Algérie

Une corruption, plusieurs «remèdes»



La corruption aura toujours un bel avenir en Algérie tant le phénomène bénéficie de plusieurs conceptions aussi contradictoires les unes que les autres. Cette contradiction, curieusement alimentée par des représentants du pouvoir, participe dans la longévité qu'on accorde au fléau. Car, à défaut de volonté politique de lutte et d'institutions libres pour une telle 'uvre, on se contente de parler de corruption, pendant que celle-ci trouve les meilleures conditions de sa propre prospérité.«Il faut une lutte sans merci contre cette gangrène qui sévit particulièrement dans le secteur économique public», décrète Farouk Ksentini, pour qui, «ce fléau dégrade l'image de l'Algérie». S'appuyant sur le rapport établi par la Cncppdh et remis au chef de l'Etat, le fonctionnaire des droits de l'Homme note que «chaque fois qu'il y a un marché public important, il y a des acteurs qui commettent des irrégularités».
Sur le fond, Ksentini ne contourne pas la réalité. Il s'alarme du fait que la corruption a atteint des «proportions extrêmement insupportables». L'exact contraire de ce que suggérait le président de l'Assemblée populaire nationale lors de la séance de clôture de la session de printemps. «Il serait préférable et pour l'Etat et pour la société de ne pas rendre tendancieux ou politiser ces crimes», a plaidé Larbi Ould Khelifa devant les députés et l'équipe du gouvernement. Mais pour éviter le tendancieux et la politisation des crimes, Ould Khelifa recourt à un argumentaire bancal : l'indépendance de la justice. La prouesse est bien là : pour museler toute discussion autour des faits de corruption, on s'appuie sur une virtuelle indépendance de la justice ! Pourtant, nul besoin d'une enquête ou d'une plaidoirie pour se rappeler que les actions judiciaires enclenchées ici n'étaient pas possibles sans celles entamées auparavant ailleurs.
Ainsi, on est en face d'un phénomène de corruption qui gangrène entreprises et institutions et menaçant même le tissu social, mais qui ne fait pas encore consensus sur la méthode pour l'affronter. Cette absence de consensus sur «l'état des lieux» du phénomène peut attester un manque de volonté de lutte contre la corruption. Elle révèle cependant, au-delà des contradictions à déceler dans les discours des officiels, une finalité consensuelle. Celle de contribuer aux discussions qui feignent une lutte contre la corruption tout en doutant de l'existence même du phénomène. Il faut craindre qu'ils nous recommandent dans l'avenir de patienter jusqu'à ce que la justice gagne en indépendance pour lutter «sans merci» contre la corruption.
A. Y.


Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Nom & prénom
email : *
Ville *
Pays : *
Profession :
Message : *
(Les champs * sont obligatores)