Algérie

Une «imposture» agissant comme un somnifère



Une «imposture» agissant comme un somnifère
La critique est l'aboutissement de la création. Pour tirer profit de toute ?uvre humaine, quelle que soit sa nature, on doit absolument l'étudier et la disséquer pour atteindre sa sève. C'est, au bout du compte, la finalité recherchée. Comme un scientifique, le critique, en toutes choses, agit avec méthodologie. En plus de l'expertise requise dans le domaine, d'autres paramètres comme l'intelligence, le savoir, l'expérience et le flair sont également nécessaires pour réussir une étude complète d'une ?uvre quelconque. Même la critique, elle-même, n'échappe pas à ce regard fouillé qui doit nécessairement susciter le débat. Dans la science, l'économie, l'industrie, l'agriculture, l'éducation ou le sport, ce travail d'analyse est indispensable au développement. Sans cet examen approfondi, le producteur ne saura pas, à lui seul, remédier à ses propres lacunes pour s'améliorer et s'émanciper. Dans le domaine de l'art et de la culture, la critique joue le rôle de catalyseur. Un poète, un écrivain, un cinéaste ou un dramaturge en a tellement besoin pour aller constamment de l'avant et se perfectionner.A la lumière de cet exergue, on réalise que l'exercice exige beaucoup de doigté, de pédagogie, de finesse et de savoir-faire. En un mot, n'est pas critique qui veut. Pour les privilèges de la fonction, on a forcément besoin d'une bonne connaissance du sujet en question et d'une large culture qui sont souvent le fruit de toute une vie de labeur et d'aventures. Et ce n'est pas tous les jours qu'on rencontre de tels profils. Bien au-delà de l'expertise, le critique est un créateur souvent anonyme. Un sacerdoce qui échoit souvent à de brillants universitaires, de fins lettrés, des académiciens éclairés et de talentueux journalistes. Devant la paresse ou la démission des magistères, la critique d'art en Algérie est réduite à sa portion congrue.Très peu de travaux sont produits dans cette catégorie. Les ?uvres de nos artistes les plus illustres (en littérature, cinéma, théâtre, arts plastiques ou design) sont évaluées et appréciées ailleurs. Et, l'?il étranger, bien qu'il soit bénéfique, n'est pas toujours impartial faute, peut-être, de connaissance suffisante de l'environnement culturel de l'?uvre. Le désintéressement des milieux universitaires est visiblement motivé par un tas de considérations objectives comme l'absence d'un marché dynamique de l'art, le manque de revues spécialisées, la restriction dramatique du champ éditorial et la désorganisation des filières opérant dans le domaine. Un critique a besoin d'espaces d'expression dignes de ce nom, de commandes émanant de fondations et d'instituts spécialisés et d'un paysage médiatique fort.Toutes ces conditions ne sont pas aujourd'hui réunies en Algérie. Cette déficience a fait en sorte que des journalistes, tout juste moyens, s'érigent en commentateurs attitrés de l'actualité culturelle. La presse écrite, comme les émissions culturelles à la radio et à la télévision, s'emploient à «magnifier» la moindre feuille de chou en chef-d'?uvre génial. Un coup dur bêtement infligé à la création. Car, au lieu d'inciter le créateur à se dépasser, à étendre les limites de son génie vers l'infini et à se renouveler, la critique superficielle des médias algériens agit comme un somnifère. Elle dorlote et suscite l'autosatisfaction. En définitive, cette «imposture» ne sert pas la cause de l'art et de la culture. Les producteurs encore exigeants, les rares spécialistes crédibles et les amateurs avertis se plaignent de cet effacement troublant de la critique. Et du coup, tout le monde se trouve interpellé.K. A.




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