Algérie

Un projet extrêmement onéreux



"Il aurait fallu aller vers des regroupements régionaux à vocation économique et attractive plutôt qu'un nouveau dégroupage administratif qui ne rime pas forcément avec développement", estime Mohamed Achir, professeur d'économie.L'annonce de la création prochaine de 10 nouvelles wilayas et de 44 wilayas déléguées par le Conseil des ministres, réuni mardi, a étonné et surpris plus d'un, surtout qu'elle est intervenue en plein milieu de la campagne électorale pour l'élection présidentielle du 12 décembre, mais aussi dans une conjoncture économique et financière difficile.
Or, l'on sait que la création de ces nouvelles entités administratives a un coût. Alors, des questions se posent sur le montant de ce coût et sur les capacités de l'Etat à y faire face. L'impact de leur création sur le développement est également posé. Sur ce dernier aspect de la problématique, Mohamed Achir, enseignant chercheur à l'université de Tizi Ouzou, estime que le gouvernement avait mieux à faire que d'opérer ce démembrement.
Il soutient qu'"il aurait fallu aller vers des regroupements régionaux à vocation économique et attractive plutôt qu'un nouveau découpage administratif qui ne rime pas forcément avec développement, si ce n'est multiplier le nombre de wilayas déléguées en multipliant le nombre d'administrateurs sans que s'ensuive une réelle efficacité". Explications : "Les wilayas déléguées sont beaucoup plus des circonscriptions administratives qui ne disposent pas véritablement d'un budget, parce qu'elles ne sont pas gérées par des ordonnateurs financiers et n'ont pas de grandes prérogatives.
On peut même les qualifier de boîte postale à même de transmettre des diagnostics en termes de besoins d'une région. C'est une représentation du wali au niveau d'une circonscription donnée sans direction représentative et sans budget spécifique", a précisé notre interlocuteur, ajoutant que "les nouvelles wilayas créées vont jouir, quant à elles, d'une autonomie financière, administrative et décisionnelle, et seront dotées de tous les moyens déconcentrés et décentralisés de l'Etat. Cela suppose une assemblée de wilaya, représentation de toutes les directions sectorielles, administratives et ministérielles".
En d'autres termes, une wilaya déléguée ne nécessite pas beaucoup d'argent pour exister, alors que la wilaya est prévue par la Constitution et coûte très cher, même si cela dépend, d'une wilaya à une autre, de sa taille, de son importance et de ses besoins.
"Si la wilaya nécessite un siège, cela peut coûter au minimum 1 milliard de dinars (pour une wilaya du Sud). Si l'on compte aussi le personnel, ce ne sont pas moins de 1 500 employés pour une grande wilaya et 500 pour une autre de taille moyenne ou plus petite. Si l'on part du principe que chacun touche en moyenne 35 000 à 40 000 DA, cela peut faire chiffrer la masse salariale à laquelle il faudra ajouter beaucoup d'autres charges et moyens d'équipement", atteste Mohamed Achir, en insistant sur la création des wilayas déléguées qui, selon lui, ne sont qu'"un habillage administratif qui se voulait un moyen de décentralisation, alors qu'en réalité, ce n'est qu'une sorte de déconcentration tant que nous n'avons pas opéré une réelle réforme, à plus forte raison que nous n'avons même pas pris en considération les projections et autres prospectives en matière d'aménagement du territoire, comme prévu par le Snat (schéma national d'aménagement du territoire) et les schémas régionaux".
Pour ce qui est du rapprochement du citoyen et de l'administration, on aurait tout simplement mieux fait d'"améliorer ou de mener à terme la numérisation de l'administration", dit-il.

Nabila Saïdoun


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