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Un patrimoine naturel sauvé in-extremis



Un patrimoine naturel sauvé in-extremis
N'étaient les travaux engagés pour l'aménagement d'une décharge publique intercommunale au lieudit Hermala, à moins de 12 km au sud de Tamalous, dans la wilaya de Skikda, la grotte serait restée à jamais dissimulée dans les maquis.Elle n'aurait jamais attiré la curiosité des habitants de Tamalous, dont la majorité ignorait jusqu'à son existence, hormis quelques riverains qui l'avaient déjà explorée, il y a des décennies déjà.«C'est dans cette grotte que les moudjahidine confectionnaient les bombes et réparaient les armes», lance Nacer Bouakkaz, le jeune président de l'association Afak pour le développement durable de Tamalous, qui a accepté de nous servir de guide.C'est lui d'ailleurs qui initiera une pétition pour sauver la grotte qui, comme il le révèlera : «allait être submergée par les ordures ménagères de la décharge intercommunale. Nous estimons que cette grotte représente un patrimoine naturel de la région en plus de sa valeur historique».Hjar Laâroussa, l'autre curiositéPour y parvenir, il fallait arpenter la RN 85 qui relie Constantine et Collo et emprunter, à moins de 12 km au sud de Tamalous, une piste qui mène au lieudit Hermala. C'est un immense espace que se partagent trois communes, Tamalous, Oum Toub et Sidi Mezghiche.En parcourant la piste, longue de plus d'un kilomètre, on ne tarde pas à remarquer la présence d'immenses pierres blanches qui gisent sur les bas-côtés. «Ces pierres formaient, il n'y a pas longtemps encore, un seul bloc que les habitants de la région désignait sous l'appellation de Hjar Laâroussa (les pierres de la mariée).C'étaient un ensemble de statues, grandeur nature représentant un cortège traditionnel avec la mariée et d'autres personnages. Nos parents racontent que ces personnes étaient réelles et qu'elles avaient été transformées en pierres pour un pêché qu'elles avaient commise», explique Nacer, en usant de toute sa conviction.On n'en saura pas plus au sujet de ce pêché, mais seulement que cet ensemble de pierres avait été détruit lors du tracé de la voie-ferrée qui passe à moins de 5 m de ces lieux. La piste s'achève. On est enfin à Hermala, une immense étendue de terre argileuse et de monticules rocailleux que lézarde une longue Chaâba, dite Mou-Lekhmamess.Non loin de là, des engins s'activent à défricher et à niveler le sol. Plus loin encore, on aperçoit l'un des casiers de la décharge intercommunale. De grandes étendues de maquis ont déjà été défrichées et leur couleur, rougeâtre s'incruste comme un malheureux contraste dans le paysage.On aura beau scruter cet espace, mais on ne verra pas pour autant la grotte. «Vous voyez ce chêne liège' L'entrée de la grotte se trouve à moins de 5 m au-dessous». Pour s'y rendre, il faut arpenter sur plus de 40 m une pente, puis se faufiler à travers un maquis très dense fait de lentisque et de myrtes.L'entrée de la grotte est enfin là au milieu d'un ensemble de rochers grisâtres. Longue à peine d'un mètre et s'élevant tout juste pour permettre à un homme de s'y glisser, l'entrée donne d'abord sur une première cavité. Là déjà, le regard est vite attiré par les formes douces et arrondies des pierres ornant ces lieux.Le grincement des chauves-sourisDeux couleurs dominent les parois, tantôt un rouge corrosif et tantôt un délicat blanc. Dès les premiers pas, on entend les grincements des chauves-souris et le battement de leurs ailes. De là, on glisse par une autre ouverture qui donne sur un couloir assez étroit, puis, plus bas encore, vers une autre cavité beaucoup plus vaste. Cette dernière s'ouvre par la suite par un autre couloir pour mener à d'autres chambres encore.Un interminable labyrinthe que seuls des spéléologues pourraient explorer dans sa totalité et sans risque aucun. «On est parvenu jusqu'à l'endroit qu'utilisaient les moudjahidine pour réparer les armes.On a même trouvé tout un arsenal de forgerons et des restes d'obus», raconte Nacir. Son témoignage est d'ailleurs conforté par la couleur noir cendre qui couvre les rochers des couloirs internes de la grotte, et qui semble provenir de l'activité des moudjahidine dans ces lieux. «Rares étaient les gens qui savaient ce qui se passait dans cette grotte. D'ailleurs ce n'est que vers 1958 que les militaires français ont eu vent de cette activité et la grotte fut alors bombardée», témoigne encore Nacir.La grotte et notamment dans ses parties profondes, s'orne de stalactites couvertes d'une étrange couche noire, due certainement aux fumées engendrées par l'activité des moudjahidine.La seule contrainte qui minimise les chances d'ouvrir cette grotte au public reste liée à sa propre configuration. Dans certains lieux, il reste impossible de joindre deux cavités de la grotte sans se forcer soit à escalader des parois où à glisser carrément. Des habitants de la région témoignent que cette grotte serait interminable.D'autres attestent qu'elle serait directement liée une autre grotte «Hjar El Ghoula» (la pierre de l'ogresse) située à moins de 2km au sud. Cette éventualité reste très plausible, vu que la roche calcaire couvre une large partie de cette région. Mais c'est là une autre histoire. Une autre découverte.


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