Algérie

Un observatoire pour mieux maîtriser les filières agricoles



Un observatoire pour mieux maîtriser les filières agricoles
Le contradictoire d'un organisme à un autre est loin de refléter la réalité du terrain dans de nombreux cas, les chiffres font régulièrement débat en Algérie. L'information statistique, outil pourtant nécessaire dans la prise de décision, ne trouve pas la place qu'il faut, particulièrement dans les secteurs stratégiques comme l'agriculture. Un domaine où les responsables qui s'y sont succédé jusqu'à présent ont négligé cet outil de gestion dans les différentes filières.En revanche, ils ne s'empêchent pas de dresser des chiffres souvent non fiables sur les niveaux de production pour rassurer lors des épisodes de crise. L'Algérie en a d'ailleurs vécus ces dernières années avec les crises du lait, du blé et de la pomme de terre, pour ne citer que ces exemples. Des épisodes récurrents avec un système de régulation qui a fini par montrer ses limites, nous contraignant à chaque fois à recourir à l'importation pour combler les lacunes en termes de gestion et aussi de production.A titre illustratif, en plus du blé dont la facture a atteint les 2 milliards de dollars les dix premiers mois de 2014, l'Algérie a même importé de l'oignon. Quels sont les niveaux de production pour ce légume de base pour la famille algérienne ' Qu'en est-il également pour les autres produits ' Les données ne sont pas toujours disponibles ou le sont parfois à moitié. Outre les difficultés en amont et en aval, la collecte de l'information pour une meilleure organisation pénalise également ce secteur stratégique.Une information pourtant nécessaire pour anticiper les crises et réguler le marché. «Si on veut développer le secteur, il faut fournir l'information nécessaire. Or, dans l'agriculture algérienne, c'est ce qui manque notamment sur les quantités produites, alors que l'information est un outil stratégique d'aide à la prise de décision pour les pouvoirs publics.Cela permet d'anticiper les crises, d'orienter la production et de réguler le marché», nous dira à ce sujet Dominique Pelissie, ingénieur, représentant du ministère français de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la Forêt, partenaire du ministère de l'Agriculture et du développement rural (MADR) dans le projet de jumelage portant sur la création de l'observatoire des filières agricoles et agroalimentaires. C'est dire la gestion aléatoire du secteur où les subventions ne manquent pas pour encourager la production. Mais sans résultats probants. Ni le producteur, ni le consommateur n'en sont bénéficiaires. C'est aussi un moyen, de l'avis de cet expert, pour mieux cibler les subventions. Car, nous dira-t-il, «il y a des aides inefficaces. Le système d'information une fois mis en place permettra de mieux cibler ces aides et de développer la production dans les filières stratégiques.»L'importance d'un outil d'aide à la décisionIl s'agit surtout de renforcer les moyens susceptibles d'assurer la sécurité alimentaire, un défi majeur auquel est confrontée l'Algérie, d'améliorer la sécurité sanitaire des aliments et de surveiller le marché. D'ailleurs, des notes de conjoncture et de suivi de campagnes sont prévues pour les filières concernées.Sont concernés dans un premier temps le lait, le blé, la pomme de terre, l'huile d'olive et les dattes. Des filières où l'Algérie a du mal à assurer l'équilibre offre-demande et la régulation, mais aussi à se placer sur le marché extérieur, comme c'est le cas pour les dattes. Les objectifs semblent donc clairs pour cet observatoire, né d'un jumelage qui aura duré au total 25 mois. Les pouvoirs publics mettront-ils le paquet pour permettre à cet outil d'assurer les missions qui lui sont assignées 'Fouad Chehat, directeur général de l'Institut national algérien de recherche agronomique (INRAA), estime nécessaire la mise en place des moyens de fonctionnement d'un tel organisme : «Certes, le jumelage a permis de former une équipe algérienne et de structurer l'observatoire, de s'organiser pour faire un suivi permanent des filières, collecter l'information, l'analyser et prévenir les différents acteurs de ce qui peut arriver.Mais nous avons besoin de moyens pour travailler». Pour M. Chehat, «l'augmentation des effectifs est primordiale. Tour dépend de la Fonction publique», précise-t-il. Théoriquement, l'observatoire a besoin d'un effectif de 25 personnes pour devenir une unité autonome et disposer de son budget et de ses moyens logistiques. Cependant, pour l'heure, aucune garantie n'est donnée à ce sujet. «On ne pourra pas tout faire si la Fonction publique ne nous donne pas de nouveaux postes budgétaires.On ne ciblera que quelques filières, mais on ne pourra pas toucher par exemple aux viandes, à la tomate», note M. Chehat, avant de poursuivre : «Comme dans beaucoup de cas, on s'aperçoit qu'on sait faire et qu'on a la volonté, mais on n'a pas toujours tous les instruments pour pouvoir faire ce qu'on veut pour accompagner la prise de décision». La conjoncture de baisse des prix du pétrole aggrave la situation. «Dans une telle conjoncture, je ne crois pas qu'on va mettre le paquet. Déjà qu'on a bloqué les recrutements pour les postes que nous avons.»Besoin de moyensLe directeur de l'INRAA estime que tout le monde a bien compris l'intérêt de l'observatoire. «Je ne doute pas que le ministre va nous appuyer pour que l'observatoire se développe. Mais, s'il y a beaucoup de difficultés et s'il faut faire des sacrifices, je ne sais pas si l'observatoire ne sera pas sacrifié», s'inquiète-t-il. Et d'ajouter : «J'espère tout de même que tout le monde a compris que dans une situation délicate comme celle-là où on aura moins de ressources, il faut avoir les instruments pour faire de bons choix.Or, seule une bonne connaissance des filières permet aux pouvoirs publics d'orienter les appuis, c'est-à-dire augmenter certaines aides ou diminuer d'autres en vérifiant leur utilité». «Sinon, les pouvoirs publics risquent de faire des choix arbitraires», avertit l'expert. Tout dépend donc de l'importance qu'accordera le gouvernement à cet observatoire. Lequel viendra seconder l'office national des statistiques (ONS) dont le travail reste limité en agriculture.L'office n'observe, en effet, que quelques produits sur quelques marchés de gros, mais pas le blé par exemple. D'où le manque d'informations utilisables par l'ensemble des acteurs de cette filière et de bien d'autres. Car, il s'agit de jouer sur tous les facteurs susceptibles d'augmenter la production. C'est à ce niveau que les résultats sont attendus.En attendant, la place est aux solutions de court terme et à l'importation. L'argent englouti par le secteur n'a pas tiré la croissance vers le haut et l'agriculture n'a pas bénéficié de l'aisance financière du pays qui a plutôt entraîné la dépendance vis-à-vis des importations sans création de richesses en parallèle. Maintenant que la tendance s'est inversée, le gouvernement promet de mettre de l'ordre en révisant entre autres les systèmes de régulation des produits de large consommation pour les adapter aux besoins des producteurs et des consommateurs.




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