La cigarette soit on l'arrête soit elle nous arrête«Un mal qui répand la terreur... Tous n'étaient pas morts mais tous étaient frappés» Jean de La Fontaine (Les animaux malades de la peste)Ces vers tirés d'une fable de la Fontaine s'appliquent sans équivoque au tabagisme, à cette plaie de la civilisation du paraître à la fois comme façon d'être visible socialement, voire même, mais aussi bien souvent comme unique satisfaction de se shooter à bas prix dans un monde de plus en plus chaotique qui ne fait pas de place aux damnés de la TerreQu'est-ce que la «pandémie» du tabagisme'Le tabagisme est défini comme la consommation quotidienne des produits du tabac, principalement par combustion/inhalation. On parle de sevrage du tabac l'arrêt total; le succès est avéré si le sevrage est supérieur à un an. Face à l'arrêt du tabac, chacun est différent. Le tabac tue la moitié de ceux qui en consomment. L'épidémie de tabagisme tue près de 6 millions de personnes chaque année plus que le VIH/sida, la tuberculose et le paludisme réunis. Plus de 5 millions d'entre elles sont des consommateurs ou d'anciens consommateurs, et plus de 600 000, des non-fumeurs involontairement exposés à la fumée. Une personne environ meurt toutes les six secondes du fait de ce fléau, ce qui représente un décès d'adulte sur 10. Si aucune mesure n'est prise d'urgence, le nombre annuel de ces décès pourrait atteindre plus de 8 millions d'ici à 2030. Près de 80% du milliard de fumeurs que compte la planète vivent dans des pays à revenu faible ou intermédiaire, là où la charge de morbidité et de mortalité liée au tabac est la plus lourde. Les consommateurs de tabac qui décèdent prématurément privent leur famille de revenus, font augmenter les dépenses de santé et freinent le développement économique. La moitié des consommateurs actuels mourront d'une maladie liée au tabac. Le tabac a provoqué 100 millions de décès au XXe siècle et il en entraînera jusqu'à un milliard au XXIe siècle si la tendance actuelle se poursuit.(1) Les études montrent que peu de gens connaissent les risques spécifiques pour la santé de la consommation de tabac. La plupart des fumeurs qui connaissent les dangers du tabac souhaitent s'arrêter de fumer. Les coûts de la consommation du tabac se mesurent à l'aune de l'énorme charge de morbidité, des souffrances et des épreuves familiales. Les économies souffrent également de l'augmentation des dépenses de santé et de la baisse de productivité.Les effets nocifs du tabacLes effets du tabac sur la santé et la qualité de vie sont souvent méconnus et doivent être rappelés afin de faire prendre conscience aux fumeurs des risques qu'ils prennent et qu'ils font prendre à leur entourage. Les effets du tabac s'exercent sournoisement sur la plupart des organes, mois après mois, année après année... Il n'existe pas de «petits fumeurs»: c'est la durée de consommation qui est un des principaux facteurs de risque. Les personnes fumant 5 à 10 cigarettes par jour pendant plus de 20 ans prennent autant de risque.Le tabac aggrave les risques de développer un cancer. Le tabac est le premier facteur de risque du cancer. La fumée et les produits cancérigènes provenant de la combustion se déposent dans une grande partie des organes, par l'intermédiaire de l'inspiration et des poumons ou de la salive. Les voies digestives, la vessie, les poumons, la langue, et la gorge sont particulièrement atteints. Plus de 85% des cas de cancer du poumon sont liés au tabagisme actif et 5% au tabagisme passif. Arrêter de fumer diminue les risques de voir apparaître un cancer du poumon. De plus, le tabagisme est un des principaux facteurs de risque des maladies cardiovasculaires: infarctus du myocarde, hypertension artérielle, artérite des membres inférieurs, accident vasculaire, impuissance, thrombose sont aggravés chez les fumeurs. Avant 45 ans, 80% des victimes d'infarctus sont des fumeurs. Le tabac peut entraîner des douleurs des jambes survenant à l'effort. Des troubles cérébraux peuvent également s'observer: accident vasculaire cérébral, hémiplégie et parfois même un décès. Le tabac augmente le risque de rhinite et de conjonctivite allergique en raison de son rôle irritant. Le goudron provenant de la fumée de cigarette altère les cils des parois des voies respiratoires. La bronchite chronique est essentiellement liée au tabagisme. (...) Les études indiquent que le tabagisme peut accélérer le vieillissement de la peau.Le tabagisme passifLes études sur le tabagisme passif (c'est-à-dire l'inhalation involontaire par un sujet non fumeur de la fumée dégagée dans son voisinage) montrent que l'enfant exposé au tabagisme passif a une augmentation de près de 60% du risque d'infection des voies aériennes supérieures et inférieures. Le tabagisme passif est à l'origine de 600.000 décès prématurés par an. Dans la fumée du tabac, on trouve plus de 4000 produits chimiques, dont au moins 250 sont connus pour leur nocivité, et plus de 50 pour leur effet cancérigène.Les principaux avantages de l'arrêt du tabacArrêter de fumer présente pour tous les fumeurs des avantages immédiats et à long terme pour leur santé. L'impact sur la santé est considérable. Un fumeur régulier sur deux ayant commencé à fumer à l'adolescence mourra victime du tabac. Parmi ces fumeurs 50% décéderont avant 69 ans. L'impact du tabac dépend surtout de l'ancienneté de la consommation journalière. L'arrêt du tabac réduit la mortalité de l'ensemble des maladies liées au tabac. Plus l'âge est jeune à l'arrêt de la consommation du tabac, plus la réduction des risques liés au tabac est importante. Toutefois, il n'est jamais trop tard pour arrêter. Arrêter de fumer est une décision difficile à prendre. il peut s'avérer intéressant de savoir comment ont procédé les autres fumeurs. Décider de commencer à fumer est toujours plus facile que décider d'arrêter, mais l'effort en vaut la peine. Arrêter de fumer est bon pour tout le monde. Pour les femmes, il est recommandé d'arrêter de fumer avant de tomber enceinte. Voici les changements bénéfiques pour la santé qui sont observés: dans les 20 minutes qui suivent l'arrêt du tabac, votre rythme cardiaque et votre pression sanguine diminuent. Dans les 12 heures suivantes, votre taux sanguin de monoxyde de carbone redevient normal. Au bout de 2-12 semaines, votre circulation s'améliore et votre fonction pulmonaire augmente. Dans les 1-9 mois, la toux et l'essoufflement diminuent. Dans l'année votre risque de cardiopathie coronarienne diminue de près de moitié. Dans les 5 ans votre risque d'accident vasculaire cérébral redevient le même que pour un non-fumeur 5 à 15 ans après l'abandon du tabac. Dans les 10 ans votre risque de cancer du poumon tombe à près de la moitié de celui d'un fumeur et votre risque de cancer de la bouche, de la gorge, de l'oesophage, de la vessie, du col de l'utérus et du pancréas diminue. Dans les 15 ans le risque de cardiopathie coronarienne redevient le même que pour un non-fumeur. À environ 30 ans: on enregistre un gain de près de 10 ans d'espérance de vie. À environ 40 ans: on enregistre un gain de 9 ans d'espérance de vie. À environ 50 ans: on enregistre un gain de 6 ans d'espérance de vie. À environ 60 ans: on enregistre un gain de 3 ans d'espérance de vie.Parmi les traitements médicamenteux, on dispose de substituts nicotiniques, pour l'aide à l'arrêt du tabac pendant le sevrage, qui ont fait la preuve de leur efficacité. Il est souhaitable que l'utilisation de ces médicaments s'intègre dans le cadre d'une prise en charge globale comportant un soutien psychologique et un accompagnement du fumeur dans son cheminement vers l'arrêt du tabac. Les médicaments de substitution nicotinique sont sous deux présentations:La formation médicaleDans le cadre des enseignements, les futurs médecins doivent être formés à la prise en charge du tabagisme. Du fait de la pluridisciplinarité de la prise en charge des malades la participation de spécialistes de sciences humaines et d'intervenants de terrain est indiqué. Cet enseignement initial des médecins doit s'appliquer à tous les autres professionnels de santé, et particulièrement aux infirmières, aux dentistes et aux pharmaciens. Une formation commune de tous les acteurs concernés par le sevrage tabagique est indiquée. De plus, la participation des médecins et autres professionnels de la santé à des actions de promotion de la santé est une autre modalité, peut-être la plus efficiente de formation permanente. Cela ne suffit pas, la surveillance est essentielle Les mises en garde explicites peuvent persuader les fumeurs de protéger la santé des non-fumeurs en réduisant leur consommation à l'intérieur des habitations et en évitant de fumer près des enfants. Les campagnes médiatiques peuvent également réduire la consommation de tabac en incitant les gens à protéger les non-fumeurs et en persuadant les jeunes de se sevrer.Les recommandations de l'OMSL'OMS est engagée dans la lutte contre l'épidémie mondiale de tabagisme. La Convention-cadre est le principal instrument de l'OMS pour la lutte antitabac et elle marque une étape importante dans la promotion de la santé publique. Pour inverser le cours de l'épidémie de tabagisme, nombre de secteurs devront mener une action concertée. Les systèmes de santé nationaux sont bien placés pour jouer un rôle moteur dans l'application des mesures visant à prévenir et à traiter la dépendance à l'égard du tabac. En 2008, l'OMS a lancé une démarche d'un bon rapport coût/efficacité pour accélérer l'application des dispositions de la Convention-cadre de l'OMS. Intitulée Mpower, celle-ci se décline en une série de «bonnes pratiques» Les six mesures Mpower sont les suivantes: surveiller la consommation de tabac et les politiques de prévention Protéger la population contre la fumée du tabac. Offrir une aide à ceux qui veulent renoncer au tabac. Mettre en garde contre les dangers du tabagisme. Faire respecter l'interdiction de la publicité en faveur du tabac, de la promotion et du parrainage Augmenter les taxes sur le tabac. (2) Une autre technique dissuasive est l'utilisation de paquets de cigarettes neutres A titre d'exemple, les paquets de cigarettes pourraient ne plus afficher le logo des marques d'où l'expression «paquet neutre». L'objectif est d'éviter tous les éléments marketing qu'utilise l'industrie du tabac. Il n'y a plus le logo de la marque et les cigarettes ont un emballage unique, quelle que soit la marque. En Australie, pays qui est très avancé sur ces questions, les paquets sont tous verdâtres avec des images d'avertissement sur 90% de leur surface Ces emballages cassent l'envie d'acheter des cigarettes.(3)Qu'en est-il en Algérie'Il y a quelques années, une étude faite a montré que le tabac tue environ 30.000 personnes globalement toute proportion gardée comme en France (70.000) La stratégie à mettre en oeuvre pour aider à l'arrêt du tabac. En Algérie, le nombre de morts par habitant et plus élevé qu'en France. Depuis plus de vingt ans des textes et des lois ont été promulgués sans résultat probant. Ce n'est donc pas un problème de textes, mais un problème de suivi et de pugnacité face à cette pandémie silencieuse qui broie les familles, coûte à l'Etat en termes de traitements lourds, mais aussi ampute les forces vives de la nation de compétences et de force de travail. A titre d'exemple,«l'interdiction formelle de vendre du tabac aux mineurs» n'est pas respectée. Il est heureux et il faut le saluer que le gouvernement prenne à bras-le-corps ce problème, mais son action sera limitée s'il n'y a pas d'adhésion de la société et participation de chacun. Au Royaume-Uni, l'Association des médecins britanniques (BMA) a proposé d'interdire la vente de cigarettes à toute personne née après l'an 2000.On sait aussi que l'interdiction de la publicité fait baisser la consommation. L'interdiction de la publicité en faveur du tabac, de la promotion et du parrainage permet de faire baisser la consommation. Pourtant, une taxation élevée du tabac est une mesure rarement utilisée. Les taxes sur le tabac sont le moyen le plus efficace de réduire la consommation, notamment chez les jeunes et les pauvres. Une augmentation des taxes qui accroît le prix du tabac de 10% fait reculer la consommation d'environ 4% dans les pays à revenu élevé, cette baisse pouvant atteindre 8% dans les pays à revenu faible ou intermédiaire. Seuls 32 pays, abritant moins de 8% de la population mondiale, taxent le tabac à plus de 75% du prix de vente au détail.De ce fait, la méthode la plus efficace pour endiguer la propagation de la consommation du tabac passe par des politiques réduisant directement la demande En moyenne, une augmentation des prix de 10% sur le paquet de cigarettes devrait entraîner une baisse de 4% de la demande dans les pays à revenu élevé et de 4 à 8% dans les pays à revenu faible ou intermédiaire, La taxation doit cependant être progressive et dissuasive. La mise en place d'une liste d'espaces où il sera interdit de fumer (administrations, écoles, universités intra-muros) mais aussi l'accompagnement à la fois par la formation des personnels hospitaliers, mais aussi la formation au niveau des écoles dans un but préventif et les mosquées. La disponibilité de «cigarettes de substitution» telles que les patchs, gommes, voire cigarettes électroniques.Enfin la nécessité d'une explication pédagogique et itérative à travers les médias lourds et la presse publique et privée.. Le privé devant être obligatoirement associé à cette tâche nationale. La mise en place d'une task force à laquelle sera associée, outre le ministère de la Santé, celui des Finances, ceux du système éducatif dans son ensemble, le ministère de l'Intérieur, Douanes, l'Information et les Affaires religieuses et naturellement le ministère des Finances qui aura son mot à dire dans la taxation progressive du tabac. Les populations ciblées sont la jeunesse et surtout le système éducatif dans son ensemble (10 millions de jeunes à qui il est nécessaire d'inculquer cela). Il serait donc indiqué de faire participer les représentations des trois secteurs, mais aussi la jeunesse, et même les affaires religieuses qui auront un rôle à jouer, chacun à sa façon dans la lutte contre ce fléau. Enfin, une cause nationale de cette ampleur nécessite la mobilisation des médias publics et privés qui auront obligation de faire passer dans les médias lourds mais aussi à la radio et dans les journaux les messages visant à informer sur les dangers du tabac. En définitive, la lutte contre le tabagisme est une lutte globale. Une combinaison de mesures efficaces permet de réduire le nombre de fumeurs. Si on veut une baisse de la consommation de cigarettes, le prix doit encore augmenter substantiellement. La lutte contre le tabagisme qui est une épidémie à bas bruit est une cause nationale qui doit mobiliser les pouvoirs publics et la société civile, car le poids social en termes de santé qu'il faudra bien évaluer deviendra de plus en plus insupportable. Cette cause demande de l'endurance et un suivi des plus hautes autorités. A titre d'exemple, la volonté politique affichée devra faire l'attention de chacun d'entre nous pour aider l'Algérie à gagner la bataille.1.Tabagisme Aide-mémoire N°339 Juillet 20132. http://www.who.int/mediacentre/factsheets/fs339/fr/3. Lutte contre le tabac: «Le paquet sans logo motive les fumeurs à arrêter» Le Nouvel Observateur: 30-05-2014
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Posté Le : 26/07/2014
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Chems Eddine CHITOUR
Source : www.lexpressiondz.com