Le professeur Mansouri Moulay Driss fait partie de cette génération pour
qui le service public avait un sens sacré.
En 1975, alors qu'il était bardé du grade de professeur dans sa
spécialité, l'ORL, alors que sa réputation était bien installée et que son
réseau de relations était des plus dense, Mansouri a opté pour une carrière
hospitalo-universitaire au lieu d'ériger sa propre clinique et de s'enrichir.
1975, pour rappel, coïncide avec la promulgation de la loi portant réforme de
la médecine. Donc, Moulay Driss continuait ce qu'il avait entamé dès mars 1962
quand il a rejoint le CHU Oran : former les médecins parallèlement à son
activité de médecin. C'est simple, la relève qui assure le fonctionnement de
l'ORL à l'hôpital d'Oran doit sa formation à feu Moulay Driss : le professeur
Mhadji ; Ben Mansour ; Professeur Hadj Allal, Professeur Berada pour ne citer
que ceux-là. Précisons qu'avant 1975, Mansouri avait déjà son cabinet privé
qu'il laissera par la suite à une de ses filles, qui a marché sur les sillons
de son père.
La question de cet attachement pour le service public demeure entière. Ce
qu'on peut avancer sans risque d'erreur, c'est que le professeur Mansouri était
bien installé dans son pays. D'ailleurs, il a transmis ce sentiment
d'appartenance à son pays à son fils, Mohamed Amine, qui se revendique avec
fierté et sans ambages comme le produit de l'école et de l'université
algérienne. Evoquant le souvenir de son père, il se remémore les vacances
passées à côté de la mer, sur la Corniche oranaise, où son géniteur s'adonnait
à la pêche sous-marine, aux interminables parties de belottes et des fois à la
chasse. Moulay Driss, qu'un de ses pairs n'hésitera pas à traiter de « seigneur
», avait pour complices durant ces moments de détente Chadli Bendjdid, alors
chef de la deuxième région militaire, Rachid Yellès, qui deviendra par la suite
général de l'ANP.
Ses relations de proximité avec ceux qui ont présidé aux destins du pays
ne l'ont pas motivé de réclamer un poste politique de gestionnaire. Pourtant,
son engagement aux côtés de l'ALN durant la Guerre de Libération nationale
l'habilitait à un tel poste, puisque l'Algérie souscrivait encore au dogme de
la légitimité révolutionnaire. Mansouri avait d'autres ambitions à cette
époque. Il croyait dur comme fer que c'était possible d'atteindre le stade que
l'ORL, sa spécialité, avait atteint ailleurs sous d'autres cieux. Il organisait
des séminaires de formation et des journées d'études pour faire profiter ses
poulains des expériences de leurs pairs étrangers. D'ailleurs, il avait, durant
son parcours de médecin, quelques opérations de grande complexité, nous affirme
un de ses étudiants. Ce qu'on peut retenir, c'est qu'il n'était pas du genre à
mythifier l'autre (étranger s'entend) et dévaloriser les siens. Sa trajectoire
personnelle peut expliquer ce trait de caractère.
Né à Tlemcen le 19 avril 1926, il effectuera sa première scolarité dans
cette ville. Mais son père, commerçant de profession, décida de s'installer à
Oran où les affaires marchent mieux. Moulay Driss continuera ses études
secondaires au lycée Ardaillon où il a décroché son bac. Il décidera d'entamer
des études en médecine. En fait, il ne fera que suivre l'exemple de son oncle
paternel, Abdellah Mansouri, qui était médecin en 1925. Il faut dire que Moulay
Driss est né et a grandi dans un milieu favorable à l'instruction. Son
grand-père maternel était enseignant dès 1905. Moulay Driss partira à
Montpellier, puis à Lyon pour ses études de médecine qu'il terminera en 1956.
Ce qui ne l'empêche pas de répondre favorablement à l'appel lancé par le FLN à
l'endroit des étudiants. Il rejoindra la base de l'Ouest et sera affecté au camp
de Larache, dirigé à cette époque par le commandant Si Moussa. D'ailleurs,
depuis cette date, une amitié solide liera les deux hommes jusqu'à la
disparition du professeur. Dès le cessez-le-feu, Mansouri est appelé à intégrer
le CHU Oran. Il prendra la place du docteur Planté-Longchamp qui a préféré
rester en Algérie jusqu'en 1965, contrairement à d'autres confrères à lui. Mais
dès son arrivée au CHU Oran, il s'attellera à mettre en place un service d'ORL
au sens plein du terme. En 1968, il décrochera son agrégation qui lui donne
droit au statut de professeur. Depuis, il s'est investi corps et âme dans la
formation des médecins pour combler le déficit relevé sur ce plan.
Son engagement dans sa profession ne l'empêchera pas de s'occuper de sa
famille comme il se doit. Son fils reconnaîtra que son papa était très présent
dans leur vie. D'ailleurs, deux de ses cinq enfants ont choisi la même
spécialité que lui, un est architecte et un autre commerçant. Vers la fin de sa
vie, il a connu de sérieux problèmes de santé. Il vivra six ans avec un coeur
greffé. Il subira même une opération de prostate. Mais dans ces moments
pénibles, il ne s'empêchera pas de faire la comparaison entre le niveau de la
médecine en France et dans son propre pays. Il est mort le 18 juillet 1997.
Depuis le 1er Novembre 2007, la nouvelle Faculté de médecine près de l'USTO
porte son nom. Ce qui est un minimum de reconnaissance pour... Moulay Driss.
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Posté Le : 25/02/2009
Posté par : sofiane
Ecrit par : Ziad Salah
Source : www.lequotidien-oran.com