Algérie

Un esprit libre


Un esprit libre
Ce n'est pas un biobic, mais largement inspiré de sa vie et sa lutte pour la liberté de conscience et d'action.Jimmy's hall est le nouveau film de Ken Loach présenté à la projection presse hier matin dans le cadre de la compétition officielle au 67e Festival de Cannes, où la pluie et le temps maussade sont revenus. Ecrit par Paul Lavery, ce long métrage raconte un vrai drame historique ayant survenu dans les années 1930 en Irlande. 1932, après un exil de 10 ans aux Etats-Unis, Jimmy Gralton rentre au pays pour aider sa mère à s'occuper de la ferme familiale. L'Irlande qu'il retrouve, une dizaine d'années après la guerre civile, s'est dotée d'un nouveau gouvernement.Tous les espoirs sont permis... Jimmy retrouve ses vieux amis et son ancienne amoureuse, aujourd'hui mariée avec trois enfants. Suite aux sollicitations des jeunes du Comté de Leitrim, Jimmy, malgré sa réticence à provoquer ses vieux ennemis comme l'Eglise ou les propriétaires terriens, décide de rouvrir le «Hall», un foyer ouvert à tous où l'on se retrouve pour étudier, faire du sport, échanger, danser. À nouveau, le succès est immédiat. Mais l'influence grandissante de Jimmy et ses idées progressistes ne sont toujours pas du goût de tout le monde au village. Les tensions refont surface. Il est traité de communiste athée et qualifié d'antéchrist. Malgré ses tentatives de convaincre le prêtre de la région des bienfaits de cet endroit, Jimmy est pourchassé et renvoyé aux USA, sans aucun procès et accusé d'être un clandestin au passeport américain. Le «Hall» est incendié au grand dam des jeunes de cette région. Très beau film romanesque, Ken Loach a réussi à nous emporter dans le souffle tragique de cette histoire, après avoir signé, il y a dix ans, le film Le vent se lève, Palme d'or à Cannes. Lors de la conférence de presse qui a suivi la projection, le réalisateur reconnaîtra d'emblée avoir affirmé qu'il arrêterait de faire du cinéma et ce, en raison des difficultés rencontrées lors du tournage mais après on y arrive. «C'est difficile d'arrêter totalement de faire des films», avouera-t-il. Pour le scénariste Paul Laverty, «dans chaque ville dans le monde on peut trouver un Jimmy Gralton. Ce film rend hommage à tous ces gens qui ont insufflé vie et courage à leur région». et Ken Loach d'ajouter: «Le vent se lève explore une époque très complexe de l'Irlande.Dans ce film, on a tenté d'explorer la période d'espoir avec le nouveau gouvernement. A cette époque, on avait espoir dans une certaine ouverture. Il se trouve que cet homme, Jimmy, a vécu à cette époque. C'était important de voir ce qu'a suscité l'indépendance 10 ans plus tard, mais l'ancien empire a continué de diriger le pays et les espoirs se sont dissipés. L'idée était d'examiner les choses dans un microcosme. Mais les deux films ont un lien en effet.»Film qui fait écho aux post-révolutions arabes, Jimmy's hall explore en quoi la politique et la religion permettent de changer la face d'une société. «Nous voulions que le prêtre voit en Jimmy un croyant qui possède la foi en Dieu aussi, malgré qu'il soit un opposant. C'est pourquoi il va écouter du jazz pour comprendre..»Personnage complexe ce prêtre, il est important de souligner la grande domination du pouvoir ecclésiastique dans l'Europe avant l'avènement de la séparation du religieux du politique. Pour Ken Loach «les voix dissidentes se doivent d'être entendues, c'est très important surtout dans les temps actuels».Pour Barry Ward, le comédien principal qui a admirablement interprété le rôle de cet homme déterminé et engagé, «les gens à l'époque étaient, certes pauvres mais avaient beaucoup de choses à dire.. Il faut dépasser les clivages et arriver à une certaine unité..» Pour Ken Loach, si Jimmy Gratlon avait existé aujourd'hui il se serait soulevé contre le néolibéralisme et les sociétés multinationales en défendant les valeurs de la démocratie». Il est terrible de constater combien ces jeunes gens dans ce film ont soif de joie de vivre et de liberté. Leur seule source de distraction reste la danse ce que l'église voit d'un mauvais oeil.Le film montre combien les idées étaient archaïques jadis et les mentalités pleines de mauvais sentiments et de haine à l'égard d'autrui qui ne nous ressemble pas.Film unificateur, appelant à la tolérance et à l'amour du prochain, ken Loach renouvèle un peu sa thématique sans trop épuiser sa source cinématographique inépuisable tant son travail de mise en scène et du jeu d'acteur est remarquable et mérite bien un prix. Un film semi-historique présenté dans une veine plutôt plus classique cinématographiquement parlant, loin de la grandiloquence «esthétique» d'un Adieu au langage de Jean-Luc Godard, bien que comparer l'un à l'autre est un sacrilège.Mais enfin le film de Godard est sacrément un ovni au niveau de cette programmation tant son film ne ressemble à aucun autre. Il est néanmoins comme ces films noirs et pessimistes parfois qui brossent un tableau austère des temps modernes. Ce qui ressort de cette programmation sèche de cette année. Des films qui font un certain constat d'un échec presque programmé du monde aujourd'hui. Jean-Luc ne s'est peut-être pas trompé en affirmant dans son film que «Hitler n'a rien inventé» en parlant de dictature et de cruauté humaine. S'il se veut bourré de références intellectuelles et philosophiques y compris en triturant dans son propre tiroir filmique, le long métrage expérimental de Godard est rehaussé d'un travail esthétique à l'overdose, mettant à rude éprouve nos yeux déjà attachés à regarder à travers des lunettes à trois D.Les lettres qui accompagnent chaque tableau de son film racontent par une profusion de couleurs la déchéance humaine et l'absence de communicabilité des êtres entre eux à telle enseigne qu'ils auront besoin un jour d'un traducteur pour se comprendre. Ce sentiment de malaise obstiné est souligné en filigrane par ces couleurs flashy de neige, chien et autres portraits de la nature dont l'effet visuel vient déranger la rétine. Il est d'autant plus accentué par ce «je t'aime, moi non plus» entre cette femme mariée incessamment nue et cet homme libre dont l'histoire d'amour semble battre de l'aile. Comme un ultime cri ou testament à l'envers pour «dire non et mourir...» Un cri de révolte et au changement, tant qu'il est encore temps.


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