Algérie

Un plaidoyer en faveur de l'Etat de droit


Notre pays ou comme aiment à le répéter les Arabes orientaux le pays d' « un million et demi de chahids » dispose de tous les attributs, de tous les insignes dignes d'un Etat de droit : une Constitution, des assemblées élues, un Sénat, des juges et des magistrats pour dire le droit, des avocats pour plaider en faveur des citoyens lésés, des tribunaux administratifs chargés de trancher les litiges et réparer les injustices commises ça et là à l'encontre des citoyens, des prud'hommes et des inspections de travail chargées de faire respecter le droit du travail et poser des limites à l'arbitraire des pouvoirs privés et administratifs, etc. Toutes ces institutions existent indéniablement et fonctionnent plus ou moins correctement et pourraient l'être de manière encore plus efficace et plus équitable si elles n'étaient pas soumises à des limitations d'ordre culturel et politique. Par culture, il faut entendre une chose : la représentation que l'on a de la justice ou de l'équité procède directement du haqq, qui est une notion dérivée du fiqh musulman (le droit musulman). Quoique extrêmement prégnante dans l'imaginaire de tout musulman que toute action injuste heurte et révolte profondément, cette notion d'équité demeure cependant conditionnée plus par les affects ou les sentiments (bons ou mauvais) que par une représentation rationnelle de la société et du monde des phénomènes. Comme le petit peuple dont ils sont censés protéger l'intégrité physique et les biens, nos juges se laissent quelquefois guider plus par une sorte de subjectivité chargée d'affects (impression élémentaire d'attraction ou de répulsion qui est à la base de l'affectivité) que par un jugement rationnel et déductif. Lorsque les sentiments, la subjectivité et les émotions qui en résultent se substituent aux raisonnements déductifs et analogiques, il s'ensuit inévitablement cette conséquence : la neutralité cède le pas à la partialité. Ce n'est pas que nos magistrats soient incapables de raisonnements rigoureux ou qu'ils soient partiaux comme par nature ; c'est que la culture de base dont ils ont hérité depuis le berceau et la société dans laquelle ils vivent immergés se trouvent imprégnées d'une représentation du monde toute empreinte d'affectivité et de pulsions, satisfaites ou non. Confronté à divers drames humains qui le dépassent, le magistrat s'en remet quelquefois aux seules rumeurs de sa conscience subjective' pour trancher dans le vif les contentieux ou les litiges qui lui sont exposés. Par politique, il faut entendre les injonctions informelles, non écrites, de l'exécutif, dans les affaires du juge et dont il peut influencer les décisions sur telle ou telle affaire pénale. Dans sa mission difficile et ardue, le juge n'est pas homme de tout repos, surtout dans une société où l'exécutif empiète souvent sur les prérogatives du législatif, où l'autonomie des deux corps n'est pas complètement réalisée. Sur ses épaules comme sur sa conscience d'homme fait de chair et de sang, pèsent de lourdes responsabilités qu'il ne peut assumer sans se faire violence à lui-même. L'avocat n'est pas en reste, il subit comme le juge et comme le citoyen ordinaire, lésé ou non, de fortes pressions morale, psychologique, psychique et environnementale telles qu'il ne peut déroger à la condition humaine faite pêle-mêle de force de caractère, de justesse, de faiblesse, d'erreurs d'appréciation inévitables et de scrupules. Tous ces traits contradictoires se trouvent plus encore accentués dans une société aux repères instables comme la nôtre que dans une société régie par des normes et des références solidement fixées dans des textes transcendant les particularismes et les allégeances personnelles. Dans ce contexte culturel et juridique où les repères identitaires se chevauchent et se télescopent, où les intérêts interfèrent les uns avec les autres, où les ambitions contraires s'entrechoquent, il n'est pas difficile de déduire la part de l'arbitraire et de l'abus du pouvoir qui peuvent en résulter. Ces deux vices proviennent du fait que notre droit et notre régime institutionnel se cherchent encore une voie, une forme définitive, un socle sur lequel s'établir de manière fixe et durable. Notre droit constitutionnel comme notre droit pénal et administratif tiennent plus de l'emprunt que d'un produit local, national. Hormis notre code de la famille, inspiré de la charia islamique, toutes les autres formes de droit qui président au fonctionnement de nos institutions procèdent du droit français. Si nous sommes attachés de manière tatillonne, voire pathologique, au formalisme de ce droit français transposé dans nos institutions, nous ne prenons guère à la lettre l'esprit et la logique qui le fondent. C'est que ce droit n'a pas été pensé ou enfanté par nous-mêmes, mais par d'autres. Cela explique le fait que nous n'avons compris et intériorisé que les formes et guère le contenu et les finalités ultimes de ce droit transposé. Prenons par exemple le droit constitutionnel que nous avons adopté. Que suppose-t-il ' Il suppose que les gouvernants (fonctionnaires, ministres, hommes politiques') sont considérés comme des hommes ordinaires, soumis au droit comme le sont les citoyens. Or, une telle conception du « nivellement » par le droit n'est pas concevable pratiquement en Algérie, bien que le pays soit régi par une Constitution qui déclare sans ambages que « nul n'est au dessus de la loi ». Pourtant il en est, parmi les grands « commis de l'Etat » qui peuvent déroger à cette règle et bénéficier, en cas de faute grave, de circonstances atténuantes sous forme d'impunité... Seuls les Etats démocratiques sont parvenus à cette conception selon laquelle tous les citoyens, toutes conditions et fonctions confondues, sont égaux devant la loi. Apparue dans les cités de la Grèce antique avant de disparaître lors de la chute de Rome, cette vision du monde resurgit avec le mouvement libéral moderne né en Occident au cours du XVIIIe siècle. Avant cette date, il n'existait même pas de Constitution et les gouvernants étaient rarement soumis au droit. Le droit s'est d'abord développé surtout sous la forme du droit privé et du droit pénal. Ses normes ont consisté à réglementer essentiellement les rapports entre les membres de la communauté, restreinte ou élargie (rapports de famille et d'alliance, rapports de propriété, rapports résultant d'un dommage causé, etc.). Toutes les autres espèces de droit sont antérieures aux constitutions envisagées sous l'angle d'un pacte social (Cf. Montesquieu, J.J. Rousseau'). Avant l'établissement de celles-ci, les rapports entre gouvernants et gouvernés relevaient principalement de la répression pénale, la réglementation fiscale, le service militaire ainsi que des corvées civiles. Le droit administratif, qui est plus ancien que le droit public, s'est développé principalement en Occident à la faveur du développement du capitalisme commercial d'abord et industriel ensuite. Il suppose en effet un Etat déjà fortement constitué, doté d'une organisation plus ou moins bureaucratique, au sens que Norbert Elias donnait à ce mot, au lieu d'être fondée sur une allégeance personnelle. Contrairement à toutes ces formes de droit, le droit constitutionnel ou la loi constitutionnelle ressort d'un texte juridique supérieur à tous les autres, lesquels découlent de lui et en tirent leur validité.Du contrat social au concept de ConstitutionC'est dans ce contexte d'élaboration juridique et doctrinale qu'est née l'idée fondée sur la volonté de soumettre les gouvernants au droit. Cette volonté s'est matérialisée, en Occident en particulier, sous la forme de l'établissement de Constitutions auxquelles les dirigeants sont astreints à se soumettre au même titre que les administrés. Ces dirigeants ainsi soumis aux règles communes ne peuvent modifier ces Constitutions, sauf en des formes spéciales, solennelles et difficiles. Le concept même de constitution procède plus ou moins de « pacte » ou de « contrat social » largement débattu au cours des XVIIe et XVIIIe siècle. A l'idée d'une société fondée sur l'histoire et les traditions, se substitue progressivement l'idée d'une société basée sur la volonté des hommes de vivre en commun et qui doivent, par cette même volonté partagée, instituer entre eux une collectivité dont ils définissent les principes fondamentaux auxquels celle-ci devra se conformer, d'où le pacte social, qui est à la base même de l'Etat moderne. Quoique entachée d'ambiguïté, cette notion de pacte social sera pourtant un des points de départ fondamentaux des Constitutions des Etats démocratiques. Son ambiguïté, qui est en même temps son envers positif, tient au fait qu'elle résulte de la conjonction de deux facteurs : l'un philosophique, l'autre factuel (situation de fait). Cependant, une contradiction fondamentale subsiste : comment concilier liberté et contrainte ' En vertu du fait que les hommes naissent « libres et égaux », pourquoi vouloir alors les soumettre à une autorité coercitive ' Pour résoudre cette contradiction existant entre le principe que tous les hommes naissent libres et égaux et le besoin impératif d'un pouvoir politique pour garantir le fonctionnement normal de la société, on a imaginé l'idée géniale que cette société repose sur le consentement des individus qui la composent et qui auraient accepté « par contrat » fondé sur un large consensus de limiter réciproquement leurs libertés et d'obéir aux autorités établies par eux-mêmes. C'est dans ce contexte historique que se comprend le processus qui a conduit du contrat social à l'établissement des constitutions. Celles-ci sont apparues d'abord sous cette forme de pacte social dont elles deviennent, ensuite, le prolongement naturel qui précise et fixe les règles régissant les rapports sociaux. Si l'idée que la Constitution exprime le pacte social reste toujours sous-jacente, elle n'en a pas moins été reléguée au fil du temps au second plan, au profit d'un principe plus juridique que philosophique. La conception juridique du contrat social permet alors d'assurer le respect par toutes les autorités publiques des règles constitutionnelles. La Constitution envisagée sous ce rapport se trouve donc au sommet de la hiérarchie des normes juridiques et à laquelle tous les autres textes sont subordonnés (lois, décrets, arrêtés, etc.) Dit autrement, les lois constitutionnelles (les textes qui forment l'ensemble de la Constitution) sont considérées comme supérieures aux lois ordinaires, lesquelles doivent se conformer à leurs dispositions. Dans les pays véritablement démocratiques, il existe des mécanismes de contrôle de la constitutionnalité des lois, mécanismes qui assurent cette conformité.Constitution et droit constitutionnel'.Pour comprendre ce qui vient d'être énoncé, il faut distinguer deux sortes de constitutions : celles qui relèvent des lois et celles qui relèvent des « programmes ». Seules les constitutions-lois correspondant aux régimes politiques fondés sur la démocratie délibérative, telle qu'elle s'est réalisée en Grande-Bretagne avant de s'étendre à la France puis à l'ensemble du continent. Quant aux constitutions-programmes, elles renvoient aux Etats autoritaires dont les pays du tiers-monde en général sont l'exemple typique. Dans ces pays, dont l'Algérie constitue un cas spécial, la portée de la Constitution reste sinon théorique, du moins faible. Par exemple, la Constitution algérienne définit un idéal de justice bien plus que des obligations juridiques. A la lecture, celle-ci révèle deux volets : le volet purement réglementaire, qui a trait aux procédures et aux organisations des institutions politiques de base et le volet relatif aux obligations et aux limitations imposées à celles-ci dans leurs interventions auprès des citoyens. Or, l'observation sociologique attentive montre que seules les procédures du premier volet sont respectées, au moins formellement. Quant aux dispositions du second volet, elles sont rarement observées. Les textes relatifs aux déclarations des droits de l'homme, les garanties contre l'arbitraire, les recours contre l'abus du pouvoir administratif et gouvernemental demeurent plus ou moins lettre morte. Certes, notre droit constitutionnel permet aux citoyens lésés d'invoquer les principes contenus dans notre Constitution-programme, lorsque le régime se fait moins autoritaire et moins oppressif, mais ces recours se transforment souvent en un parcours du combattant tant l'administration est omnipotente et tient en haleine le citoyen par ses subterfuges, procédés dilatoires, ses lenteurs et ses incuries. En dépit de tout, il est préférable d'avoir une Constitution-programme que d'en être complètement privé. Mais ce qu'il faut noter, c'est que le concept de droit constitutionnel ne correspond pas exactement à celui de la Constitution. Il existe en effet un droit constitutionnel en l'absence de Constitution : ainsi, le premier Etat démocratique et parlementaire du monde, la Grande-Bretagne, ne dispose pas de Constitution, et l'Etat d'Israël, qui en a imité le principe, est régi par des textes dits fondamentaux (des lois successives élaborées) et non par une constitution.Dans les deux cas, les textes juridiques issus du droit constitutionnel font office de constitution, qui garantit tous les droits de l'homme et du citoyen. Dans ces deux pays, « privés » de constitution et non de droit constitutionnel, les citoyens sont protégés non seulement contre l'arbitraire et l'abus de pouvoir, mais bénéficient également d'une liberté d'expression si grande qu'ils peuvent critiquer leur gouvernants, les interpeller et les sommer de leur rendre compte de leur gestion des affaires publiques, sans que ces critiques donnent lieu à des plaintes en « diffamation » ou à des poursuites judiciaires'L'abus de pouvoir est cause d'injustice et d'insécuritéJ'en viens maintenant à mon cas, qui est loin d'être l'unique. Je l'inscris dans le contexte constitutionnel et dans celui des pratiques administratives algériennes. Je me prends pour ainsi dire à la fois comme « témoin » et « objet de recherche ». Et j'ai le droit aussi d'inclure mon chef d'établissement dans le registre de mes objets d'observation et d'analyse en qualité de chercheur et d'acteur de terrain. La suspension provisoire de mon poste avec blocage de salaire et plainte en sus déposée contre moi en justice au motif de « diffamation » ne traduit-elle pas un abus de pouvoir, une décision arbitraire ' Mon chef d'établissement peut-il être tout à la fois juge et partie ' A-t-il le droit de me suspendre de mon poste avant de me faire passer devant un conseil de discipline et avant que la justice n'ait statué sur mon cas ' Je laisse en suspens ces questions que le juge saura trancher mieux que moi. Ce qui m'importe en l'occurrence, ce sont les comportements de mon chef hiérarchique, et que je vais décrire encore une fois avec l'impartialité que requièrent la probité et l'exactitude nécessaires. Comment gère-il l'université et de quelle manière se comporte-t-il avec les enseignants en général ' La gestion des affaires de l'établissement se fait, à vrai dire, sur un mode autoritaire, agressif, plus obsolète que fondé sur l'écoute, la concertation et le dialogue. Des années avant mon arrivée à l'université de M'sila, le recteur avait déjà défrayé la chronique judiciaire locale, par le nombre de plaintes qu'il a déposées contre des personnes morales ou physiques ou qui ont été déposées contre lui. En 2008, ces assignations en justice se seraient élevées au bas mot à cinquante. Les motifs de ces plaintes relèvent le plus souvent de simples litiges, d'incidents mineurs, qui pourraient être réglées pacifiquement, à l'amiable. Son incapacité ou son refus de communiquer avec ses administrés le pousse à s'en remettre, pour le moindre différend, à la justice qu'il surcharge inutilement d'une montagne de paperasserie. L'idée que les honoraires des avocats engagés pour le défendre sont payés sur le Trésor public, l'encouragent dans ses déterminations à déposer plainte sur plainte contre tous ceux qu'ils juge rétifs à ses ordres ou qui font montre de peu de zèle ou d'empressement envers sa personne. Seules les personnes qui acceptent de subir, par peur ou par passivité, ses agressions verbales, ses humiliations, ses cris à n'en plus finir et ses sautes d'humeur, échappent à ses plaintes judiciaires. Dire que dans ses rapports avec les enseignants et le personnel de façon générale, M. le recteur use et abuse de son pouvoir ne relève pas de l'imaginaire. C'est une lapalissade que tout le monde, à l'université de M'sila, connaît. Des années avant notre suspension, les griefs, les doléances, les critiques adressés à ce recteur étaient légion. Que lui reproche-t-on au juste ' D'être « autoritaire » et peu réceptif aux préoccupations de ses administrés que sont notamment les enseignants ; d'être « cassant » et peu amène envers tous ceux qui tenteraient de l'approcher ; d'être « coléreux » et quelquefois brutal dans ses accents comme dans ses gestes ; de faire intervenir pour un oui ou pour un non les agents de sécurité pour faire évacuer de force l'enseignant qui se montre « rétif » ou qui manifeste son désaccord avec lui, etc. Ces reproches semblent pour la plupart fondés, puisque non seulement les médias nationaux n'en ont pas fait déjà écho, mais aussi la section locale du CNES. Tous ces griefs ainsi énumérés ont été exposés par un groupe d'enseignants au ministre, Rachid Haraoubia, lors de sa visite à l'université de M'sila en date du 7 mai 2008. Réunis autour de ce dernier avec les représentants des étudiants au siège de la wilaya, ces enseignants eurent l'occasion d'exprimer leur mécontentement et de vider leur chapelet. Détenu, calme et souriant, M. le ministre fut extrêmement attentif à leurs doléances tout en répondant à leurs questions de manière pesée et soupesée. Leur message a-t-il été reçu ' Sans doute, puisque M. le ministre qui ne semble pas avoir oublié ses réflexes de chercheur, prenait des notes sur son calepin. Mais, pour dissiper d'éventuelles équivoques et afin de ne pas donner l'impression au lecteur d'El Watan que le recteur de l'université de M'sila serait un « monstre » ou un homme qui agirait pour nuire délibérément à son établissement et à ses enseignants, il convient d'être impartial et nuancé. En fait, il n'est ni l'un ni l'autre. Il est tout bonnement maladroit. Cette gaucherie semble provenir du sentiment ou de l'illusion que les choses ne sauraient marcher autrement que par l'autoritarisme, et non par l'autorité fondée sur la suggestion, le dialogue et la concertation. Il a, comme tout un chacun, le défaut de ses qualités. Ce défaut réside, en l'occurrence, dans le défaut de communication, et c'est cette carence flagrante qui lui suscite des ennuis avec bien des enseignants. Ce déficit le conduit souvent à l'emportement, à élever la voix et au recours aux vigiles lorsqu'il se trouve confronté à la difficulté de communiquer de manière sereine avec un des enseignants. De ce fait, il inspire à beaucoup d'entre eux une peur presque immotivée. D'ailleurs, un des enseignants qui s'est entretenu avec M. le ministre lors de la réunion évoquée lui a déclaré textuellement : « En vingt ans de présence à l'université de M'sila, je n'ai jamais éprouvé, Monsieur le Ministre, autant de peur ! Peur de croiser M. le recteur ! » Et sans l'ombre d' exagération, certains enseignants, aussi bien « permanents » que « précaires » tremblent de toutes leurs jambes à sa vue. Ce n'est pas qu'il soit foncièrement mauvais ou « méchant » mais il ne sait pas ou ne veut pas communiquer. Il ne sait pas faire des enseignants des collaborateurs et des alliés susceptibles de l'aider dans sa mission de gestionnaire et de pacificateur dans ses rapports sociaux. Il ne se rend certes pas compte qu'en rentrant en plein examen dans des amphithéâtres bourrés d'étudiants, en hurlant, il n'apporte pas le calme, mais perturbe les examens, énerve les étudiants et met à rude épreuve les enseignants aux aguets. Sa méthode de gestion, tout comme son savoir être souffre de l'art de gouverner par le biais de la communication et de la concertation. On ne saurait en effet gérer de manière performante un établissement de cette envergure si les enseignants ne sont pas associés à l''uvre commune, s'ils sont traités comme une quantité négligeable, et s'ils sentent en permanence l'épée de Damoclès suspendue sur leur tête. Le fait que M. le premier responsable ne se déplace dans l'enceinte de l'université que flanqué d'agents de sécurité attitrés en dit long sur la manière dont est géré cet établissement. Combien de fois n' a-t-il pas ordonné à ses escortes de neutraliser ou de faire éjecter de force de l'amphi ou de quelque lieu que ce soit à l'université, l'enseignant qui a eu le malheur de s'opposer verbalement à ses excès autoritaires, ou de lui dire tout simplement de lui épargner des propos menaçants. C'est avec les mêmes procédés que je fus, le 23 avril 2008, rudement éjecté du seuil d'un amphi par deux vigiles sur ordre de M. le recteur au cri de : « Sortez-le ! sortez-le ! ». Qu'ai-je fait pour mériter une telle humiliation brutale et être ainsi mis dehors comme un vulgaire délinquant ' D'avoir élevé la voix lors d'un échange de propos avec un collègue ! Une enquête approfondie et impartiale démontrerait que ces faits relatés sont attestables et ne reflètent, du reste, que la partie émergée de l'iceberg. Les derniers faits relevant autant de l'abus de pouvoir que de la loi non écrite remonte au 3 juillet 2008, lorsque trois enseignants furent, sur un ordre verbal donné par le recteur au doyen de la faculté des sciences, empêchés de signer leur P-V de sortie, sans motif. Mais tout le monde a déduit que si Noureddine Hebiche, enseignant en mécanique, a été ainsi puni, ce fut à cause de sa participation active à la manifestation organisée à l'initiative de la section du CNES, dans l'enceinte de l'université, en signe de protestation contre ma suspension. Quant à Zaddam Lemnaouar et Abdelkrim Marzougi, ils ont été punis sur un simple soupçon : ils auraient conçu et fait circuler sur internet des satires s'en prenant à la personne du recteur'L'affaire des trois enseignants eut heureusement son dénouement grâce à l'intervention de la justice qui ordonna aux huissiers de constater les faits sur le champ. Outre l'autoritarisme et l'abus du pouvoir qui distinguent ce recteur, il faut signaler la gestion quasi privative des biens « communs » de l'établissement. Je ne cite qu'un seul exemple, dont le caractère cocasse, laisse perplexe. Il s'agit de l'ascenseur du rectorat. Nul autre ne l'utilise, sauf M. le recteur. Il dispose d'une clef pour l'ouvrir et le fermer, comme on le fait pour un appartement. Cette clef ne quitte jamais les poches de M. le recteur, et le comble de l'ironie, c'est que même les doyens n'ont pas plus la faveur de prendre cet ascenseur que les employés répartis à travers les quatre étages ! Recevant au cours du mois de mai les représentants des étudiants accompagnés du doyen de la faculté des sciences humaines dans le hall du rectorat, M. le recteur les convie à le rejoindre à son bureau situé au quatrième étage avant de s'engouffrer seul dans l'ascenseur ! Surpris, l'un des représentants des étudiants dit au doyen : « Mais pourquoi, cheikh, n'êtes-vous pas monté avec le recteur ' » « Ce n'est pas grave, lui répondit le doyen avant d'ajouter : ah ! il a la préséance, il représente le ministre... » Tous ces traits de comportement sont blâmables et ne sauraient être de nature à honorer ni le ministre, ni la tutelle, ni la science, ni les intérêts biens compris de l'établissement. Pour nous, l'université doit être un espace de production, de dialogue, de confrontation pacifique d'idées, de pratiques civiques et civiles, plutôt qu'un lieu d'affrontement, de peur et de suspicion.Notes1- Lire Hebiche Nourreddine Malaise à l'université de M'sila in El Watan du 31 octobre 2007, p.21.2- Lire El Yaoum N°2198 daté du 16/04/ 2008 titre significativement " Al Majliss el Watani li- assatidhat al ta'lim el 'Ali ghadhib 'ala Al 'Amid (Le Conseil national des enseignants du Supérieur en colère contre le recteur ".)3- Dans une lettre adressée le même jour à la section locale du CNES, la victime fait état des « brutalités » dont il a été l'objet de la part de ces agents de sécurité et s'élève contre « cette atteinte à la dignité de l'homme et du citoyen ».4- Lire Al assatidha wa al 'ummale yutalibune bi Waqf tajawuzate Raïs al Jami'a " ( Les enseignants et les travailleurs exigent que cessent les dépassements du président de l'université in Shuruq N° 2039 du 8 juillet 2007.
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