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Un "tiroir-caisse" nommé Anep



Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la Culture et de la Communication et concepteur de la loi sur la publicité, soutient que, chez nous, "la manne publicitaire et les rotatives sont un moyen de pression" alors que la publicité devrait être "le premier sponsor de la liberté de la presse".L'utilisation de la publicité comme moyen de pression sur la presse prend des proportions de plus en plus inquiétantes. La gravité de la situation est d'autant plus à relever qu'elle est accentuée par une crise économique qui ne manque pas d'impacter une corporation dont la survie reste, en effet, dépendante de cette ressource. Le pouvoir en place le sait bien et ne s'embarrasse pas d'en profiter pour se débarrasser définitivement d'une presse jugée "hostile et dérangeante". Il commencera, en ce sens, par fragiliser les titres les moins nantis pour étouffer, ensuite, ceux considérés comme étant plus "robustes", faisant fi de toute éthique ou déontologie dont il ne cesse, pourtant, d'évoquer. Abdelaziz Rahabi, ancien ministre de la Culture et de la Communication (1998-1999), soutient que "l'utilisation de la publicité et les rotatives comme moyen de pression sur la presse en Algérie a dépassé tout entendement". Interrogé sur le sujet pour avoir été l'architecte concepteur de la loi sur la publicité qui, si elle avait été adoptée, aurait pu réguler un marché dont use et abuse le pouvoir, Rahabi fait remarquer : "Nous avons préparé un texte très ambitieux qui a été voté par le Parlement pour être ensuite bloqué par le Sénat. Cela s'est passé en 1999 et il faut noter que c'est le seul texte à avoir été rejeté par une chambre qui dit oui à tout." Et de poursuivre : "La volonté à l'époque était de s'associer à un grand groupe international et aller vers les marchés internationaux. On voulait faire de l'Anep une agence de communication pour le rayonnement de l'Algérie ici et ailleurs." Or, il se trouve que la suite des événements depuis 1999 a amené la presse, en l'absence de loi sur la publicité, à prendre un chemin sinueux avec l'apparition de multiples publications qui ne participent aucunement à construire une presse libre et impartiale. "La publicité devrait être le premier sponsor de la liberté de la presse. Au lieu de cela, l'Anep est utilisée comme tiroir-caisse pour servir les uns ou les autres", dira celui qui s'inscrit en porte-à-faux avec ces agissements et qui l'exprime sans détour. Rahabi accuse franchement ceux qui, aujourd'hui, prônent la transparence et les défie de publier la liste des bénéficiaires de la pub sans occulter les chiffres y afférents. "Il y a 2 ou 3 années, le budget de l'Anep était de l'ordre de 1 500 milliards de centimes. L'argent de l'Anep devient ainsi une source de rente exceptionnelle pour s'enrichir en Algérie avec des sociétés et des titres bidons ainsi que des boîtes de communication à ne plus en finir", assène-t-il. La presse indépendante privée, du moins pour certains titres, a payé un lourd tribut pour exister et gagner ses galons. Il n'est certainement pas antinomique de dire aujourd'hui que ces mêmes titres ouvrent droit aussi à la pub fut-elle publique ou privée. "Dans les pays scandinaves, on subventionne la presse d'opposition partant du principe qu'elle représente une partie de l'opinion publique. La publicité devrait être, comme elle l'est dans certains pays, le premier sponsor de la liberté d'expression et de la presse." Il se trouve qu'à la veille de la célébration de la Journée mondiale de la presse, la corporation est plus que jamais mise à mal et demeure dans l'attente d'une loi sur la publicité, certes remise à l'ordre du jour en 2013, mais qui ne connaît pas de suite jusqu'au jour d'aujourd'hui.N. S.




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