Algérie

Un 8 Mars à tombeau ouvert



A défaut de calèche royale, des femmes ont pris samedi un cercueil ambulant en guise de transport. Leur 8 Mars a été celui par quoi devaient être abrégées leurs souffrances, car il n?y aura pas de 9 mars pour elles, ni de jours suivant celui durant lequel le monde avait fêté la condition féminine par des fleurs qui se fanent rapidement et quelques discours hypocrites. Elles ont couru à leur perte, ou à leur délivrance, c?est selon, passant encore une fois sous la guillotine de l?homme. Un homme imbu de lui-même et trop pressé pour aimer la vie et les femmes, celles qui étaient montées en toute confiance dans son bus. Le fait divers, qui a fait hier la Une des journaux, était d?une tristesse profonde, étant donné le sexe des victimes et la date à laquelle il était rattaché, censée être celle de la joie pour beaucoup de femmes. On pouvait lire partout : un bus de transport public se renverse sur la route reliant Constantine à El Khroub, faisant trois morts et 20 blessés. La symbolique est tirée par les cheveux diront certains, car partir d?un accident tragique et involontaire et conclure au complot masculin ne serait qu?un ensemble de conjectures erronées, élaborées par une imagination sombre et systématique. Mais le destin de l?humanité s?explique parfois par des faits divers et même par les pérégrinations d?un turbo extravagant sortant de l?imagination débordante de Gunther Grass. Trois victimes parmi tant d?autres, des mères, des épouses, des s?urs, des cadres, des lycéennes, jeunes filles, toutes belles, qui avaient rendez-vous avec leurs fiancés, des femmes tout court, ont pris ce maudit bus. On parlera de terrorisme routier, de « chauffards » zélés, de conducteurs de bus irresponsables, cupides et irrespectueux de la vie humaine, sévissant tous les jours dans une société déstabilisée par l?impunité et déstructurée par l?anarchie. On ne parlera pas, ou pas assez de ces femmes qui ont pris rendez-vous avec la mort, y ayant été introduites malgré elles par un homme. Une violence de trop à leur égard, et qui s?érige comme la seule vérité parmi les fleurs qui pousseront sur leurs tombes.


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