Algérie

Un diagnostic juste, un remède insuffisant



La confection de listes électorales est la grande affaire de l'heure des états-majors partisans et des instances locales de leurs formations. L'opération est délicate pour tous, car susceptible d'engendrer des contestations qui peuvent devenir des dissidences préjudiciables qui impacteront négativement leurs scores électoraux.La rue bruit de rumeurs incontrôlables faisant état d'une bourse informelle où se négocient les coûts des candidatures. Ces rumeurs ne sont pas étrangères à l'idée lancée la semaine dernière par le ministre de l'Intérieur qu'il va être possible de réviser fortement à la baisse les salaires des députés ainsi que les indemnités y afférant. L'objectif avec cette révision serait, selon M. Dahou Ould Kablia, de combattre l'absentéisme des parlementaires et de diminuer l'empressement de beaucoup de personnes qui veulent absolument figurer sur les listes de candidatures par motivation strictement mercantile.
Que l'on nous permette de douter du succès d'une telle mesure si elle vient à être adoptée. D'abord parce que, même révisés à la baisse, les émoluments de nos parlementaires resteront encore attractifs, comparés aux salaires distribués dans les autres compartiments de l'activité nationale. Ensuite et surtout parce que les candidats à devenir parlementaires sont de plus en plus des personnes fortunées pour qui leur salaire de député est chose subsidiaire. Pour preuve, ils mettent sur la table (plus exactement en dessous) des sommes colossales pour être portés sur les listes électorales à un rang qui rend possible leur élection.
Ce qui fait grouiller ces «candidats», ce sont les avantages autres que salariaux et sont d'un rapport éminemment lucratif. Etre député, c'est avoir les opportunités de voir s'ouvrir devant soi les portes des cercles du pouvoir où les décisions de toutes natures sont prises. En somme, la possibilité de faire fructifier à l'exponentiel les affaires qui font leur richesse.
Des affaires qui, pour beaucoup d'entre elles, ne sont pas d'une blancheur limpide et ceux qui en sont à la tête susceptibles d'en rendre compte un jour ou l'autre à la justice du pays. Etre député et bénéficier de l'immunité parlementaire protégerait jusqu'à un certain point les personnages entrant dans cette catégorie, d'autant que leur statut parlementaire leur permettra de se tisser un réseau de connaissances et «d'amis» dans les sphères décisionnelles qu'ils pourront actionner quand le besoin se fera sentir pour eux. Des motivations qui, on le voit, sont autrement plus incitatives du point de vue de leurs intérêts.
La bataille des candidatures dans ce qu'elle a de féroce n'oppose pas les militants lambda des formations partisanes, mais cette faune d'enrichis qui ambitionnent de «s'engager dans la politique» pour assurer leurs arrières et pour les ambitieux encore d'accéder au pouvoir pour participer à la redistribution de la rente.
Que le ministre de l'Intérieur ait posé la question de «l'étrange» engouement qu'il y a à figurer sur les listes de candidatures pour la députation, cela tend à prouver que le mouvement a pris des proportions qui inquiètent le sommet de l'Etat, pourtant peu regardant sur la morale en politique ou sur celle qui doit présider au choix des élus dans les institutions de la République. Sa proposition de révision à la baisse du salaire et des indemnités qui vont avec ne résoudra nullement le problème.


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