Le consul d'Algérie à Gao (Mali) et six agents du consulat sont entre les
mains de parties «non encore identifiées», selon le ministre algérien des
Affaires étrangères, M Mourad Medelci.
« Le consul d'Algérie à Gao et les six agents du consulat ont été forcés
à sortir du siège de la représentation diplomatique. Ils sont actuellement sous
la responsabilité de parties que nous ne connaissons pas», a-t-il indiqué.
En réalité, c'est le plus mauvais scénario qui se profile, celui d'une
prise d'otages menée par Aqmi ou par une fraction dissidente, le Mouvement pour
l'unicité et le jihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Les membres du MNLA, qui
assuraient la protection de la mission consulaire, ont cédé devant les menaces
de djihadistes qui portaient des ceintures explosives. Du moins, selon la
version donnée par le porte-parole du Mouvement de libération nationale de
l'Azawad. Dans un communiqué condamnant l'enlèvement de diplomates, il dénonce
des «organisations mafieuses» qui se sont introduites dans l'Azawad
«contribuant à instaurer un climat de chaos et de désordre, après la libération
du territoire». Un témoin oculaire, interrogé hier matin par
Radio-France-International, a décrit l'attaque jeudi du consulat d'Algérie à
Gao par des djihadistes. Le groupe serait arrivé aux abords du consulat dans
une seule voiture et aurait demandé aux membres du MNLA qui assuraient la
sécurité de la représentation consulaire de quitter les lieux. Les éléments du
MNLA ont dans un premier temps refusé d'obtempérer, un individu est alors
descendu du véhicule une ceinture d'explosifs à la main. S'exprimant en langue
arabe ponctuée de mots en français, il aurait menacé de tuer tout le monde, de
faire sauter le consulat et ses abords si on n'accédait pas à leurs exigences.
Les hommes du MNLA, cédant à la menace, sont partis sans demander leur reste.
Le commando est entré dans le bâtiment officiel algérien et se serait emparé du
consul Boualem Sias et de six autres diplomates algériens qui auraient été
ligotés et emmenés dans un lieu inconnu. Les terroristes ont brûlé l'emblème
national et hissé un drapeau noir portant des inscriptions coraniques.
SCENARIO DU PIRE
Les diplomates algériens sont à la merci d'une organisation hostile.
Selon diverses sources, les assaillants seraient des dissidents d'Al-Qaïda au
Maghreb islamique (Aqmi) et se réclament du Mouvement pour l'unicité et le
jihad en Afrique de l'Ouest (MUJAO) qui s'est fait connaître par le kidnapping
en décembre 2011 de deux Européens dans un camp de réfugiés sahraouis. C'est un
mauvais scénario qui se profile.
Pourquoi les diplomates algériens ne se sont pas repliés d'une ville
abandonnée par l'armée malienne ? C'est une question élémentaire qu'on ne peut
s'empêcher de poser d'autant que la menace posée par Aqmi ou le Mujao allait
crescendo à mesure de la décomposition d'une armée malienne qui a abandonné des
villes entières sans la moindre velléité de résistance. A-t-on surestimé le
poids du MNLA, interlocuteur plutôt habituel des autorités algériennes, et surtout
sa capacité à protéger la représentation consulaire de l'Algérie ? En tout état
de cause, ces kidnappings constituent une épreuve pour les familles des
diplomates qui n'oublient pas le sort atroce réservé aux diplomates algériens
enlevés en Irak par Al-Qaïda. Cet enlèvement des diplomates algériens rappelle
que l'Algérie est en première ligne. Et qu'il lui sera difficile de rejeter
l'intervention étrangère tout en restant inactive alors que la situation se
dégrade dangereusement.
FAIRE LE MENAGE DANS L'ARRIERE-COUR
Dans un entretien publié par le journal Le Monde, Ahmed Ouyahia a affirmé
que le Cemoc (Centre d'état-major commun antiterroriste - Cemoc - créé à
Tamanrasset, en Algérie, avec le Mali, le Niger et la Mauritanie) était
«toujours actif» et qu'il se réunira dans les prochains jours à Nouakchott. Il
a insisté pour que l'armée malienne y soit représentée même si la crise de
légitimité n'est pas réglée à Bamako. «La présence des militaires maliens dans
ce cadre est impérative. Qu'il y ait des putschistes au pouvoir ou le régime
républicain, il y a une armée qui existe en tant qu'institution», a-t-il
déclaré. Le propos traduit clairement un sentiment d'urgence. Car de manière
sibylline, le message qui vient de l'extérieur, notamment de Washington et de
Paris, à destination de l'Algérie peut se décrypter ainsi: «Vous ne voulez pas
de notre intervention, alors faites vous mêmes le ménage dans votre
arrière-cour». Le Cemoc paraît bien le cadre approprié d'une implication plus
marquée… qui, pour certains observateurs, est certes risquée mais inévitable.
Il n'est dans l'intérêt de personne de laisser pourrir une situation qui
verrait l'installation durable de groupes armés à la capacité de nuisance
croissante dans une région de non-droit immense, notoirement très difficile à
contrôler. Les observateurs extérieurs à la région relèvent que de tous les
pays du champ, seule l'Algérie dispose des moyens d'agir. Mais dans une telle
hypothèse et pour éviter le danger d'ensablement dans un conflit multidimensionnel,
il sera nécessaire d'encadrer politiquement des interventions ciblées.
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Posté Le : 07/04/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com