Algérie

Une décision qui signe le forcing électoral



"Inique", "Injuste", "Lourd et dur" ou encore "Justice aux ordres". Le verdict prononcé hier tôt dans la matinée par le tribunal de Sidi M'hamed à l'encontre des prévenus porteurs de l'emblème amazigh a fait l'effet d'une douche froide sur les familles des détenus et les nombreux citoyens qui attendaient un geste de clémence de la part des magistrats. Inattendu au regard des griefs retenus contre ces détenus, des faits sans fondement juridique, ce verdict réduit à néant les maigres illusions nourries par le récent mouvement de grève des magistrats assimilés par certains à un sursaut d'orgueil en faveur d'une justice "indépendante".Car il est pour le moins curieux que des personnes poursuivies pour les mêmes motifs soient libérées dans d'autres tribunaux du pays, comme à Annaba, à Chlef ou encore plus récemment à Jijel et que d'autres soient condamnées à Alger. Passons sur le fait que l'emblème amazigh est déployé dans certaines wilayas, par milliers, sans que cela suscite des poursuites ou des arrestations. Cette justice à deux vitesses, au-delà qu'elle renforce le sentiment de ceux qui ne croient plus à un pouvoir judiciaire affranchie de la mainmise du pouvoir de fait, comme l'ont dénoncé les magistrats eux-mêmes, reconnaissant explicitement son asservissement, fait voler en éclats les spéculations autour de probables mesures d'apaisement pour créer le climat nécessaire au rétablissement de la confiance et, par ricochet,
pour aspirer à susciter une hypothétique adhésion à l'option électorale. Mais bien plus, par certains aspects, cette "main lourde" signe le choix définitif d'un forcing électoral adopté par les décideurs. Car parallèlement à ces condamnations de jeunes dont le seul tort, pour la plupart, est d'avoir brandi l'emblème amazigh, la traque des activistes se poursuit. Dernière en date : l'arrestation lundi soir, devant le tribunal de Sidi M'hamed, du jeune Mohamed Tadjadit. On ignore pour l'heure les raisons de son arrestation, mais tout porte à croire qu'elles seraient liées à ses interventions sur les réseaux sociaux. Incommodé par une mobilisation qui refuse la résignation et le renoncement, le pouvoir, après avoir misé sur le sacrifice de certaines figures du régime, puis sur l'essoufflement du mouvement, a décidé, dès l'échec de l'organisation du scrutin en juillet dernier, de recourir à d'autres artifices pour se sortir de la crise dans laquelle il s'est empêtré.
Outre des arrestations tous azimuts, dont la traque s'étend aux réseaux sociaux, parmi les figures émergentes du mouvement, il décide de fermer les voies d'accès à Alger le jour des marches, verrouille les médias, notamment publics, et inspire un pseudodialogue conclu à la hâte par la mise en place d'une autorité des élections dont les membres sont choisis par lui-même. À cela s'ajoutent les menaces à l'encontre de tous ceux qui s'opposeraient au scrutin et le travail de sape des "médias-mensonges" et autres "mouches électroniques", selon un vocable consacré. Malgré les nombreuses initiatives, propositions formulées par l'opposition, la société civile et autres personnalités, et autres multiples appels en faveur de mesures d'apaisement, le pouvoir, qui a gardé les mêmes figures dont la rue réclamait le départ en vain, est resté droit dans ses bottes. À un mois de la date du scrutin, il semble plus que jamais décidé à l'organiser, quitte à ce qu'une bonne partie des Algériens le boude. Et quitte à ce que le futur président souffre du déficit de légitimité, handicapant pour toute entreprise de réforme, encore plus dans un contexte de grave crise politique et économique exigeant la confiance et l'adhésion de la population. Mais le mouvement l'entendra-t-il de cette oreille '

Karim K.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)