En économie, il
faut faire des choix. Celui auquel est contrainte l'Algérie est unique.
Un nouveau seuil
symbolique va être franchi cette année en Algérie. Si la tendance enregistrée
depuis le début de l'année se maintient, les importations algériennes de
marchandises devraient atteindre cette année le seuil de 50 milliards de
dollars, confirmant une hausse qui semble impossible à contenir.
Pour l'heure, les
statistiques fournies par l'administration des douanes indiquent que les
importations ont atteint 31.17 milliards de dollars pour les huit premiers
mois, soit un peu moins de quatre milliards par mois. Cette moyenne est
traditionnellement plus élevée en fin d'année, car certaines mesures destinées
à faciliter les importations voient leurs effets se démultiplier en fin
d'année, quand les réseaux d'importation auront bien assimilé la procédure. Ce
qui devrait déboucher sur une nouvelle hausse pour les quatre derniers mois de
l'année.
En 2010, les
importations avaient atteint 50 milliards de dollars, mais ce chiffre incluait
alors les biens et services. Cette année, il ne s'agit que de marchandises.
Quand il faudra inclure les services, avec notamment les bénéfices
d'entreprises étrangères et tous les transferts liés à la santé, aux frais
financiers et à différentes prestations fournies par des partenaires étrangers,
il est probable que le total des devises exportées dépassera les 60 milliards,
selon un ancien banquier.
Dans le même
temps, les exportations ont rapporté au pays 47 milliards de dollars, soit une
moyenne de six milliards de dollars par mois. A ce rythme, et malgré un prix
élevé des hydrocarbures, l'Algérie dégagera un excédent en devises d'à peine
dix milliards de dollars durant l'année 2011.
Cette tendance
confirme plusieurs particularités de l'économie algérienne. Les importations
augmentent de dix milliards de dollars en moyenne par an, sans que le
gouvernement ne puisse trouver les leviers pour en maitriser
l'évolution. Elles sont, en outre, sur le point de rattraper les importations.
Avec comme résultat immédiat, une stagnation du volume de réserves de changes
qui, bien que frôlant le chiffre appréciable de 180 milliards de dollars,
n'augmente plus au même rythme que lors des premières années après le boom des
prix des hydrocarbures.
D'autre part, ces
chiffres soulèvent quatre problèmes majeurs pour l'économie algérienne. Le
premier est relatif à la non maitrise du pays sur ces
chiffres. Recettes et dépenses dépendent exclusivement de paramètres sur
lesquels l'Algérie n'a pas de prise. Le prix des hydrocarbures sont fixés selon des règles hors de contrôle du pays, alors
que le gouvernement s'est progressivement dessaisi des leviers avec lesquels il
pourrait influer sur les importations. Le gouvernement a d'ailleurs montré que
même quand il veut maitriser un paramètre, il ne sait
pas le faire. Ainsi a-t-il totalement échoué à maitriser
les importations de véhicules, malgré les taxes et les contraintes imposées.
Le second
problème concerne l'explosion de la facture des produits alimentaires, qui met
à nu le discours creux du gouvernement concernant le développement de
l'agroalimentaire. La facture des produits alimentaires a presque doublé en
2011 par rapport à 2010, sous l'effet conjugué de la hausse des prix sur le
marché international, et de l'amélioration des revenus. Certains importateurs
se frottent les mains : la facture des importations des sucres et sucreries a
été multiplié par quatre !
Le troisième
point est relatif au manque d'impact des importations sur la production. Malgré
les formidables facilités décidées par le gouvernement, les investissements
dans la production ne connaissent pas le bon souhaité. Il n'ya
pas de progression significative d'une production locale capable de se substituer
aux importations de biens de consommation. Aucun secteur ne semble en mesure de
renverser la tendance. Bien au contraire. Les données actuelles prouvent plutôt
que plus on importe, plus a on a besoin d'importer : plus on importe de
voitures, plus on importe de pièces détachées et de services liés au secteur,
par exemple.
Il faudrait
peut-être qu'un premier pas symbolique soit franchi pour inverser la tendance.
Le lancement d'une usine de montage, qui produirait 200.000 véhicules par an ou plus, pourrait par exemple changer la donne dans
l'industrie automobile. Cela permettrait de forcer le gouvernement à prendre
des mesures protectionnistes plutôt que d'encourager la consommation, et, dans
un deuxième temps, favoriserait progressivement l'émergence vers une production
locale des composantes nécessaires, pour arriver à terme à un taux
d'intégration raisonnable.
Mais sur ce
terrain, l'Algérie a tout raté, pour une raison simple : elle ne peut pas tout
avoir. Car un pays doit choisir : soit il a Abdelhamid
Temmar, soit il a des usines. Il ne peut pas avoir
les deux. Et l'Algérie a fait ses choix.
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Posté Le : 29/09/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Abed Charef
Source : www.lequotidien-oran.com