Algérie

un nouvel organisme pour une économie en mal de régulation Conseil national de la concurrence



Le Conseil national de la concurrence a été réactivé fin janvier dernier, dix ans après le gel de ses activités. La nouvelle ne semble pas susciter beaucoup d'enthousiasme.
Avocat d'affaires, Nasreddine Lezzar est plutôt pessimiste. «Il me semble honnêtement que nous sommes face à une simple logique de gestion des carrières», affirme M. Lezzar dans une déclaration à El Watan. Ce spécialiste en arbitrage émet de sérieux doutes quant à l'indépendance dudit conseil. D'abord sur le mode de désignation de «personnes fonctionnarisées par décret et démises de leurs fonctions par décret, alors qu'elles exercent des attributions juridictionnelles», estime-t-il.
Ensuite, «le ministre de l'Intérieur et non le ministre du Commerce, ce qui est quand même bizarre, dispose d'une appréciation discrétionnaire et d'une entière et totale liberté de choix de ces personnes». Et enfin, relève-t-il, «l'absence de représentation des corporations et des organismes professionnels, c'est-à-dire la société civile». En clair, cet avocat d'affaires estime que «l'administration est en terrain conquis où elle décide seule. C'est le signe d'une gestion administrée de la concurrence et de ceux qui la régulent». Parmi les difficultés qui compliqueront davantage la tâche dudit conseil, M. Lezzar évoque l'évaluation de la concentration qui «repose sur la disponibilité et la maîtrise de données statistiques fiables sur les parts de marchés».
Or, précise-t-il, «cette condition est loin d'être réunie pour deux raisons principales : l'absence d'une structure indépendante d'information et d'analyse statistique et la prédominance et l'omniprésence de l'informel». Sur le fond, M. Lezzar s'interroge sur les raisons qui ont fait que le Conseil national de la concurrence, gelé pendant des années, «n'a jamais fonctionné en dépit des situations anticoncurrentielles où il est interpellé».
Ce retard considérable mis pour sa réactivation s'explique, selon notre interlocuteur, par une «volonté délibérée du pouvoir de bloquer et de geler jusqu'à nouvel ordre le fonctionnement de cette institution». Pour preuve, M. Lezzar cite l'exemple de l'ordonnance de 2003. Celle-ci, rappelle-t-il, «a prévu depuis 10 ans, dans son article 49, la mise sur place du bulletin officiel de la concurrence qui devait publier les décisions relatives aux questions touchant à la concurrence émanant du Conseil de la concurrence et de la cour d'Alger, ce n'est qu'en juillet 2011 (8 ans après) que le décret exécutif portant création du bulletin officiel de la concurrence et définissant son contenu ainsi que les modalités de son élaboration a été promulgué».
Selon les autorités, le nouveau conseil aura des missions majeures : le contrôle des concentrations économiques et des pratiques commerciales. Mais dans certains cas, l'Etat apporte un soutien financier aux entreprises publiques au détriment d'autres. Ce qui fausse les règles de la concurrence. «Le soutien financier couplé avec une politique de facilitation d'obtention de marchés sans passer par les règles de mise en concurrence prévues par le code des marchés publics est l'ingrédient de création d'un secteur public rentier et parasitaire», analyse M. Lezzar.
C'est le cas, entre autres, de la compagnie aérienne Air Algérie «qui se voit réserver le ciel intérieur et se voit assurer administrativement une part des marchés du ciel étranger. Cette politique explique l'application par cette compagnie de tarifs politiques ne découlant pas de mécanismes économiques», souligne-t-il. Globalement, ce dernier rappelle que «depuis certaines années, l'Etat est revenu à des décisions protectionnistes qui se trouvent aux antipodes des règles d'une saine et positive concurrence». Notre vis-à-vis demeure convaincu qu'«en l'absence d'une véritable économie réellement concurrentielle, aucune régulation n'est possible».


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