Algérie

Un jeune Algérien chez l'Oncle Sam



Un jeune Algérien chez l'Oncle Sam
Le groupe Mena du programme Edward R. Murrow 2013, devant la Maison-Blanche«Les voyages forment la jeunesse.» Ce dicton n'a jamais été aussi vrai que lors de cette aventure qui nous a menés dans quatre des grands Etats des Etats-Unis d'Amérique: Washington DC, la Caroline du Nord, Washington (Seattle) et enfin New York. Un périple plein de surprises et de rebondissements d'un jeune de 25 ans chez son Oncle Sam. Allons ensemble à la découverte du Nouveau Monde...La tête remplie de clichés et d'appréhension nous prenons de nuit l'avion pour Rome, l'escale qui doit nous mener tôt le lendemain matin vers la capitale du...monde, où nous devons participer à un programme journalistique, de trois semaines, qui forme les leaders de demain. «Comment va-t-on être accueillis par les Américains' Subirons-nous une discrimination' Serions-nous stigmatisés' Comment allons-nous faire pour communiquer avec notre anglais approximatif'...». Zélée, la chef d'escale nous fait poireauter pendant des heures avant de demander à ce que nos bagages soient minutieusement fouillés! Les huit heures de vol qui nous mènent de Rome à Washington, sont donc un cauchemar pour nous. On se fait des tonnes de scénarios à la Homeland. Mais, comme par magie, toute cette angoisse disparait, dès notre atterrissage sur le tarmac de l'aéroport Dulles International de Washington DC.Le sourire des employés qui nous expliquent les procédures à suivre est rassurant. Que dire alors au moment de rencontrer notre traductrice qui, à notre grande surprise, portait le hi-djab. Au pays qui, dans notre imaginaire, craignait l'Islam, le hidjab passe inaperçu. «Oui, je vis très bien. Je n'ai jamais eu aucun problème, ni subi une quelconque discrimination par rapport à mon hidjab», rassure-t-elle. «On vit en parfaite harmonie, ici tu es libre de faire ou mettre ce que tu veux tant que tu ne touches pas aux droits et aux libertés des autres», explique notre guide face à notre étonnement. C'était le premier contact avec le Nouveau-Monde qui, d'emblée, nous parait terre de tolérance.C'est quoi un Américain'Nous prenons la direction de l'hôtel pour prendre nos quartiers au The Mayflower Renaissance qui se trouve en plein coeur de DC (c'est comme ça que les Américains appellent leur capitale Washington). Et surprise, c'est une ville presque déserte qui nous accueille. Il n'y a pratiquement pas de trace de vie humaine. Mais que se passe-t-il' «Ne vous inquiétez pas, c'est normal c'est le week-end. DC est une ville administrative. Dans son centre-ville, les gens y travaillent, mais n'y habitent pas. Donc le week-end, c'est une ville morte. Mais on est samedi, et ce soir vous allez avoir une surprise... Faites un tour en ville, allez au quartier universitaire de Georgetown, vous allez vous régaler», explique notre guide en maintenant le suspense. Effectivement, dès que la nuit tombe, changement total de décor. Magnifique! «C'est le week-end avant la fête d'Halloween, et la tradition veut qu'on aille faire la fête, et danser avec nos déguisements», rapporte un jeune Américain, employé dans une banque. C'est donc la queue devant les bars, pubs, boîtes de nuit, salles de spectacle, les cafés et les restaurants.On brave le froid avec des déguisements plus insolites les uns que les autres pour décompresser d'une semaine de boulot dure et stressante. Impressionnés au début, nous osons quand même aborder quelques-uns de ces fêtards constitués d'étudiants, d'employés dans les administrations ou d'entreprises à Washington DC. Surprise! Le contact a été très facile, malgré la difficulté de la langue. Sympathiques, ils prennent le temps et la peine de nous expliquer, de nous orienter, d'indiquer où se trouve le métro, comment l'utiliser,...Certains sont même curieux de savoir d'où nous «débarquons». Ils ne connaissent pas l'Algérie. Pensée en anglais, ils la confondent avec le Nigeria (Algérie' Nigeria').Le fait que ce soit un pays musulman, ne leur fait pas peur. Bien au contraire! Ils nous invitent à rester avec eux et nous «bombardent» de questions. Voila donc notre première soirée américaine, riche en découvertes où les préjugés commencent à s'évaporer...A première vue, le «Ricain» est très agréable, serviable et curieux de l'autre... C'est un être humain comme tous les autres avec les mêmes problèmes et aspirations.Et l'autre facette de l'Oncle Sam'Chose qui se confirme le lendemain lors de la première conférence de notre long programme. Présentée par le Pr Elyas Akram, originaire d'Egypte, elle a pour but de nous faire découvrir le modèle américain. Le conférencier explique que l'image de la politique étrangère des USA ne reflète en rien la réalité du peuple américain. «Seul 1% des Américains s'intéressent à la politique extérieure de leur pays. 99% du peuple ne s'intéressent qu'à la politique intérieure et particulièrement à ce qui se passe dans leur Etat. La politique extérieure est pour eux, ce qui se passe dans les autres Etats. Vous n'avez qu'à voir les Journaux télévisés pour le comprendre. Ils n'évoquent pas du tout l'aspect international», témoigne-t-il comme pour dire que les Américains vivent dans une bulle où est exclu le monde qui les entoure. Il souligne à ce propos que le 1% qui s'intéresse à la politique extérieure représente des multinationales, des lobbys d'intérêts, des think tanks et des ONG. Donc, ce n'est pas du tout le citoyen lambda. Ce qui, selon lui, démontre la totale contradiction de l'Amérique va-t-en guerre et du vrai peuple américain. Cette première conférence a également été l'occasion pour nous de faire connaissance avec le reste du groupe Mena «Middle East and North Africa», composé de 20 personnes. Lors de sa présentation, le Pr Akram explique le système fédéral américain, ses bienfaits et ses méfaits, et sa compatibilité ou non avec nos pays respectifs. Il aborde aussi l'autofinancement des 50 Etats fédérés (plus le district de Columbia). «Ils s'appuient principalement sur les taxes. Vous allez remarquer que n'importe quel produit que vous achèterez, ou service que vous souscriverez sera taxé. Vous payerez, en plus du prix initial, une taxe dont le taux diffère d'Etat en Etat. C'est cela l'autofinancement», fait savoir Akram. Il explique aussi pourquoi Washington n'est pas un Etat, mais un district et son choix comme capitale fédérale. «Il faut comprendre qu'aux USA, chaque Etat a sa capitale, ses députés, son président et son Congrès, sa Constitution, ses lois, sa police. Chaque Etat est un pays indépendant. Sauf l'armée et la monnaie qui sont les mêmes pour tout le pays. Washington DC est la capitale qui fédère tous ces Etats. Washington DC ne fait partie d'aucun des Etats fédérés américains (son territoire originel a été pris aux Etats de Virginie et du Maryland). Administrativement, il dépend directement de l'Etat fédéral américain et le Congrès fédéral y définit la loi», souligne-t-il. La capitale fédérale américaine s'appelait au départ Territoire de Columbia et fut créée à partir de la ville de Georgetown. Mais ce qui aura le plus marqué les esprits lors de cette conférence, est le rôle joué par un homme dans la grandeur des Etats-Unis, à savoir celui dont cette ville tient le nom, George Washington. «Chef d'état-major de l'Armée continentale pendant la guerre d'Indépendance (1775-1783) avant d'être le premier président des Etats-Unis (1789-1797). Il est considéré comme le père fondateur des USA, en participant en grande partie à la rédaction de la Constitution. Malgré cela, et l'insistance générale, il refuse de rempiler pour un troisième mandat», relate-t-il. Une histoire qui fait sourire plus d'un, confrontée à un Monde arabe où ses dirigeants s'accrochent au pouvoir. «C'est ce qui a fait sa grandeur, et qui a fait la grandeur des USA. Je vous le dis, pour faire un grand pays, il faut que le destin le mette entre les mains d'un grand homme commeM. Washington», réplique-t-il sous l'admiration générale. Ce sont les applaudissements qui suivent, après qu'il eut fait savoir que les ministres américains n'avaient pas de logements de fonction. «Seul Obama a la Maison-Blanche», soutient-il.L'anecdote algérienne...Après cette entrée en matière, on étaient prêts à affronter le reste des conférences de haut niveau au programme de cette aventure. En effet, le reste de la semaine a été marqué par des rencontres-débats avec des acteurs de la société civile.Des rendez-vous qui ont démontré le rôle important de la société civile pour la prise de décision. Chez l'Oncle Sam, chaque décision passe par la société civile. C'est elle qui a le véritable pouvoir. Au menu, il y a eu aussi des débats avec des responsables politiques américains, des militaires, des représentants d'ONG, des think tanks,...Ces rencontres ont donné lieu à de chauds débats, particulièrement en ce qui concerne la politique extérieure. Ce qui est marquant chez ses responsables, c'est leur ouverture aux débat et critiques, qu'ils acceptent. Les participants ont aussi eu droit à des réunions au département d'Etat américain. Des responsables de cette structure qui «gère» le monde étaient à l'accueil pour attiser notre curiosité. Mais, celle-ci était plus attirée par la jeunesse de ces responsables. Wawe!!! Des jeunes qui occupent des postes aussi importants dans un département aussi important, ça change des vieux du Mena.«Aux USA, on fait confiance aux jeunes, seule la compétence compte», atteste l'un de ces responsables qui ne peut s'empêcher de raconter une anecdote vécue trois ou quatre ans avant en Algérie et qu'il l'a marqué à ce jour. «On était une délégation menée par un jeune de 26 ans qui devait présenter un programme d'échanges dans le domaine de la jeunesse. On va à Alger à la rencontre du ministre de la Jeunesse et des Sports qui, en fait, était un...vieux», révèle, d'un air choqué, ce jeune responsable dont le «traumatisme» semble encore vivace.Après la politique, place à l'histoire.Une ville riche en histoire et symbolesLa suite de l'aventure «washingtonienne» a été plus touristique, avec la découverte des vestiges de cette ville pleine d'histoire. Tout ce qu'il y a à Washington est un témoin de l'histoire US. Même le luxueux hôtel où nous étions installés est chargé d'histoire. Les plus grands politiciens du monde y ont séjourné. Par exemple, son bar-restaurant porte le nom d'Edgar. En hommage à John Edgar Hoover, l'homme qui a créé le FBI et qui est resté plus de 48 ans à la tête de ce service de sécurité. J. Edgar était un habitué de ce «bar-kitchen», d'où son nom.Un autre hôtel de Washington, le Wilard, a aussi marqué de son empreinte l'histoire des Etats-Unis et du monde. Lors de la guerre de Sécession, le général Grant, après l'incendie de la Maison-Blanche, s'était installé dans cet hôtel, dont le rez-de-chaussée (lobby) était envahi par des groupes d'intérêt. D'où l'origine du célèbre mot qui définit les groupes d'influence, lobbys. Aujourd'hui encore, à la Maison-Blanche, cette pièce est accessible à de tels groupes. Ce ne sont que de petits exemples de ce que cache cette ville aux mille et un secrets. Ici, les avenues sont larges et bordées d'arbres, les édifices sont majestueux et aucun gratte-ciel ne vient couper la ligne d'horizon. Car aucun bâtiment ne doit dépasser le Capitole. Derrière cela se cache une très forte symbolique de la démocratie. Une façon de rappeler, au-delà de l'esthétique architecturale, qu'aux Etats-Unis, le dernier mot revient toujours aux élus, c'est-à-dire au peuple.«Le Capitole représente le pouvoir du peuple, et rien n'est plus important que ce pouvoir, ce qui fait que rien ne doit être plus haut», explique un guide. Tout comme le fait que la Maison-Blanche soit construite en pierre et le Congrès en marbre.«La pierre peut disparaître comme le pouvoir d'un président, mais le marbre est éternel comme le pouvoir du peuple», poursuit-il. A DC, il y a des musées pour tout. Même la presse a son musée appelé le Newseum. Il est passionnant, très instructif, c'est très intéressant de voir l'évolution de la diffusion des informations dans le monde et leur analyse.Un musée incontournable et très ludique, Ce mélange fait de Washington une ville incroyable et unique en son genre. Célèbre dans le monde entier. Chaque année, des millions de touristes se pressent pour découvrir «la Rome du XXe siècle» et respirer ce parfum de pouvoir symbolisé par les magnifiques bâtiments administratifs de Washington. Outre la beauté des parcs et l'intérêt des musées, la découverte de Washington passe aussi par la visite des principaux monuments qui sont situés dans le Mall, le plus ancien parc fédéral du pays qui s'étale sur plusieurs kilomètres carrés en adoptant une forme de croix. A chacune des extrémités du Mall, vous trouverez un monument incontournable. A l'est, vous pourrez visiter le célèbre Capitole où siège le Congrès des Etats-Unis.A l'ouest, c'est Abraham Lincoln en personne qui vous accueillera... ou plutôt son impressionnante statue située dans le Lincoln Memorial. Au centre du Mall, la plus haute construction de Washington est un obélisque haut de 186 mètres qui rend hommage à George Washington. Il est impératif d'y prendre l'ascenseur pour découvrir la ville vue du ciel. Tout près, vous trouverez le mémorial de la guerre du Vietnam. Sur ce mur noir, long de 150 m sont gravés les noms des 58 156 Américains tués ou portés disparus durant cette guerre.Au nord, le plus célèbre des bâtiments de Washington vous attend. Vous avez deviné, il s'agit de la Maison-Blanche et il est inutile de vous préciser la nature de ses occupants. Chose incroyable dans cet endroit où toutes les grandes décisions du monde sont prises, le dispositif de sécurité est très discret. On voit une seule voiture de police garée à proximité. Ce n'est pas comme au Palais du gouvernement ou à El Mouradia. Et contrairement à notre pays où il est interdit de photographier les bâtiments publics, devant la Maison-Blanche on prend les poses que l'on veut. On peut même organiser des manifestations et des marches. Il suffit de s'inscrire et d'avoir l'autorisation pour ce créneau horaire. On a vu certaines personnes, banderoles à la main, manifester seules. L'essentiel est que cela reste pacifique. «God bless america». C'est cela la liberté d'expression.Le rêve américain, quoi...Couvrir une conférence de John KerryLes participants à l'édition 2013 Dr Edward R. Murrow Program for Journalist International Visitor Leadership Program (Ivlp), ont eu droit à une surprise. Le département d'Etat américain qui organise ce programme leur a réservé une rencontre qui marquera la suite de leur parcours professionnel. Ils ont eu droit à 30 minutes avec le secrétaire d'Etat américain, John Kerry. Il leur a souhaité la bienvenue et les a encouragés pour la suite de leur parcours professionnel. Les représentants de chacun des sept groupes ont même eu le droit de lui poser une question. C'est la première fois qu'un secrétaire d'Etat rencontre des participants à ce programme qui date de plusieurs décennies. Ils ont même eu droit à un déjeuner au niveau de la salle des banquets du département d'Etat qui a vu défiler dans la même place, les grands de ce monde. Ce salon est, à lui seul, témoin de l'histoire de l'humanité avec ses meubles et tableaux qui ont appartenu aux différents présidents américains. Au-delà de cette rencontre et ce déjeuner partagés avec de hauts responsables américains avec qui ils ont eu le plaisir de converser, c'est la symbolique qui est à signaler. Elle a poinçonné à jamais leurs vies..Les conseils de Bob WoodwardUne autre surprise attendait les participants. Cette fois, c'est l'idole de tous les journalistes. Bob Woodward, le Zidane du journalisme, avec sa célèbre enquête journalistique du Watergate. Ses articles sur l'espionnage et les pratiques illégales du clan présidentiel ont entraîné l'ouverture d'une enquête sénatoriale, durant laquelle le président Richard Nixon refusa de fournir les bandes audio de la Maison-Blanche, prétextant que celles-ci n'existaient plus. Son mensonge fut découvert quelque temps après, obligeant dès lors le président Nixon à démissionner de son poste en 1974. Cette enquête menée par Woodward qui débutait dans le métier, est le rêve de tout journaliste. Les organisateurs ont donc préparé une rencontre avec «Bob» pour que les jeunes journalistes de ce programme puissent bénéficier de son expérience. Ils lui ont posé les questions qu'ils voulaient. Cette rencontre de deux heures a été aussi riche que tout un cursus universitaire. M.Woodward a raconté ses anecdotes et expériences journalistiques, mais à surtout donné des conseils aux jeunes journalistes pour la suite de leur carrière. Et le conseil le plus important de M. Woodward est de croire en ses capacités. «Persévérez, persévérez, ne doutez jamais, même quand tout est contre vous...», a-t-il lancé.




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