Algérie - Revue de Presse

Un faux débat et des enjeux privés



Pour les partisans d'un troisième mandat de Bouteflika, la cause est entendue: Bouteflika doit être sollicité à briguer son maintien à la présidence de la République. Il irait de l'intérêt de la nation que cela soit ainsi, car leur héros serait l'homme providentiel irremplaçable qui a déjà beaucoup fait pour le pays et fera encore plus après sa reconduction. Pour les adversaires de cette option, cette perspective constituerait une calamité sans pareille pour l'Algérie et ses espoirs de développement et de démocratie. Les deux camps sont, on le voit, totalement antagonistes sur cette question du troisième mandat. Ils sont pourtant sur une même logique qui veut que le destin de la nation se joue sur la reconduction ou non de Bouteflika à la présidence. C'est cette étroitesse de vue que l'ancien secrétaire général du FLN, Abdelhamid Mehri, a récemment fustigée en reprochant à ses tenants, partisans ou détracteurs de Bouteflika, de priver ainsi le pays d'un véritable débat qui lui aurait permis d'identifier les causes réelles de l'impuissance, des erreurs, du marasme, des déviations et des dépassements subis par lui. Renvoyant dos à dos les panégyristes de Bouteflika et ses détracteurs, Mehri s'est dit convaincu que «la prolongation du mandat du Président, sans changement radical du système de pouvoir, conduit le pays au minimum à une impuissance plus marquée à résoudre ses problèmes et à faire face aux grands défis qui l'attendent à l'intérieur et à l'extérieur. De même que l'intronisation d'un nouveau président, quelles que soient ses qualités, sans changement radical du système, conduira aux mêmes résultats». La suggestion de l'ancien secrétaire général du FLN d'un débat national, portant non sur le départ ou la réélection de Bouteflika mais sur l'évaluation du système de pouvoir établi depuis l'indépendance et la problématique de l'édification d'un nouveau système de gouvernement qui donne à tous les Algériens la possibilité d'apporter leurs contributions à la solution des problèmes, n'a aucune chance d'être entendue. Ni par le pouvoir, dont la préoccupation n'est pas de rompre avec le système incriminé et duquel il procède. Ni par les courtisans thuriféraires de Bouteflika qui voient dans la reconduction de celui-ci, la pérennisation des promotions et autres privilèges acquis durant ses deux précédents mandats, ou la possibilité d'y accéder. Ni par ceux qui, sous couvert de la défense de principes démocratiques menacés par le maintien de Bouteflika à la présidence, mènent en fait un combat contre l'homme uniquement. Le changement radical que Abdelhamid Mehri entrevoit comme unique porte de sortie de la crise algérienne, n'est pas dans la vision de la plupart des protagonistes de la polémique sur le troisième mandat. Pour les supporters de cette solution, il s'agit de maintenir en l'état les choses et les pratiques de gouvernement. Pour ceux qui la combattent, l'objectif se limite à barrer la route de la reconduction à un Président dont les mandatures ont contrarié ou leurs ambitions ou leurs intérêts. Le simple citoyen n'est absolument pas dupe des arguments que les deux camps s'opposent dans leur polémique, car étant parfaitement au fait des véritables motivations qui les animent.


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