Une maîtrise collective algérienne

F inalement, l'équipe nationale voit son aventure se prolonger au terme d'une partie d'une rare intensité et qui a tenu en haleine des millions d'Algériens. On s'attendait certes à ce que les Verts ne fassent aucun complexe par rapport aux stars ivoiriennes. Mais de là à faire jeu égal et même à certaines périodes dominer leurs vis-à-vis grâce à leur jeu collectif et la bonne utilisation des espaces et notamment par l'aile gauche où Belhadj a servi de rampe de lancement. Il est vrai que lorsque tout leur sourit, les Ivoiriens sont impressionnants. Mais comme chaque médaille a son revers, on les a bien vus envahis par le doute lorsque les Algériens ont commencé à jouer comme ils savent le faire. Le mérite des Verts est d'avoir su surmonter le coup du sort de la 4ème minute lorsque Kalou avait ouvert la marque. Si Belhadj a multiplié les débordements et les centres sur son flan gauche, ce n'est pas par hasard. En effet, c'est Saâdane qui l'a encouragé à multiplier les percées de ce côté, sachant que le remplaçant Demel était nettement inférieur au titulaire Eboué, suspendu pour ce choc.

 Aussi, l'égalisation de Matmour est amplement méritée puisqu'elle est arrivée par l'axe de la défense des Eléphants. Tout été encore possible en seconde mi-temps. On imagine que les deux entraîneurs ont donné force consignes à leurs joueurs. Et pourtant Saâdane lui-même conscient du haut niveau de la Côte d'Ivoire a déclaré, «qu'après avoir franchi le premier tour dans les conditions que tout le monde connaît, tout ce qui viendra après, c'est tout bénef ! Je pense que la Côte d'Ivoire est un bon test pour nous, pour préparer, comme il se doit, la Coupe du monde». Nous ne pensons pas que ce discours a démotivé les joueurs, bien au contraire, la plupart d'entre eux connaissaient très bien leurs rivaux ivoiriens, ne nourrissant donc aucun complexe par rapport à ces derniers. D'ailleurs, Saâdane, tout en reconnaissant que le statut d'outsider convenait parfaitement à son équipe, a exhorté les joueurs: «Faites-vous et faites-nous plaisir, car vous n'avez rien à perdre et tout à gagner!». Et bien son message a été reçu cinq sur cinq, car ses protégés ont réalisé l'exploit d'éliminer le favori de cette édition.

 De fait, les camarades de Bougherra ont donné le meilleur d'eux-mêmes, face à un adversaire au sommet de son art. Parfois, des matches se jouent sur des petits détails. Les occasions ratées par nos attaquants viennent en tête de liste dans ce constat. Une citation ornait il y a un demi-siècle le vestiaire d'un club. En seconde période, il était clair que Saâdane a donné des consignes à ses hommes les incitant à attaquer et à aller provoquer leurs adversaires, ce qui fut fait mieux qu'on espérait, avec des mouvements offensifs bien orchestrés, le seul bémol étant les longues balles en profondeur en direction de Ghezzal, alors que celui-ci était constamment surveillé par la paire centrale ivoirienne, peu regardante sur les moyens. Il a fallu que Matmour lui prête assistance, ce qui a causé beaucoup de soucis à la lourde défense des «Eléphants», qui encaissa le but égalisateur sur une tête piquée de Bougherra. Ce constat fut encore plus prononcé lorsque le virevoltant Bouazza occupa l'aile gauche, semant la panique par ses centres et ses tirs. D'ailleurs c'est lui, et ce n'est que justice, qui a assommé les coéquipiers de Drogba, d'une reprise de la tête, qui ressembla à celle de Bougherra.

 Le plus remarquable dans ce match, c'est que les Verts, tout en bloquant les offensives ivoiriennes, ont menacé à plusieurs reprises le keeper Barry. Et c'est un miracle si celui-ci n'est pas allé plusieurs fois chercher la balle au fond de ses filets. L'EN est en droit de s'enorgueillir de cette victoire, car obtenue avec la manière, sur un score que nul observateur n'aurait osé pronostiquer. Après cette démonstration mémorable de football offensif et efficace, tout est permis dans cette CAN, qui nous promet encore de fortes émotions. Et la «baraka» n'a rien à y voir !