Algérie

Un argumentaire pour le changement



Publié le 19.09.2024 dans le Quotidien l’Expression
Sous la pression des besoins internes- économiques, sociaux, sanitaires et hydriques, qui augmente, conjuguée avec la baisse des ressources, et les menaces extérieures à nos frontières, une réforme du système national de gouvernance s'avère indispensable pour rassembler l'ensemble des forces vives de la nation en vue de faire face à ces défis, sous peine de voir le pays divisé à la merci de forces étrangères et de leurs relais locaux. En Algérie, les aspirations actuelles de la société incitent à changer pacifiquement le système de gouvernance pour éviter d'entrer dans une phase d'instabilité. Ne pas anticiper les évènements et ne pas agir pour évaluer et réviser le fonctionnement des institutions, serait préjudiciable à l'intérêt national.
Si ce système n'a évolué que lentement jusqu'à présent, c'est parce qu'il disposait de tous les moyens sécuritaires, judiciaires et financiers qui lui permettaient tout de même de fonctionner. Cependant, un tel statu quo devient intenable à la longue sans l'adhésion de la population. C'est le constat fait par la majorité des pays dans le monde qui ont construit progressivement une gouvernance associant les formations politiques et sociales les plus représentatives.
En Algérie, on est persuadé de la nécessité de faire évoluer le système dans l'intérêt national, mais sans toutefois lui accorder une priorité, considérant qu'il n'y a pas d'urgence en la matière.
Le mouvement citoyen du 22 février 2019 largement suivi par la population dans le pays et bénéficiant de la sympathie de l'opinion dans le monde- qui réclame un changement du système de gouvernance avec l'instauration d'un État de droit démocratique et social- est venu ébranler les croyances que le pays est immunisé à vie contre ses ennemis de l'intérieur comme de l'extérieur.
C'est une évidence que le changement pacifique devient une nécessité pour éviter au pays les risques de confrontations fratricides et d'interventions étrangères hostiles. Ceci est réalisable pour peu qu'on arrive à construire un consensus avec les représentants des formations politiques et de la société civile, porteurs des aspirations de la population. Le but est l'adoption d'une plate-forme consensuelle fixant des objectifs et un calendrier d'exécution pour transformer le système de gouvernance sur la base du droit et des principes universels de la démocratie. Le rejet de toute initiative politique pour rassembler le pays, est contreproductif du fait qu'on ne peut pas gouverner indéfiniment en ignorant l'aspiration du peuple à vouloir le changement et à y participer. Sachant par ailleurs que l'immobilisme dans ce domaine face à une société en mouvement, constituerait un prétexte à des manifestations de mécontentement et à des ingérences extérieures.
Le message délivré par le président de la République dans sa prestation de serment, «d'oeuvrer à renforcer la voie démocratique et de préserver l'unité du peuple et de la nation», conforte cette démarche en déclarant dans son discours d'investiture: «Nous entamerons des contacts et des discussions avec toutes les forces vives de la nation, politiques et économiques pour un dialogue ouvert afin d'asseoir la démocratie véritable.»
Pour toutes ces raisons, l'Algérie gagnerait à oeuvrer, dès à présent en dehors de toute pression, à créer les conditions d'un dialogue qui réponde aux aspirations de la population. En somme, il s'agira de conduire un processus continu qui fixe l'objectif d'un changement progressif du système de gouvernance et qui définit les réformes pour y parvenir avec un calendrier et un contrôle d'exécution.
Les parties prenantes d'un tel processus réussiront dans cette démarche si elles s'engagent à respecter un code éthique qui place l'intérêt national au-dessus de toute autre considération. Cela étant admis, les thèmes à traiter porteraient sur le contenu et le calendrier des réformes du système de gouvernance. L'objectif serait affiché d'avance, à savoir le changement de la gouvernance conforme à l'État de droit et à la démocratie, dans un processus progressif de réformes, politiques, économiques, sociales, environnementales et culturelles. Les expériences internationales dans ce domaine ont abouti à renforcer l'État et ses institutions. J'ai personnellement testé la faisabilité de cette démarche avec une méthodologie onusienne, inclusive et sans préalable, qui a fait ses preuves dans le monde. Ce sont les pouvoirs en place qui initient le processus et en gardent le contrôle jusqu'à son aboutissement à la satisfaction générale. Au terme de ce processus, le peuple algérien aura toutes les raisons de faire confiance aux institutions et de s'engager résolument avec l'État pour dissuader toute menace potentielle sur la sécurité intérieure et la souveraineté nationale.
* Expert international
Mohand Amokrane Cherifi



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