Algérie

Un général pour Tobrouk


Un général pour Tobrouk
Un général peut parfaitement se déplacer en taxi en temps de paix... et même de guerre. Il y a eu donc Un taxi pour Tobrouk, un grand film français des années 1960 sur les pérégrinations de quatre comparses pris dans l'enfer de la guerre dans le désert de Cyrénaïque. Khalifa Haftar est lui aussi général et il n'avait pas besoin de taxi pour ébranler, à partir de Benghazi, l'autre grande ville de la province, ce qui tient lieu de pouvoir central à la Libye post-Kadhafi. Il vient de se signaler par une action de rébellion à portée de tout général ayant un fort sens du commandement et un minimum de flair politique. Il suffit juste de choisir un moment propice dans une période de troubles et de confusion. Il avait déjà menacé de le faire dans des mises en garde sévères répétées aux acteurs de la foire d'empoigne qui assume un pouvoir politique factice à Tripoli. Vendredi, il est passé à l'acte. Sa cible numéro 1 : les milices, islamistes pour la plupart, qui font la loi à Benghazi et partout ailleurs dans le pays qui peine à mettre sur pied une armée digne de ce nom, trois ans après la fin du régime de Kadhafi. Le général Haftar n'a qu'un nom pour les désigner : terroristes. Le fait n'aurait pas tant attiré l'attention si, comme de nombreuses fois auparavant, il s'était agi de simples affrontements armés entre factions/milices rivales.L'offensive de l'ancien général de Kadhafi tranche par la détermination de son chef et le ralliement à sa cause d'officiers et sous-officiers de l'embryon d'armée régulière. Mieux, l'aviation et des hélicoptères, censés dépendre d'un commandement central dans la capitale, sont venus à sa rescousse et ont bombardé des positions de milices islamistes. Vrai ou faux, il se dit que l'action du général rebelle est suivie avec sympathie par de nombreux Libyens excédés par l'anarchie et le désordre que font régner des dizaines (plus de cent, semble-t-il) de groupes fortement armés. Clin d'?il à un probable avenir, les unités du général Haftar sont appelées «Armée nationale libyenne».Y aurait-t-il une suite ' Dimanche, les affrontements se sont déplacés à Tripoli où le Parlement a été pris d'assaut et un programme à court terme rendu public par les «insurgés-justiciers». Au vu du contexte actuel, d'abord caractérisé par une absence totale d'Etat et de moyens d'exercice d'une violence légale, nul ne peut se hasarder à pronostiquer une suite des événements. Par contre, on sait comment et pourquoi la Libye en est arrivée à cet état d'ingouvernabilité et, surtout, ce qu'elle devrait faire pour s'en sortir. L'action du général ne peut pas être qualifiée a priori de suicidaire, car elle met en relief une série d'urgences à affronter sans attendre. En premier, construire un Etat et une armée et non les reconstruire, car Kadhafi n'a laissé ni l'un ni l'autre. Si les institutions transitoires actuelles continuent à jouer les prolongations au détriment de ces priorités, il ne faudrait pas s'étonner que Haftar ou d'autres hommes doués pour le leadership mettent en ?uvre le principe en vigueur dans toutes les armées : le plus brave prend le commandement quand il y a vacance dans la hiérarchie. Le pouvoir serait alors à celui qui réunira sous sa houlette le plus d'hommes armés et acquis à l'ordre et la discipline. Seront-ils des putschistes ' Question à poser aux Libyens en leur demandant à quoi ils aspirent en ce moment.Le chaos libyen ayant des causes exogènes, France et Otan en particulier, les pays qui ont contribué à l'instauration de l'anarchie sanglante et déstabilisatrice au-delà des frontières de l'ancienne Jamahiriya, devraient à tout le moins être rappelés à leurs responsabilités. Paris ne s'exonérera pas à moindre frais de sa responsabilité en prenant la tête d'une croisade contre Boko Haram. Les armes de la secte nigériane ne proviendraient-elles pas, au moins en partie, du pillage des arsenaux libyens 'A. S.


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