Rien n'a vraiment
changé dans le secteur de l'énergie et des mines depuis une année que Chakib Khelil l'a quitté. Ce
constat, pour le moins sévère, tiré par des acteurs du secteur a une
explication. Youcef Yousfi,
le ministre de retour n'est pas libre d'agir. Un dossier sur lequel cependant
tout le monde attend de lui qu'il modifie sa feuille de route, le cadre légal
de l'activité extractive. La panne ne peut plus durer sur l'amont pétro-gazier algérien.
La loi sur les
hydrocarbures d'avril 2005, révisée en septembre 2006, décriée par les
compagnies étrangères et des experts nationaux de renom constitue toujours le
cadre juridique de l'investissement étranger dans la branche. Le retour, il y a
bientôt un an, fin mai 2010, de Youcef Yousfi à la tête du secteur de l'énergie et des mines, avait
laissé penser que les choses bougeraient sur ce front sensible de la
compétitivité de l'amont algérien. Il n'est pas question de réviser la loi, a
tranché le ministre en juillet 2010, devant la presse, en marge du lancement du
troisième round en matière d'exploration. «Le ministre de l'Energie a des
lignes rouges que le président de la République lui a tracées lorsqu'il a dû le
nommer pour remplacer son ami Chakib Khelil. En gros, Yousfi doit
continuer la politique de Khelil. Il semble que sa
marge de manÅ“uvre est très réduite et son bilan depuis une année le montre
assez bien » affirme un ancien dirigeant de Sonatrach.
La dernière ouverture des plis de mars dernier a enregistré l'absence de la
quasi-totalité des compagnies étrangères présentes en Algérie. Deux permis sur
dix ont été attribués. Ce cuisant échec aurait été plus prononcé si Sonatrach, la compagnie pétrolière nationale n'était pas
entrée dans la course et n'avait remporté l'une des deux licences cédées par Alnaft. La position du ministre sur le cadre légal n'a pas
pourtant évolué. L'enjeu est essentiel, si personne ne vient prospecter le
domaine minier algérien, le renouvellement des réserves, en chute libre depuis 05
ans, débouchera sur une déplétion plus précoce que prévu. L'autonomie de
décision du ministre Youcef Yousfi
paraît, pour de nombreux observateurs du secteur, obérée dans le cas du
management de Sonatrach. Le ministre continue de
cohabiter avec un PDG, Nordine Cherouati
qu'il a trouvé en place. « Les grandes options de l'avenir énergétique
notamment la place du nucléaire civil dans un mix
énergétique demeurent celles arrêtées du temps de Chakib
Khelil» précise le pétrolier à la retraite. Sur aucun
des dossiers majeurs du secteur la touche de Youcef Yousfi n'a encore réellement déteint. Les partenaires de Sonatrach et les investisseurs étrangers espèrent toujours
que l'amendement du cadre légal dans le sens d'un retour au partage de
production et à sa fiscalité plus clémente, sera l'acte d'émancipation du
ministre de retour depuis un an.
Le retour au cadre
de la 86-14 en suspens
Les compagnies
étrangères préfèrent la loi 86-14. «Elle leur offre plus de visibilité», soutient
un représentant d'une compagnie étrangère. Plus explicite, Mourad Preure, expert international, observe que les compagnies
étrangères sont habituées au contrat de partage de production(PSC)
et au contrat de service, une pratique courante notamment au Moyen-Orient. Or, la
nouvelle loi sur les hydrocarbures instaure un régime de concessions avec un
dispositif fiscal plus compliqué. Elle a pour inconvénients, ajoute-t-il, d'obliger
Sonatrach à investir dans le projet d'exploration ou
de développement en partenariat en proportion de sa part dans la joint venture.
Dans la loi 86 -14 , Sonatrach
pouvait ne mettre aucun sou dans le projet et bénéficier des 51% à
l'exploitation du gisement. Dans ce régime, Sonatrach
détenait seule la licence. Avec la nouvelle loi, la compagnie pétrolière
nationale et les groupes étrangers partagent le permis.
En fin de compte , en dépit de ces résultats fort modestes et des
inconvénients de cette loi qui était censée dans sa mouture initiale accorder
plus de droits aux compagnies étrangères, notamment américaines, la révision du
texte est gelée. La part des compagnies étrangères dans le projet pouvait
atteindre 70%. Une disposition qui a provoqué une levée de boucliers chez les
cadres de Sonatrach, dans une large partie de la
classe politique et au sein même du gouvernement. Les amendements de 2006 ont
fort heureusement rétabli Sonatrach comme acteur
dominant dans le domaine minier national avec le maintien de sa part
majoritaire, au minimum à 51% . Les compagnies
étrangères ont perdu l'avantage concessionnel de la loi Khelil,
mais ont continué à subir sa fiscalité pénalisante. D'où leur boycott à peine
voilé des appels d'offres de Alnaft. Mais toutes ces
péripéties n'ont pas fait bouger d'un iota la position du ministre de l'Energie
et des Mines. «Il est clair que le ministre de l'Energie a reçu des
instructions de la
Présidence pour ne pas réviser cette loi, pour ne pas changer
la politique de Khelil», confirme une autre source au
ministère de l'Energie et des Mines. Youcef Yousfi est sur un plan personnel favorable à la formule de
partage de production. Il en était est un des principaux concepteurs en 1985.
Panne de Sonatrach à l'international
Le bilan de la
première année de Youcef Yousfi
en l'absence de réforme sur le plan du cadre juridique demeure très mitigé. Face
à des enjeux importants, le premier responsable du secteur souffre de la
comparaison sur le front de la communication par rapport à son prédécesseur. La
communication interne et externe a certes était rétablie, notamment, pour
amortir les effets du scandale Sonatrach. Mais pour
le reste, le ministre s'est prononcé rarement sur les grands dossiers alors que
l'actualité ne manquait pas d'occasions pour le faire notamment au sujet de
l'option du nucléaire civil, du développement des gaz schistes ou de la
pétrochimie. Là, les choix ont été opérés sans une large consultation des
spécialistes. «Les chantiers ont été lancés par Khelil.
Youcef Yousfi ne fait que
suivre une feuille de route tracée par son prédécesseur et entérinée par la Présidence» conclut la
source au ministère. La modernisation de Sonatrach
est restée également un chantier lointain du point de vue de la tutelle. Or, la
compagnie pétrolière nationale fait face à des enjeux de positionnement sur la
scène énergétique internationale, face à la concurrence de compagnies de pays
comme le Qatar, la Russie,
a besoin particulièrement d'une dynamique à l'international. Le retrait de la Lybie,
perte de ressources humaines de haut niveau, Sonatrach
est en panne sèche dans sa stratégie à l'international. Un autre thème sur
lequel la communication ministérielle fait défaut. Lignes rouges.
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Posté Le : 17/05/2011
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salim Dali
Source : www.lequotidien-oran.com