Algérie

Un air de déjà-vu



Dans sa réaction au coup de force d'août 2020 qui a fait chuter le président Ibrahim Boubacar Keita, la Cédéao avait suspendu le Mali de tous ses organes de décision, fermé les frontières des Etats membres et mis fin aux échanges financiers et commerciaux, exception faite des produits de première nécessité. Elle avait alors obtenu, le 15 septembre, lors d'une ultime réunion avec la junte que «la transition politique sera dirigée par un civil» et que «le vice-président de la transition ne pourra en aucune manière (le) remplacer». Presque neuf mois plus tard, c'est le retour à la case départ, avec l'arrestation du président Bah N'Daw et du Premier ministre Moctar Ouane, libérés sous la pression de l'UA et du Conseil de Sécurité de l'ONU, ainsi que la décision de la Cour suprême relative au choix du colonel Goïta comme nouveau président de la transition.Quelles que soient les mesures que va prendre aujourd'hui même la Cédéao, il y aura un air de déjà-vu, car le Mali a beau être un pays exsangue, la population qui avait fort mal ressentie les sanctions antérieures est par avance très remontée contre celles qui se dessinent.
D'où un soutien explicite à la junte qui a mis à profit le ressentiment manifeste des Maliens et a fort intelligemment tendu la main au M5-RFP, le mouvement civil qui a multiplié les manifestations pendant des mois, en 2020, jusqu'à la chute du régime d'IBK.
Le nouveau président du Mali a ainsi déclaré: «Nous demandons (...) que le poste de Premier ministre revienne au M5-RFP»... «Dans les jours à venir, le Premier ministre qui sera nommé aura pour mission de mener une large consultation entre les différents groupements (...) en vue de mettre en place un gouvernement de consensus et d'inclusivité», a ajouté le colonel Goïta, en estimant qu'il fallait choisir entre le rassemblement et les «guerres clandestines». Au même moment, de nombreuses voix s'élevaient pour critiquer la manière dont est traité le Mali et celle réservée au Tchad où un Conseil militaire de transition de 15 généraux présidé par le fils du président défunt, Idriss Déby Itno, a trouvé une mansuétude remarquée de l'UA et des puissances occidentales, avec la France en première ligne. Il n'en fallait pas plus pour pousser des centaines d'entre eux, lors de manifestations, à apporter un soutien ferme aux militaires maliens et à réclamer le départ de la France et l'arrivée de la Russie. Porteurs de banderoles explicites et d'un large drapeau russe, les manifestants ont reproché au président démissionnaire Bah N'Daw d'être «parti à la rencontre du président français Emmanuel Macron».
Moscou a d'ailleurs réagi aux évènements en saluant la libération des dirigeants arrêtés et en prônant des mesures de nature à apaiser les tensions.
La Russie appelle à la «mise en place d'un dialogue constructif entre toutes les forces politiques du Mali, au nom de l'unité et de la stabilité dans le pays», a souligné le ministère russe des Affaires étrangères.
«Nous appelons toutes les parties à la retenue et à un règlement pacifique des désaccords», a-t-il également exhorté, une manière de confirmer que le Kremlin suit avec une grande attention ce qui se passe dans un pays stratégique du Sahel où les tensions et les menaces sont grandissantes et peuvent heurter, à un moment ou à un autre, ses intérêts.


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