Algérie

Un nouveau coup dur pour l'Egypte



Un nouveau coup dur pour l'Egypte
L'attentat contre un bus de touristes coréens dans le Sinaï menace le retour de la croissance dans le secteur du tourisme, principale source de revenus du pays. Reportage.Le Caire (Egypte)De notre correspondanteEn partant de chez lui, le touriste ne choisit jamais une destination où il y a des problèmes. Il ne veut pas prendre de risques, il cherche la paix.» Moustapha Bakr revient aux fondamentaux de son métier, directeur d'agence de tourisme au centre-ville du Caire.Assis derrière son bureau, il rappelle une évidence : sans stabilité, les touristes ne reviendront pas en Egypte. Au lendemain de l'attentat qui a ciblé, dimanche dernier, un bus de touristes coréens au point de passage de Taba dans le Sinaï, le choc est palpable. Seul le bruit des ventilateurs brise le calme qui règne dans les couloirs de l'agence. L'unique écran d'ordinateur allumé est bloqué depuis deux heures sur une page d'accueil facebook. «Je continue à venir tous les jours, même s'il n'y a pas de client», confie Yasser Samir, concentré sur le match de football qu'il dispute avec son collègue, manette de PlayStation à la main. Responsable des réservations sur un bateau-hôtel amarré à Louxor, ce trentenaire attend impatiemment que l'activité reprenne. Cependant, il fait acte de présence, encaisse seulement la partie fixe de son salaire et marque des buts...L'ombre des années 1990Moins de 24 heures après l'attentat, le secteur du tourisme, déjà ravagé par trois années de chômage technique, est endeuillé. Un kamikaze d'une vingtaine d'années serait à l'origine de l'attaque qui a coûté la vie à trois touristes coréens, au chauffeur égyptien et fait 14 blessés.D'après le dernier récit relayé par la presse gouvernementale, le conducteur aurait accompagné deux passagers à la soute à bagages. A leur retour dans le véhicule, un inconnu les aurait suivis avant de se faire exploser.Jusqu'ici, les circonstances de l'attentat n'étaient pas claires. Dans un premier temps, les autorités égyptiennes avaient évoqué l'explosion d'un engin à l'avant du bus, près du chauffeur. «En touchant la zone la plus extrême du Sinaï, à la frontière d'Israël, les terroristes veulent faire passer un message : ils sont partout et peuvent atteindre toutes les places d'Egypte», lâche le patron de l'agence. Acculé, l'homme raconte qu'il a déjà traversé des périodes où le terrorisme faisait rage dans le pays. Mais depuis 2006 et les attentats dans la station balnéaire de Dahab, qui avaient fait 23 victimes, les touristes étrangers étaient épargnés.Au lendemain de la mort des quatre passagers du bus, de nombreuses questions demeurent sans réponse : l'Egypte va-t-elle renouer avec les pages sombres du terrorisme des années 1990 ' Jusque-là, le groupe djihadiste Ansar beit al Maqdes (partisans de la Ville sainte), qui a revendiqué l'attaque, s'en prenait principalement aux forces de sécurité égyptiennes. C'est donc la première fois, depuis huit ans, que des étrangers sont victimes du terrorisme en Egypte. Les professionnels doivent-ils s'attendre à revivre les années noires qui ont suivi l'attentat de Louxor en 1997, où 58 touristes avaient perdu la vie 'Un espoir déçuL'entame de l'année 2014 annonçait pourtant un début de reprise. Dans plusieurs agences, les recettes en hausse du mois de janvier et l'approche du Salon international du tourisme de Berlin avaient suscité un regain d'espoir. «Des hôtels de la mer Rouge ont affiché complet lors des dernières vacances, détaille le directeur. On commençait à reparler comme avant quand nos affaires marchaient. J'espérais même de nouvelles réservations.»Un optimisme partagé par le ministre du Tourisme, Hisham Zaazou, début février : après une année 2013 qu'il décrit comme l'une des pires saisons, il table sur le retour de 13 millions de visiteurs, soit un apport de 11 milliards de dollars avant la fin de l'année 2014. Or, avec la dernière attaque terroriste, c'est le poumon du tourisme égyptien qui a été touché. Ces trois dernières années, les touristes ont déserté l'ancienne Thèbes et les traversées du Nil pour se diriger presque exclusivement vers les complexes hôteliers situés au bord de la mer Rouge. Le fait que des touristes coréens soient parmi les victimes n'est pas anodin : la crise a conduit les agences à rechercher une nouvelle clientèle, notamment en Chine, en Corée du Sud et en Amérique latine. «Si cette nouvelle clientèle asiatique n'avait pas été là, un plus grand nombre d'établissements auraient mis la clé sous le paillasson», soutient Mostapha Bakr.Pourquoi maintenant 'Un moindre mal pour les employés. Yasser Samir, lui, a été touché de plein fouet. Son bateau reste à quai pour une durée indéterminée. Ce trentenaire explique que les Frères musulmans ne sont pas étrangers à son malheur. Il les accuse d'être derrière la vague d'attentats qui a secoué Le Caire et plusieurs villes du pays. «Pourquoi de telles attaques n'ont pas eu lieu sous la présidence de Mohamed Morsi ' Pourquoi n'a-t-on jamais entendu parler du groupe Ansar beit al Maqdes avant cet été '» s'interroge-t-il.Une récente enquête menée par le site d'information égyptien Mada Masr tente de répondre à ces questions. «Morsi a relâché 27 islamistes au cours de sa présidence. Le Conseil militaire en a libéré plus de 800», écrit Hossam Baghat, ancien directeur de l'Initiative égyptienne pour les droits de l'homme et auteur de l'article. Tous les anciens prisonniers, accusés par les sources de sécurité d'avoir repris leur activité terroriste, ont été libérés par Tantawi (maréchal à la tête du Conseil suprême des forces armées entre février 2011 et juin 2012) ou des tribunaux militaires.




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