Un report et une raison qui laissent dubitatif

A la veille de la visite de deux jours que doit effectuer auMaghreb le président français Nicolas Sarkozy, incluant Alger, Rabat et Tunis,les autorités marocaines ont créé la surprise en demandant à l'Elysée le reportde l'escale dans leur pays. Officiellement, la partie marocaine a invoqué desraisons liées au calendrier du roi. Ce motif rapporté à la presse par leporte-parole de la présidence de la République française a laissé dubitatifs etinterrogatifs journalistes et observateurs. Ils sont peu en effet à accorder ducrédit à cette explication officielle du report décidé, tant il leur paraîtétrange que le palais royal marocain dont les relations avec l'Elysée sont siétroites ait attendu au dernier moment pour l'aviser de cette contrainte.Quoi de plus normal alors que les supputations qu'ilalimente d'autant que son annonce a été aussitôt suivie par celle faite à Rabatde l'élevation à «son seuil maximal» de l'alerte sécuritaire dans le royaumedécidée par les autorités, justifiée selon celles-ci par la «menace avérée»d'attentats terroristes projetés sur le sol marocain par la branche d'Al-Qaïdaau Maghreb. L'on peut légitimement déduire de cette information que c'est lacrainte de la menace terroriste, dont elles se sont déclarées certaines, qui adicté aux autorités marocaines leur demande de report de la visite du présidentfrançais à Rabat où, si leurs informations sécuritaires sont exactes, ilpourrait être la cible des terroristes en embuscade. Des informationssécuritaires qu'elles ont fraîchement obtenues et qui expliqueraient alors laprécipitation de leur démarche auprès de l'Elysée.Leur source peut être vraisemblablement les services derenseignement de l'Etat d'Israël. C'est en tout cas une conclusion plausible sil'on se rappelle que le ministre marocain des Affaires étrangères a rencontré àParis son homologue israélienne, et cela deux jours seulement avant que Rabatne formule sa demande de report à l'Elysée et que soit rendue publique lamesure marocaine élevant le seuil d'alerte sécuritaire dans le royaume. Lacollaboration, et en particulier dans le domaine du renseignement, entre leMaroc et Israël est un secret de Polichinelle. Il n'y a rien d'extraordinaire,ni d'impossible qu'en la circonstance les services israéliens aient «tuyauté»leurs collègues marocains sur des préparatifs d'attentats terroristes visantleur pays, dont ils auraient eu connaissance.La décision du palais royal de Rabat de faire reporter lavisite de Sarkozy n'affectera nullement les relations franco-marocaines.Mohammed VI et Nicolas Sarkozy ont déjà décidé de dépasser «ce contretemps» quia empêché la visite à Rabat de ce dernier, le 10 juillet, en se donnantrendez-vous fin octobre dans la capitale marocaine pour une visite d'Etatqu'effectuera alors le président français.Au delà de cette «péripétie» du report, il reste queSarkozy s'intéresse au Maghreb dont il veut obtenir des trois principaux Etatsqu'ils adhèrent à son projet «d'union méditerranéenne» et surtout qu'ils endeviennent les «démarcheurs convaincants». C'est là bien entendu l'espérance duprésident français. Rien ne dit qu'elle sera partagée et portée par seshomologues maghrébins.