Algérie

Un film exotique pour un peintre qui ne l'était pas



Organisée à l'initiative du tout nouveau Varda Film Club, la projection du film Gauguin, voyage de Tahiti d'Edouard Deluc a eu lieu jeudi soir à la salle El Khayam. Ce film français retrace une tranche de vie du célèbre peintre postimpressionniste fuyant la civilisation occidentale vers la Polynésie.Créé par un groupe de jeunes cinéphiles et activistes culturel, le Varda Film Club (dont le nom rend hommage à la cinéaste française, récemment disparue, Agnès Varda) organise des projections hebdomadaires chaque jeudi à 22h à la salle El Khayam (ex-Debussy).
Le choix fut porté sur le film d'Edouard Deluc, Gauguin, voyage de Tahiti, sorti en France en 2017. Plutôt qu'un biopic ordinaire, le réalisateur focalise sur les dernières années de la vie du peintre, marquées par son séjour à Tahiti et l'impact que ce dernier a eu sur son ?uvre. Nous sommes en 1891, Gauguin, campé par un Vincent Cassel zélé, en a marre de la misère, de la civilisation occidentale, de la morale et de ce succès qui ne vient pas. Il décide alors d'aller en Polynésie.
Deluc s'élance alors dans une course aux clichés désespérante : cocotier, climat tropical, plages au sable blanc, «indigènes» beaux, gentils et serviables, traditions locales, et un peintre au sommet de sa créativité devant tant de sauvagerie et d'authenticité !
Travaillé par un double souci de ressasser les poncifs de l'artiste maudit, tourmenté et incompris, et de disséquer son rapport hédoniste et créatif à la Polynésie et à ses habitants, le réalisateur s'engouffre dans une mise en scène trop académique pour l'esprit tortueux du peintre et trop étriquée pour l'éclat de son ?uvre, laquelle d'ailleurs n'est que rarement questionnée par la caméra. Méconnaissable, Vincent Cassel est également piégé dans cette mécanique du pathos et de l'exotisme à telle enseigne qu'il surjoue le personnage, mise tout sur l'émotif et finit par caricaturer un Gauguin réduit à un portraitiste et naturaliste ordinaire !
Deluc s'attelle, certes, à ne pas verser dans l'hagiographie en mettant en avant le caractère égoïste, machiste et aigri de l'artiste, notamment dans sa relation avec son amante Tehura, une très jeune vahiné qu'il exploitera comme modèle et égérie. Mais le réalisateur utilise ces quelques épisodes intéressants pour interroger la psyché complexe et l'obsession artistique de Gauguin, non pas comme matériaux propices à un regard cinématographique singulier, mais comme simples illustrations du propos principal, en l'occurrence le voyage initiatique de Tahiti.
Enlisé dans un rythme narratif ennuyeux à défaut d'une lenteur artistiquement étudiée, le film ne satisferait ni les mordus du peintre ni les cinéphiles tant il aura privilégié la superficialité et l'académisme.
Sarah H.


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