Stefan Füle, commissaire à l'Elargissement et la poli-tique européenne de
voisinage, est attendu aujourd'hui à Alger pour une visite de deux jours. Ce
sera notamment l'occasion de discussions préliminaires à la réunion du Conseil
d'association Algérie-Union européenne prévue le 15 juin prochain à Luxembourg.
Durant ce rendez-vous, les deux parties évoqueront, notamment, la mise en Å“uvre
de la clause de rendez-vous qui permet la révision de certaines dispositions de
l'accord d'association Algérie-UE. Pour les experts, il s'agit de renégocier
certaines clauses de cet Accord d'association conclu en septembre 2005 avec
l'Union européenne (UE) qui, faut-il le rappeler, a été négocié pendant sept
ans. Avec le recul, cinq ans après sa signature, le constat côté algérien est
unanime: l'Algérie est perdante dans cette affaire. Pourquoi ? Là, les
explications sont multiples. Selon les uns, l'Algérie n'était pas prête au plan
économique. Selon les autres, la négociation s'est déroulée dans une
conjoncture politique défavorable.
L'agriculture, un atout
Sans jeter la pierre aux uns ou
aux autres, des économistes exposent des données réalistes pour expliquer cette
situation. Pour eux, l'entreprise algérienne n'est pas au niveau des normes
internationales ce qui ne lui permet pas, en général, de pénétrer le marché européen.
Quant à la baisse des barrières tarifaires ou non tarifaires, elle profite
logiquement aux entreprises européennes plus compétitives. Ainsi, l'ouverture
du commerce aux Européens a des conséquences quasi automatiques dont notamment
le déficit commercial. L'économiste Salah Mouhoubi soutenait, récemment, dans
les colonnes d'un confrère qu'il faut renégocier l'accord d‘Association sur des
«bases mutuellement avantageuses». Autrement dit, il faudrait obtenir un accord
du type gagnant-gagnant. Pour cet économiste le nouvel accord doit «permettre
une mise à niveau de l'économie nationale et surtout penser comment placer le
produit agricole algérien sur le marché européen ».
Au plan agricole, cela ne paraît
pas impossible. L'Algérie vient de réaliser, «pour la première fois depuis
1967, les premières exportations d'orge à destination de la France », après une
absence de 43 ans sur le marché international. Cela n'est pas que symbolique
puisque selon le directeur de l'Office algérien interprofessionnel des céréales
(OAIC), M. Noureddine Kahal, «l'Algérie dispose actuellement d'un excédent de
deux années en orge, sans compter la production de la campagne 2009-2010''.
Evidemment, l'offre algérienne de produits agricoles devra être constante,
diversifiée et de qualité, pour que l'Europe lui ouvre ses frontières. Au plan
des entreprises, l'Union européenne peut contribuer à leur mise à niveau, dès
lors que l'Algérie s'engage réellement dans une économie productive, notent
plusieurs experts algériens.
Un accord asymétrique
Pour le moment, on estime que
l'Algérie a eu un manque à gagner de plus de 2 milliards de dollars, depuis son
engagement avec l'UE, il y a cinq ans. On relève que pour un dollar exporté
vers l'UE, l'Algérie importe pour vingt dollars. Une donnée extrêmement
parlante. Récemment au forum de Crans Montana, le ministre des Finances Karim
Djoudi soulignait que cet accord avec l'UE se traduit par un déséquilibre qu'il
décrivait ainsi: «C'est moins de ressources fiscales, peu d'investissements,
peu d'exportations hors hydrocarbures et une économie qui pourrait privilégier
l'acte de commercer à celui de produire ». Côté algérien, on n'est ni
optimiste, ni pessimiste sur l'avenir des relations Algérie-UE. On se prépare à
engager cette révision de l'accord qui d'ailleurs était explicitement prévue
dans la clause dite «de rendez-vous » du document signé en septembre 2005. Il
faut signaler que Madame Laura Baeza, ambassadeur et chef de la délégation de
l'UE à Alger, indiquait à la presse, en début d'année, que pour elle, cet
accord économique et commercial est « un accord asymétrique au détriment de
l'UE » ! Tout en faisant remarquer que « les produits industriels algériens ont
été admis en Europe dès le début de l'entrée en vigueur de l'Accord, sans droits
de douane », elle soulignait que «les produits européens faisaient l'objet d'un
démantèlement tarifaire progressif pour entrer en Algérie et que ce
démantèlement s'étalera jusqu'en 2017 ». Autant dire que la révision, notamment
de la liste des produits commercialisables, fera l'objet de rudes négociations.
L'UE exprimait aussi sa disponibilité à engager des négociations
complémentaires avec l'Algérie, «comme cela s'est fait avec la plupart de ses
voisins sur l'agriculture ». Mais là aussi, on s'attend à ce l'Europe mette en
avant une série de critères auxquels devront être soumis les produits
algériens. On ne sait pas pour le moment si la révision voulue par Alger
touchera d'autres aspects que le commerce et l'économique. L'Accord
d'association comporte en effet plusieurs volets: politiques économiques,
commerciales, industrielles - services, douanes, transport, énergie,
environnement, agriculture, pêche-et sociales-affaires sociales, société de
l'information, recherche, innovation, audiovisuel, culture, et éducation. On en
saura, peut-être, davantage au terme de cette visite à Alger de Stefan Füle,
commissaire à l'Elargissement et la politique européenne de voisinage.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 06/06/2010
Posté par : sofiane
Ecrit par : Oualid Ammar
Source : www.lequotidien-oran.com