Algérie

Une prime au statu quo



Le propos du chef d'état-major de l'ANP a réussi à faire l'unanimité. Classe politique et société civile ont considéré sa teneur comme une volonté de ne pas dialoguer et de se maintenir en place des tenants du pouvoir. Par son discours qui tranche nettement avec l'initiative du chef de l'Etat, Gaïd Salah compromet les chances de trouver une solution à la crise que traverse le pays pour ceux qui ont réagi, et apporte, par son opposition à la démarche du pouvoir, la preuve qu'il y a un sérieux désaccord au sommet de l'Etat.
Abdelouahab Fersaoui, président dU RAJ
"Le discours confirme les divergences au sein du pouvoir"
"Le discours du chef d'état-major est, encore une fois, en contradiction avec les aspirations et les revendications du hirak. C'est un discours qui compromet l'apaisement, désavoue le chef de l'Etat et son initiative de dialogue et reflète des tiraillements et des divergences graves au sein du pouvoir. Il remet en cause le dialogue avec les préalables et les conditions de déroulement du dialogue. C'est aussi un autre indice que le pouvoir incarné par l'état-major de l'armée et le chef de l'Etat n'a pas une volonté politique de résoudre le problème.
Ils veulent, coûte que coûte, faire passer leur feuille de route qui consiste en l'organisation de l'élection présidentielle le plus tôt possible, parce que par cette élection il veut garantir le maintien du système, ce que le peuple algérien refuse. Le peuple algérien demande le changement du système et une période de transition, parce que nous considérons que la période de transition est inéluctable, et la crise ne peut être que politique.
Donc, cet entêtement de la part du chef d'état-major ne peut que renforcer la détermination du peuple algérien et la mobilisation pacifique au niveau national. Le peuple a pu déjouer toutes ses tentatives pour affaiblir le mouvement durant la période du Ramadhan et, maintenant, avec la période de l'été, le peuple algérien est déterminé à aller jusqu'au bout, et la rentrée sociale sera encore très forte sur le plan politique. Aujourd'hui, l'initiative de dialogue est compromise. Pour nous, le dialogue reste toujours un moyen pour amorcer un processus de changement démocratique."

Abderrahmane Arar, membre du Forum civil pour le changement
"Nous restons attachés au dialogue et aux mesures d'apaisement"
"Nous restons sur notre position initiale, nous tenons toujours à l'initiative de dialogue qui représente une voie qui permet à l'Algérie de sortir de cette situation de crise. Mais le plus important est que nous sommes en train d'attendre concrètement la réaction du pouvoir vis-à-vis de nos revendications transmises par le panel des personnalités qui vont renforcer le climat de confiance avant d'entamer le dialogue.
Maintenant s'il n'y a rien et que le pouvoir recule, il assumera ses responsabilités. Mais nous, nous restons attachés à l'initiative de dialogue comme solution à la crise qui sera précédée par des mesures de confiance, notamment la libération des détenus du hirak, la levée des mesures de sécurité concernant le hirak chaque mardi et chaque vendredi, et le départ du gouvernement comme l'exige le peuple.
S'il n'y a pas de réponses à ces exigences, nous prendrons une autre position. Mais nous ne voulons pas précipiter les choses. Pour nous il faut patienter, parce que jusqu'à maintenant nous n'avons obtenu aucune réponse, ni négative ni positive. Nous allons attendre d'ici à vendredi, puis nous verrons."

Messaoud Boudiba, membre de la dynamique du CSA
"Le rejet des préalables compliquera davantage la situation"
"Je considère qu'on ne peut parler de dialogue sans que soient réunies les conditions préalables. S'ils parlent de directives qui doivent être appliquées, à mon sens, on ne peut appeler cela un dialogue. Le dialogue nécessite un climat d'apaisement accepté par tout le monde. Alors que si on veut un dialogue sur mesure qu'on veut imposer aux Algériens, cela ne réussira pas.
L'objectif fixé à travers le dialogue ne sera pas atteint. Le rejet des préalables compliquera davantage la situation et suscitera la réserve de nombre de parties au sujet de cette initiative et ne permettra pas à tout le monde de présenter ses propositions et de participer à l'élaboration d'une initiative de solution de la crise politique au pays. Donc, nous considérons qu'il faut réunir les conditions nécessaires pour permettre à tout le monde d'y participer et de donner son avis."

Propos recueillis par : Amar RAFA.


SoUfiane Djilali, président de Jil jadid
"Pas de dialogue sans mesures d'apaisement"
"Le dernier discours du chef d'état-major Ahmed Gaïd Salah exprime une position de fermeture. Les partis de l'opposition qui ont accepté le principe de dialogue n'ont finalement pas eu gain de cause. Les nouveaux tenants du pouvoir actuel ont opposé une fin de non-recevoir.
Pour toutes ces raisons et devant cette situation, nous déclinons toute offre de dialogue, puisqu'on avait émis au préalable un minimum de conditions pour aboutir à un dialogue fertile. Malheureusement, Ahmed Gaïd Salah a refusé de faire des concessions. Signalons qu'il y avait plusieurs partis politiques qui avaient refusé le principe même de dialogue.
Donc, c'est aux nouveaux tenants du pouvoir de faire l'effort de réunir tout le monde autour d'une table. De toute évidence, les conditions d'un dialogue politique serein et authentique ne sont pas encore réunies. Fidèle à ses engagements publics, le parti Jil Jadid déclinera toute discussion sans le préalable des mesures d'apaisement et d'ouverture politique. Les esprits ne sont apparemment pas prêts, pour l'instant, aux concessions mutuelles. L'impasse est réelle. Le moment appartient malheureusement aux certitudes des extrêmes."

Hakim BELAHCEL, Premier secrétaire du FFS
"Le pouvoir cherche à fermer la parenthèse de la révolution"
"Le Front des forces socialistes réaffirme son attachement à une solution pacifique négociée, et ce, pour épargner le pays d'autres aventures dangereuses. En fait, ce pouvoir est rodé aux pratiques répressives. Ce pouvoir est en train d'œuvrer de la sorte à fermer la parenthèse de la révolution ; c'est ainsi le devenir de notre pays. Nous devons alors continuer à déjouer les stratégies dévastatrices de ce pouvoir. Sur un autre plan, nous devons aussi persévérer dans notre lutte pacifique, et ce, pour faire aboutir nos revendications qui sont en somme légitimes.
Le Front des forces socialistes défend aussi la nécessité d'installer un véritable climat de confiance et d'apaisement afin d'envisager un quelconque dialogue pour sortir le pays de l'impasse politique dans laquelle il se débat. On tient aux préalables constituant le socle pour bâtir une vraie alternative démocratique. Restons alors mobilisés."

Secrétariat permanent du bureau politique du parti des Travailleurs
"Le seul dialogue envisagé par le régime mène à son maintien"
"Cette intervention faite par le chef d'état-major de l'Armée nationale populaire au nom du régime qui vit une crise sans précédent depuis 1962, s'inscrit en droite ligne de l'orientation évoquée plusieurs fois par le président de l'Etat par intérim. Il s'agit donc pour le régime d'opérer un coup de force par l'organisation d'une élection présidentielle dans la seule perspective de se préserver.
Aussi, il apparaît clairement que le seul "dialogue" envisagé par le régime est celui qui mène à son maintien. Alors que des millions de citoyennes et de citoyens n'ont cessé d'exiger le départ de tout le système/régime depuis plus de cinq mois, ce dernier refuse de partir. Cela démontre la véritable nature du "dialogue" que veut imposer le régime en place. Il exclut toute idée de libérer les prisonniers politiques et d'opinion leur déniant même ce statut à l'image de la secrétaire générale du PT, Mme Louisa Hanoune, du moudjahid Lakhdar Bouregâa et des dizaines de manifestants pour port de l'emblème de l'amazighité.
Chaque jour qui passe, ce système/régime apporte une menace supplémentaire à la démocratie, à la nation. Qui a donc intérêt à précipiter le pays dans des incertitudes sans lendemain ' Le Parti des travailleurs qui participe dans le cadre du pacte politique de l'alternative démocratique pour trouver une issue conforme aux aspirations de peuple algérien, considère qu'il n'y a pas de solution à même de répondre aux exigences de l'immense majorité en dehors de la mise en place d'une Assemblée nationale constituante souveraine qui pourra réaliser le départ du système/régime qui constitue la principale revendication de la révolution et par là même régler les problèmes socioéconomiques qui accablent les millions d'Algériens. Pour le Parti des travailleurs, la question des détenus politiques et d'opinion et particulièrement celles de Lakhdar Bouregâa et Louisa Hanoune, constituent la clé de l'avenir démocratique du pays."

Propos recueillis par : hanafi H.


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