Algérie

"Une nouvelle loi ne suffit pas pour rassurer les investisseurs"



Liberté : En quoi la loi algérienne sur les hydrocarbures est-elle dissuasive pour l'investissement dans sa version d'avant sa récente et très controversée révision'Francis Perrin : La loi existante sur les hydrocarbures remonte à 2013 et elle a permis d'introduire plusieurs progrès significatifs. Mais elle date de 2013, donc d'une époque où le prix du pétrole Brent de la mer du Nord était supérieur à 100 dollars le baril. Actuellement, il est à environ 60 dollars le baril. Le contexte a donc fortement changé. Un autre élément est qu'une loi ne peut s'apprécier dans l'absolu.
Il faut tenir compte des conditions offertes par d'autres pays producteurs qui cherchent, eux aussi, à attirer des investissements étrangers. La loi actuelle n'est pas dissuasive pour l'investissement, mais elle n'est pas assez incitative. C'est une nuance, mais elle est importante. Les faibles flux d'investissement étranger dans le secteur des hydrocarbures en Algérie dans les dernières années confirment cette attractivité insuffisante. Cela dit, une loi n'est pas tout. Il y a aussi des pratiques administratives, des processus et des délais qu'il faut améliorer.
Que réclament exactement les grandes firmes pétrolières internationales pour venir investir plus favorablement en Algérie '
Les compagnies pétrolières regardent toujours de très près trois aspects clés avant de prendre des décisions d'investissement dans tel ou tel pays : le potentiel en hydrocarbures, le risque politique et l'attractivité économique. Sur le premier sujet, l'Algérie reste en bonne position, comme le montrent notamment les échanges en cours entre Sonatrach et ExxonMobil, mais les incertitudes politiques sont actuellement importantes et le pays est jugé pas assez attractif depuis quelques années déjà. Il faut donc à la fois, et ce n'est évidemment pas facile, plus de stabilité politique et plus d'incitations à l'investissement. Une nouvelle loi peut répondre à la seconde question mais pas à la première.
L'élaboration de la nouvelle version de la loi sur les hydrocarbures a été effectuée en étroite concertation avec de grandes firmes pétrolières mondiales, ce qui n'a pas manqué de susciter des questionnements et des appréhensions quant à leur influence sur le secteur pétrolier algérien. Ces appréhensions sont-elles justifiées '
L'un des principaux objectifs visés par la révision de la loi sur les hydrocarbures est d'attirer plus de capitaux étrangers dans le secteur des hydrocarbures en Algérie. Il n'est donc pas anormal d'interroger et de consulter des compagnies étrangères pour comprendre leurs besoins et leurs attentes. Cela ne signifie pas que ce sont ces compagnies qui vont dicter leurs conditions à l'Algérie. Par ailleurs, n'oublions pas qu'une loi plus attractive est réclamée par le groupe national Sonatrach, qui aimerait bien pouvoir coopérer avec un plus grand nombre d'acteurs internationaux pour des projets pétroliers et gaziers en Algérie.
Cela permettrait en particulier de relancer l'exploration, ce qui est particulièrement important dans le moyen et le long termes. Les intentions ne sont donc pas mauvaises, mais il y a, en plus de certaines maladresses, un problème essentiel ,: le gouvernement actuel est-il bien placé pour proposer et tenter de faire adopter des modifications à la législation sur les hydrocarbures, un sujet particulièrement sensible pour le pays ' Manifestement, de larges secteurs de la population répondent non à cette question.

Propos recueillis par : Akli Rezouali


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