Algérie

Un régime pour l'été



Le printemps est chaud. Les jeunes fréquentent déjà les plages. Insouciants, ils se baignent et prennent du plaisir par avance. Le mois de juillet correspondra au mois sacré de Ramadhan, la baignade sera à peine tolérée. Cette insouciance et cette joie de vivre n'est pas l'apanage de la jeunesse seulement. Elle est celle des boulangers, des praticiens de la santé, de tous les corps communs et de la jeunesse des villes où la Sonatrach possède un investissement.
De la «manif pacifique» à l'émeute, en passant par la grève, tout le monde veut nous mettre au régime. Pas de pain ni de soins et encore moins une scolarité complète. Les demandes les plus folles sont adressées au régime. Un régime fautif aux yeux de la majorité car il a mis ces catégories socioprofessionnelles au régime sec des années durant. Ce régime a aussi péché pour n'avoir pas pu ou pas su protéger la vache à lait qu'est la Sonatrach depuis 1963. Le front social est en ébullition pour une meilleure distribution de la rente. Enfin, une meilleure distribution de la rente c'est beaucoup dire. Une distribution de la rente qui serait orientée vers les salaires, primes et autres subventions et non pas vers l'outil de production.
Cette mise au régime commencera aujourd'hui par une menace de grève des boulangers. Ils estiment que leurs marges bénéficiaires sont insuffisantes et exigent du ministère du 20 pour cent. Cette dernière marge n'existe dans les faits qu'en Algérie. Plus personne n'est capable de dégager des retours sur investissement aussi importants. Dans le secteur de l'informatique et les nouvelles technologies, faire du «12 points» est un exploit salué par tous. Pourtant, ils ne se mettent pas en grève.
Mais les fonctionnaires et les boulangers, eux, sont en droit d'exiger et de prendre en otage un gouvernement et les citoyens. Chacun sait, pourtant, que la farine subventionnée est destinée à la fabrication de la pâtisserie revendue à des prix très chers. Personne parmi les contrôleurs du ministère du Commerce ou des impôts n'est en mesure de déterminer la part de la farine panifiable utilisée pour un autre usage. Il en va de même pour la poudre de lait utilisée pour la fabrication de fromages et de laitages.
Cependant, nous pouvons donner du crédit aux boulangers qui veulent nous mettre au régime. Ils ont dû s'émouvoir des nouvelles statistiques sur l'obésité et le surpoids en Algérie. L'Algérie un pays riche avec une population pauvre, à en croire les syndicats autonomes. Une épidémiologiste le fait remarquer : «L'obésité en Algérie est un véritable fléau et sa fréquence ne fait qu'augmenter actuellement, notamment chez les enfants, dont 1 sur 6 en souffrirait.» Elle affirme que le constat de l'obésité dans les écoles algériennes «est plus qu'alarmant et nécessite l'intervention des pouvoirs publics». «Cela se concrétiserait à travers le lancement d'une étude nationale et d'un programme de prévention, afin de mieux cerner les facteurs favorisant la progression de l'obésité.» L'Organisation mondiale de la santé confirme : «Environ 53% des femmes et 36% des hommes en Algérie souffrent de surpoids ou sont obèses». Et comme, parait-il, le pain fait grossir, nous pouvons comprendre le souci des boulangers de nous priver de pain et les fonctionnaires de demander des augmentations qui alimentent la spirale inflationniste.
La solution est donc dans le régime ou en dehors, selon ce que l'on fait dire au mot ou au concept. Mangeons moins de pain et aidons l'inflation à croître et nous aurons tous le corps svelte pour pouvoir parader sur les plages cet été. Pour le reste, à savoir le problème de la perte de pouvoir d'achat, nous attendrons d'avoir de vrais syndicats et de vrais ministres.
A. E.


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