Algérie

Un amour du rétroviseur



Un amour du rétroviseur
Le passé est adulé en Algérie mais pas l'histoire. Le débat politique, malsain comme chaque été et à la veille de la présidentielle, se caractérise par la recherche éventuelle d'un remplaçant à l'actuel locataire du palais d'El Mouradia. Cette recherche ne se focalise pas sur de jeunes femmes ou hommes politiques aptes à diriger le pays et le mettre sur la voie de la modernité et avec une vision du siècle. Oh que nenni ! Les Algériens recherchent dans le passé un homme de préférence qui a toutes les qualités du père. Un homme qui a fait partie longtemps de ce régime que les uns et les autres disent finissant.
Cette recherche dans le passé, personne ne cherche réellement à l'expliquer. Mais les uns et les autres pensent trouver un avenir serein en regardant dans le rétroviseur. MM. Benbitour, Hamrouche, Benflis, Ouyahia, Belhadj ou Belkhadem, malgré leurs parcours et leurs différentes responsabilités, sont cités comme de futurs chefs. Quelques-uns sont même souhaités ardemment par une partie de l'opinion publique. Une nouvelle option est souhaitée par quelques-uns : Liamine Zeroual.
Cette recherche dans le passé d'un homme providentiel s'apparente pour certains à la recherche du père. Un père bienveillant à l'image de Mohamed Boudiaf qui a payé de sa vie notre envie d'être protégés contre les méchants. Un grand frère comme Abdelaziz Bouteflika qui nous rappellera les années «fastueuses et heureuses» sous Houari Boumediène. Ou encore d'autres qui recréeraient sur terre l'émirat et le khalifat. Cette attitude des commentateurs et des politiques devrait faire l'objet d'études approfondies de la part de sociologues et de psychologues. Des études qui nous expliqueraient pourquoi les Algériens n'arrivent pas à se projeter dans le futur. Pourquoi ont-ils peur de l'inconnu et même du connu ' Les programmes, les idées et les parcours des nouveaux hommes politiques ne semblent pas les intéresser.
La politique rebute tout comme elle attire. Tout le monde peut avoir un avis comme pour le football. Tout le monde sait et tout le monde s'y connait. C'est là le principe même de la démocratie. Mais quand l'offre politique pousse les électeurs à rechercher dans le passé un homme providentiel pour diriger d'une main de fer le pays, ce n'est plus de la démocratie. Ce n'est plus de la politique. Les programmes, les bilans et les qualités des femmes et des hommes politiques n'intéressent plus grand monde. Il s'agit de rechercher la personne qui possède une seule qualité : rassurer le plus grand nombre. L'Algérie semble donc être dans une perpétuelle crise à en croire nos analystes politico-médiatiques. Ils crient au loup si le «Papa» ne revient pas. Ils en oublient de voir que la société avance. Elle avance tellement vite qu'elle laisse sur le côté tous les nostalgiques des temps anciens. La jeunesse est déjà à la plage et prépare un voyage à l'étranger. Les autres sont inquiets. Très inquiets même. Ils s'inquiètent de savoir ce qu'ils vont pouvoir mettre dans l'assiette de leurs progénitures pendant le mois sacré du Ramadhan. Un mois qui a perdu son Sacré pour devenir un sacré mois pour les spéculateurs de tout acabits.
Le débat mériterait à être recadré vers l'avenir économique et social du pays. La classe politique devrait s'interroger sur le pourquoi d'une telle désaffection envers elle. Les observateurs et les experts doivent se questionner sur les erreurs d'appréciations et d'analyses qu'ils font toujours. Pour le reste, il serait temps que l'on oublie le rétroviseur pour voir l'avenir même si le prochain président n'a pas de passé.
A. E.


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