Une arme nommée corruption

Le patron sud-coréen de Samsung, le plus grand fabricant de smartphones au monde vient d'être gracié par la justice de son pays. Il avait été condamné et incarcéré après un vaste scandale de corruption, de détournements et de fraudes fiscales entraînant aussi la chute de l'ancienne présidente de la Corée. Curieusement et paradoxalement, sa grâce a été décidée pour encourager et stimuler l'économie du pays !La décision ne manque pas d'éberluer d'autant qu'il est signalé que l'incarcération d'un des hommes les plus riches du monde n'a pas contrarié l'essor de son entreprise qui a réalisé une hausse de plus 70% de bénéfices et que le développement de Samsung n'a été dérangé ni par la crise économique ni par la pandémie.
Bien au contraire, la firme mondiale a prévu d'investir 356 milliards de dollars dans les cinq prochaines années et de créer plus de 80.000 nouveaux emplois. L'actuel président coréen a affirmé que l'élargissement du magnat n'a pas de quoi surprendre puisqu'il a pour but de revitaliser et apporter une dynamisation de l'économie du pays.
Bien curieuse philosophie économique que celle-ci ! Mais aussi curieuse qu'elle soit, cette approche présentée à ciel ouvert et sans détours livre le nerf des vraies règles qui régissent l'économie mondiale et si, ici et là, les batailles économiques et politiques concurrentielles entre les Etats et les grandes firmes ont des allures légales, la mise à nu récente de Samsung démontre qu'il n'en est rien et que tous les coups sont permis. On apprend régulièrement des entorses à la légalité et à l'honnêteté financières à travers le monde, dans les formulations des contrats marchands entre des firmes internationales. Régulièrement, on fait semblant de mettre en avant le faux-semblant de l'honneur et de la déontologie. La raison d'Etat a bon dos et reste une arme infaillible dans l'économie de marché même si l'Etat de droit s'en trouve affaibli.
Avec une franchise a priori déroutante, la Corée du Sud démontre parfaitement que l'argent n'a ni odeur ni couleur et qu'il faille finalement très souvent, sinon toujours, se plier à redorer le blason de la corruption y compris au plus haut sommet des Etats.