Les banques
pilotent l'opération de «retraitement» des dettes des PME décidée par le
gouvernement lors de la dernière tripartite. Les modalités d'application fixées
dans une note de l'ABEF donnent aux banques un rôle
actif. L'opération pourrait être une opportunité de nettoyer les portefeuilles
plombés par les crédits non performants.
Une note
confidentielle récente de l'Association des banques (ABEF) dont Maghreb
Emergent s'est procuré une copie fixe les modalités de rééchelonnement de la
dette bancaire des PME décidée en mai dernier dans le cadre de la réunion de la
«tripartite», commission qui réunit le gouvernement, les associations
patronales et l'UGTA. La note fixe le cadre
opérationnel de la décision de renflouement des entreprises en difficulté. Dans
les faits, les banques pourront restructurer la dette des débiteurs commerciaux
défaillants sur une durée maximale de treize ans répartie entre une période de
grâce de 3 ans au maximum et une période de remboursement limitée à dix ans. Le
taux d'intérêt maximal est plafonné à 6,5%. Durant cette période de grâce, les
agios sont pris en charge par l'Etat. C'est à ce niveau qu'intervient la
subvention publique aux entreprises et aux banques. La démarche semble
originale en ce sens qu'elle implique une responsabilisation des banques dans
la procédure de rééchelonnement des dettes de leurs clientèles défaillantes. Il
ne s'agit pas, comme dans les assainissements bancaires «traditionnels», d'un
simple transfert des créances d'entreprises publiques vers le Trésor et de leur
effacement complet de la comptabilité des banques. Dans le dispositif décrit
par la note de l'ABEF, les banques vont avoir un rôle
actif. Celles qui choisiront les entreprises susceptibles de bénéficier d'une
salvatrice bouffée d'oxygène devront suivre l'évolution de ces entreprises et
s'assurer du respect des échéanciers nouveaux établis après rééchelonnement. La
note reprend les types de créances éligibles au rééchelomment.
Les «créances à problèmes potentiels» qui peuvent être traitées dans le cadre
du mécanisme «sous réserve que les crédits d'investissements intégrés dans la
créance classés soient égaux ou supérieurs à 50% de la dette». Les autres types
sont les créances «très risquées» et les «créances compromises».
Formulation
alambiquée
L'éligibilité des
entreprises à cette procédure est la responsabilité des banques. En effet, selon
la formulation quelque peu alambiquée de la note «la viabilité de l'entreprise,
son potentiel d'évolution et les perspectives de marché doivent être établis du
point de vue de la banque». Cet élément est révélateur d'une situation plutôt
étonnante : l'ABEF enjoint les banques de faire leur
métier en établissant des analyses de crédit pour chaque demande de
rééchelonnement… Selon l'ABEF, les entreprises qui
failliraient à leurs obligations de remboursement seront automatiquement
privées du bénéfice du rééchelonnement. On ne sait pas à ce stade dans quelle
mesure la banque, ayant autorisé la restructuration, serait également passible
de sanction pour avoir produit un mauvais dossier de crédit rééchelonné. Les
banques, qui relookent leur comptabilité, sont au même titre que les
entreprises les bénéficiaires directs du rééchelonnement. Si les banques ne
sont pas menacées par l'allocation inconsidérée de crédits à des récipiendaires
inefficaces, nombre d'entreprises ne devront leur survie qu'à la seule
mansuétude de l'Etat. Le dispositif présenté par l'ABEF
ne constitue pas un abandon de créance ni un transfert des crédits non
performants au Trésor public. La démarche qui concerne à priori toutes les
entreprises en difficulté s'achèvera au plus tard le 31 décembre 2011 et
englobe tous les concours non performants jusqu'au 30 avril 2012.
Une opportunité de
nettoyer les portefeuilles
Les banques
joueront elles le jeu ? Elles ont en tous cas grandement intérêt à faire passer
le plus de dossiers possibles par la procédure de soutien aux PME en difficulté.
Il s'agit là d'une occasion tout à fait intéressante de nettoyer des
portefeuilles plombés par les crédits non performants. L'élément qui fait
défaut est bien sur l'absence de recours pour les entreprises qui pourraient
être jugées inéligibles par les banques. Cette possibilité est absente du texte
alors même que les banques, qui doivent répondre du non-remboursement
des crédits, ne subissent pas la sanction pour leurs engagements de départ à
l'évidence inappropriés et qui sont à l'origine des rééchelonnements. La
posture des banques est également l'élément qualitatif qui déterminera le
succès de cette procédure. La question clé est bien entendu de savoir si ces
établissements, très bureaucratisés, disposent des capacités d'analyse à même
d'appréhender les rééchelonnements. Sur un plan plus global, l'approche sera-t-elle
rigoureusement orthodoxe comme semble l'indiquer le texte de l'ABEF ou plutôt «compréhensive» ? La grande inconnue reste
le coût global de cette opération pour les finances publiques. Tout dépendra du
nombre d'entreprises concernées et des montants rééchelonnés. L'information
devrait être disponible au début de l'année prochaine, un bilan d'étape
pourrait alors être tiré en attendant de mesurer, comme le prévoit l'ABEF, l'efficacité économique de ce dispositif.
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Posté Le : 13/09/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Saïd Mekki
Source : www.lequotidien-oran.com