Algérie

Une histoire de miches



Une histoire de miches
Au moment où les chômeurs se mobilisent pour obliger le gouvernement à leur offrir un emploi, les boulangers reviennent sur le devant de la scène. Le prix du pain, son coût de fabrication et surtout la marge bénéficiaire reviennent sur tapis. Les revendications sont légitimes diraient certains. Pas si sûr. Ainsi, le président de l'Union nationale des boulangers (UNB) a appelé à la nécessité de renforcer le contrôle sur la matière première qui entre dans la composition du pain, notamment le sel non iodé utilisé par certains boulangers.
Il est vrai que tous les moyens sont devenus bons pour augmenter ses revenus. La corruption pour ceux qui peuvent acheter des décisions et ceux qui sont prêts à les vendre. Des grèves et des menaces de séparatisme pour d'autres. Une révision de la Constitution pour déclarer que le sous-sol algérien n'est plus la propriété de la collectivité. Et ainsi va la vie en Algérie. Ces histoires de miches, d'allocation chômage, de fonctionnaires qui veulent être millionnaires ont toutes la même origine. Une histoire de pays riche avec une population pauvre. L'Algérie n'est pas riche et vit de loin au-dessus de ses moyens. Les réserves de change ne sont pas une épargne cachée par le gouvernement. Les agriculteurs et les industriels algériens vivent d'informel et de subventions. Si le marché pétrolier se retourne ou qu'une attaque terroriste détruit une usine à gaz (qu'à Dieu ne plaise) et les réserves et le fonds de régulation des recettes verront leurs niveaux passés à zéro en quelques mois.
L'Algérie, grâce ou en raison du programme de rattrapage socio-économique, est de plus en plus dépendante des importations. Les différents programmes d'investissement dans le secteur de l'industrie mettront quelques années pour être rentables et participer quelque peu dans la production de la valeur ajoutée. Le patronat privé ne semble pas prêt à investir dans la production de biens. Il s'agit en général d'un processus qui nécessite engagement et savoir-faire. Il est aussi source de peu de bénéfices. Il est donc préférable pour notre patronat de quémander des subventions et des effacements de dettes dans des activités comme le commerce ou les services. Les chiffres de la direction générale des impôts sont éloquents. Près d'un milliard de dollars sont à recouvrir en pénalités et fraudes. Il est heureux que l'impôt sur les salaires soit prélevé à la source sinon les caisses de l'Etat seraient bien vides.
En toute chose, il faut savoir raison gardée. Des demandes légitimes ne sont pas nécessairement des demandes justes ou réalisables. Les boulangers, les chômeurs et les fonctionnaires ont certainement des demandes légitimes mais ils devraient nous dire quel rôle doit être dévolu à l'Etat.
Les boulangers et le patronat en général veulent un Etat libéral. Les chômeurs, à travers la responsabilisation du gouvernement, veulent un Etat communiste. Les fonctionnaires, quant à eux, veulent juste être payés comme des patrons sans prendre le moindre risque et veulent un Etat fortement bureaucratisé. Quand aux agriculteurs qui ne payent pas d'impôts et qui ne veulent pas payé leurs factures d'électricité, ils veulent simplement qu'il n'y ait d'Etat que pour prendre en charge leurs coûts de production. Le gouvernement a le droit et même le devoir de dépenser les recettes fiscales pour un développement harmonieux de la Nation. Seulement s'il se met à réaliser toutes les demandes mêmes les plus incongrues, l'Algérie court encore une fois après une crise. Le gouvernement ne peut pas faire de tous les chômeurs des fonctionnaires. Il ne peut pas faire des fonctionnaires, de plus en plus nombreux, des millionnaires. Il ne peut pas faire des agriculteurs et des patrons de nouveaux milliardaires. Le gouvernement a le droit et surtout le devoir de dire parfois non. Sinon même le prix des miches de pain s'élèvera à des milliers de dinars.
A. E.


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