Un coup d'épée dans l'eau '

Personne ne peut s'offusquer, au nom de la protection de l'écosystème, de voir le pays s'engager dans cette vaste opération de reboisement qui vise à planter 43 millions d'arbres à travers le territoire national. Soit une ambitieuse visée d'un arbre pour chaque citoyen. Mais on serait en droit de se demander pourquoi tant d'efforts si au bout le feu allait ravager des milliers d'hectares de forêts '! Les incendies de forêts, qui carbonisent chaque saison estivale ces arbres qu'on s'est attelé à planter durant les années précédentes, devraient imposer un temps de réflexion, une pause de mémoire, pour synthétiser les bilans terrifiants des surfaces de forêts détruites par le feu, étudier les causes de la catastrophe avant de se lancer dans toute opération de reboisement de cette ampleur, qui n'est pas gratuite, et qui, le malheur des uns faisant le bonheur des autres, ne peut profiter qu'aux pépinières en matière de rentabilité. Sachant que rien ne peut résister au feu dévastateur, la cadence de ce couple infernal «reboisement-carbonisation des forêts» pourrait-elle vraiment tenir la route ' Près de 2 millions d'arbustes tous types confondus ont été déjà plantés sur une surface de 2000 hectares depuis le lancement du programme national de reboisement (PNR) qui s'allonge du mois octobre 2019 au mois de mars 2020, soit près de 39% de la surface de forêts carbonisés du 1er juin au 2 août. Il reste, donc, à reboiser 60% de la superficie ravagée par les incendies durant cette période en question pour tout juste couvrir les dégâts enregistrés durant la dernière saison. On n'aurait encore rien fait de nouveau avant de reboiser les 2.553 hectares de forêts calcinés durant la période en question. Et, à savoir si le feu ne va pas encore tout détruire au prochain été. Un cercle diabolique.Fort heureusement, cette année on semble avoir pensé aux problèmes matériels et humains qui handicapent les actions des sapeurs-pompiers lors de leur intervention sur le terrain. On apprend dans ce contexte la réception, la semaine dernière, de cinquante-trois véhicules légers produits par la société algérienne de fabrication de véhicules Mercedes Benz, relevant du ministère de la Défense, et la réception au mois d'avril prochain d'un autre quota supplémentaire de 80 véhicules légers destinés à l'extinction urgente des feux avant d'acquérir 115 véhicules de lutte contre les incendies. Aussi, un concours de recrutement (1.200 postes) a été organisé le 28 décembre dernier dans deux spécialités en rapport avec le domaine des forêts, et ce en collaboration avec les universités de Médéa, Jijel et Batna. Bien qu'il faille aller plus loin encore et associer les populations riveraines dans le cadre de ces recrutements, songer également à l'ouverture des pistes dans les forêts pour faciliter l'accès aux engins mécaniques, cela réconforte un peu face aux craintes qui laissent croire que le reboisement n'est qu'un coup d'épée dans l'eau.