Une journée ordinaire à Mizrana

C'est sous un soleil printanier, au milieu d'une nature luxuriante où domine le vert du chêne-liège que s'élève le complexe sportif de proximité de la commune de Mizrana. Nous sommes à moins de dix kilomètres de la petite ville côtière de Tigzirt. En cette belle journée qui se prête surtout à la flânerie, le lieu est devenu le point de ralliement de dizaines de femmes et d'enfants visiblement heureux de bénéficier d'une journée libre. Les femmes, pour se rendre aux champs, échanger des visites, se promènent nonchalamment sur la route principale ou dans celles qui mènent aux divers quartiers. D'autres prennent le soleil au seuil des maisons ou bêchent dans leurs jardins. Nulle d'entre elles n'ignore que ce jour est la fête des femmes. En face du complexe de proximité, une piste nouvelle dans la montagne annonce l'arrivée prochaine du gaz. Le centre constitué de deux blocs, en contrebas d'un stade, est un espace d'activités même si de prime abord l'absence d'Internet paraît étrange dans un endroit destiné en principe aux jeunes. Ils peuvent tout de même s'initier aux rudiments de l'informatique et à des travaux manuels. « On célèbre toutes les fêtes nationales. Bientôt on entamera aussi des activités sportives, notamment les arts martiaux », nous explique l'une des trois filles qui assurent l'animation. Depuis déjà plus de quatre années, elles travaillent sous le régime du préemploi. Elles ne sont pas les seules. Elles sont nombreuses les filles qui, faute de mieux, se contentent du maigre salaire, insuffisant et surtout injuste pour celles qui ont fait des études supérieures. « La salle est fin prête et le matériel, comme les billards et les baby-foot, y est entreposé », nous explique une autre. Chaque Ramadhan, des chanteurs de la région et des troupes théâtrales sont invités pour égayer les soirées. Depuis quelques semaines, un groupe de femmes s'est constitué pour la pratique du sport. On semble aussi accorder un intérêt à l'environnement. La cinquantaine d'adhérents participe régulièrement à des campagnes de volontariat et de nettoyage. Si la forêt qui enserre la région a subi de graves outrages, on ne voit pas en bordure des routes ces décharges publiques qui amochent d'autres coins de Kabylie. Le cancer du sein est au menu d'une conférence animée par une responsable du service oncologie de l'hôpital Belloua de Tizi Ouzou. « On a appris beaucoup de choses sur les symptômes de cette maladie », nous dira une des femmes parmi une assistance attentive. Les femmes n'ont pas eu droit à des moments de joie. « La veille, une vingtaine d'entre nous sont parties à Alger où le ministère de la Jeunesse a organisé une exposition de gâteaux et d'habits traditionnels à l'hôtel Sofitel », rectifie une femme qui excelle dans la confection de gâteaux, sa source de revenus surtout en été. « Apprendre des choses vaut mieux », ajoute une autre. La conférencière prévoit déjà un retour prochain sur les lieux pour une opération de dépistage.