Algérie

Un certain regard



Un certain regard
«Le cinéma, c'est un oeil ouvert sur le Monde.» Joseph Bédier
Au moment où la presse, tous supports confondus, relate les mille et une petites anecdotes qui illustrent les multiples facettes du Festival du cinéma à Cannes, il est utile de se demander où en sont les projets dans ce domaine, de notre cher pays qui s'apprête discrètement à célébrer le cinquantième anniversaire de son indépendance politique. On peut, d'ores et déjà, admirer les nombreux palmiers convoqués avenue de l'ALN pour préfigurer ce que sera notre Croisette. Notre chère patrie qui est mal classée dans tous les secteurs, économique ou culturel, vient de se distinguer par l'acquisition d'un pavillon au village international du Festival... après les Emirats, le Qatar et le Maroc.
L'Algérie a confié la lourde tâche de représenter l'aridité de la production cinématographique à l'Agence algérienne pour le rayonnement culturel qui, comme chacun le sait, a plusieurs cordes à son arc. Quelques films produits par des réalisateurs algériens et grâce à de laborieux montages financiers, ambitionnement de se faire une petite place parmi les nombreuses productions de Paris et d'Hollywood. L'Andalou de Mohamed Chouikh et Le Repenti de Merzak Allouache défendront les couleurs algériennes aux côtés de Parfums d'Alger de Rachid Benhadj. Mais c'est surtout la présentation de Zabana de Saïd Ould-Khelifa qui retient l'attention en cette veille de célébration. Le premier guillotiné de la lutte de Libération est le deuxième à faire l'objet d'un film après Benboulaïd. Krim Belkacem et tant d'autres attendront probablement la réconciliation des responsables algériens avec leur histoire pour faire l'objet d'un film. Cependant, il est regrettable que la politique de production dans notre pays soit assujettie aux événements culturels qui ne sont que des alibis politiques pour valoriser un tel ou une telle aux postes de commande. On dira de lui (ou d'elle) il (ou elle) a fait ceci ou cela, la production de films de fiction ou de documentaires, comme un accès de fièvre saisit le corps assoupi de la lourde machine bureaucratique. On débloque tout, on lève les freins, on lâche les bandes et tout démarre. Le Cinquantième anniversaire ne mérite-t-il pas plus d'attention budgétaire que les fameuses manifestations: «L'année de l'Algérie en...» ou bien Tataouine-les bains, capitale...». L'argent existe pourtant pour soutenir ces dizaines d'équipes de tournage qui vont chaque matin prendre leur envol et essayer d'imprimer quelque chose sur la bande magnétique (adieu le film!). On peut imaginer la somme de travail enthousiasmant avant le «coupez! Roulez» de la fin de la journée qui libèrera réalisateurs, directeurs de la photo, opérateurs, ingénieurs du son, électriciens éclairagistes, accessoiristes, maquil-leuses, décorateurs, machinistes..., une infinité de métiers petits et grands qui font du cinéma un métier d'équipe. Mais pour que cette équipe tourne harmonieusement, il y a indubitablement son chef, son phare, son timonier, son capitaine, son général, sans qui rien ne se ferait. Le réalisateur! Comment définir le réalisateur' Il échappe à toute définition, il y en a de tous les caractères. Il y en a qui sortent des grandes écoles ad hoc et qui font leur petit bonhomme de chemin dans les sentiers tortueux de la production.
Il y en a qui atterrissent là par le plus pur des hasards, font un film qui a plu et continuent à en faire, tellement l'ambiance du travail qui n'est jamais la même leur plaît. Il y en a qui sont passés par le cirque, les planches du théâtre et ont osé franchir le pas. Il y en a qui ont été comédiens de théâtre, de radio. J'en connais même qui ont été chanteurs. Ne parlons pas de ceux qui ont, des années durant, hanté les salles obscures ingurgitant des films et assimilant, consciemment ou inconsciemment les techniques de narration cinématographique et la technique tout simplement. Il y en a qui sont arrivés là par piston, parce qu'ils ont eu un frère, un beau-frère ou un tonton qui a occupé, un moment, un poste important qui leur a permis de s'insérer dans le circuit. Il y en a qui ont commencé à gravir les échelons normalement: ils ont commencé par acheter des sandwichs au réalisateur et à l'équipe, sont devenus assistants-réalisateurs puis réalisateurs. Il y en a qui sont passés de la plume à la caméra: journalistes ou écrivains ont essayé de toucher la grande masse «d'ilotes» au moment où le livre est dédaigné au profit de l'écran, grand ou petit. Mais tous ont une chose en commun: le désir de raconter une histoire. Et tous doivent jouer le rôle de la locomotive de l'équipe, lourde ou légère, qui fera le film. Donner une chance au cinéma, c'est peut-être éviter à certains réalisateurs de rêver de devenir sénateurs. Ah! rente, quand tu nous tiens!




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