui, et qui synthétise un laborieux travail de recherche mené avec passion et dévouement.
Depuis, le livre est une référence pour les étudiants universitaires préparant des thèses de master et de doctorat dans différentes spécialités. «Cette recherche tente de promouvoir des réponses à des questions scientifiques et fondamentales et essaie de mettre en exergue les encadrements législatif et réglementaire pour les prélèvements comme pour les dons et d'analyser le droit positif algérien face à l'impact du religieux et du sociétal», déclare l'auteure du livre.
Cette dernière vient de publier, il y a quelques jours, la version arabe de son ouvrage chez le même éditeur. «Cette publication survient après les multiples sollicitations de la part des étudiants et des chercheurs universitaires qui préparent leurs thèses et trouvent des difficultés à se procurer des documents de référence en arabe», soutient le Dr Bouameur, qui ne manque pas de souligner le parrainage de cet ouvrage par le Pr Abdelhamid Aberkane, ancien ministre de la Santé, et le Dr Kamel Ledraâ, doyen de la faculté de la charia et de l'économie à l'université Emir Abdelkader de Constantine, avec la précieuse collaboration de Rabah Kaâouache, qui a assuré la traduction. «Le don d'organes, la greffe, la nécessité d'une greffe, tout comme la possibilité de donner ses organes peuvent concerner chacun d'entre nous, quels que soient l'âge, l'origine ou la condition sociale.
Du reste, il est dix fois plus probable d'avoir un jour besoin d'une greffe que de se trouver en situation de donner ses organes», note le Dr Bouameur dans l'introduction de son livre. Il s'agit d'un sujet qui semble relégué aux oubliettes, après les débats enclenchés en grande pompe, il y a quelques années, pour déboucher sur des mesures restées sans lendemain. Cela se passe au moment où le nombre d'insuffisants rénaux ne cesse de connaître une hausse inquiétante, avec plus de 18 000 dialysés recensés par l'Agence nationale de greffe du rein en 2014, et 7000 patients en attente de greffe dans l'indifférence totale.
Les blocages de la sacralisation du corps
«Malheureusement, et malgré les progrès réalisés, la question de la transplantation rénale et du prélèvement des reins ne suscite plus l'intérêt des pouvoirs publics, alors que les malades continuent de souffrir et de mourir en silence.
C'est le statu quo qui perdure, au moment où l'on ne parle plus de la carte de donneurs, qu'on avait envisagé d'instaurer, alors qu'elle existe dans des pays voisins, il n'y a plus de communication ni de sensibilisation auprès de la population s'agissant du prélèvement des reins à partir des cadavres, qui est devenu un sujet tabou dans la société à cause de la sacralisation du corps, malgré les textes religieux qui l'autorisent et l'encouragent pour sauver des vies humaines.
Pourtant une hémodialyse coûte cinq fois plus cher qu'une greffe du rein», déplore le Dr Bouameur. «Avec les 10 centres de transplantation rénale, moins de 100 greffes sont réalisées par an en Algérie, alors qu'il faut ajouter 3500 nouveaux cas par an à la liste de ceux qui se soignent dans les 300 centres d'hémodialyse existants», souligne l'auteure. Elle précisera que depuis 1986, date du lancement des greffes de reins, le nombre des transplantations demeure insignifiant.
Pour elle, seule une campagne de sensibilisation continue et régulière auprès des citoyens, menée à tous les niveaux, avec en parallèle une prise en charge médicale et sociale adéquate des donneurs d'organes, est l'unique voie pour relancer les greffes rénales et soulager des milliers d'insuffisants rénaux qui souffrent.
A noter que le livre compte une première partie consacrée aux fondements du droit musulman en matière de transplantation d'organes, à l'encadrement législatif de la transplantation et à l'aspect éthique et la responsabilité médicale. La deuxième partie détaille l'aspect médical, avec une vulgarisation de l'anatomie du rein, les méthodes de dialyse, les techniques chirurgicales utilisées en matière de prélèvement, les complications chez le transplanté, l'évaluation des coûts de la dialyse et de greffe, le rôle de la Sécurité sociale et l'importance de la mise en place d'un système de prévention contre les insuffisances rénales chroniques. En annexe, le lecteur trouvera un recueil des législations des pays du Maghreb relatives à la problématique de la greffe rénale.
Ecrit dans un langage accessible, le livre du Dr Rahima Bouameur, destiné aussi bien aux spécialistes qu'au large public, est un moyen pour bien comprendre une problématique qui continue toujours d'alimenter les débats. Il est disponible uniquement sur commande auprès de l'Office des publications universitaires (OPU).
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Posté Le : 04/02/2018
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Arslan Selmane
Source : www.elwatan.com