C'est une junte militaire encore plus isolée que jamais au niveau
international qui a lancé un appel à «l'aide étrangère» contre les rebelles
targuis du Nord qui ont pris Kidal…
Les chefs d'Etat de la Cedeao (Afrique de l'Ouest) sont en colère contre
les putschistes de Bamako et l'ont fait savoir en leur fixant un ultimatum de
72 heures pour un retour à l'ordre constitutionnel sous peine d'une mise en
Å“uvre d'un embargo diplomatique et financier.
Ce raidissement est intervenu à la suite d'une intrusion, jeudi, des
partisans des putschistes sur le tarmac de l'aéroport de Bamako où une
délégation des chefs d'Etat de la Cedeao devait arriver pour discuter avec le
chef de la junte, le capitaine Amadou Sanogo. Face à cet envahissement du
tarmac qui n'aurait pu avoir lieu sans la bienveillance des militaires, les
chefs d'Etat de la Cedeao ont annulé le voyage de Bamako et se sont réunis
d'urgence à Abidjan. C'est que sur le tarmac, des manifestants rassemblés par
le MP22 (mouvement populaire du 22 mars), créé par le seul parti malien à avoir
soutenu le putsch, le ton était à la provocation : «A bas la Cédeao ! Vive le
Cnrdre…».
A la Bourse du travail où l'opposition aux putschistes comptait organiser
une manifestation de soutien à la Cedeao, des affrontements ont eu lieu avec
les partisans des putschistes faisant trois blessés graves, selon des sources
hospitalières. Cet épisode ne peut qu'accentuer l'isolement des militaires
maliens alors qu'au Nord, le MNLA et Ançar Eddine lançaient, de manière
concertée, l'attaque contre la ville de Kidal, encerclée depuis plusieurs
jours. Les chefs d'Etat de la Cedeao, Alassane Ouattara (Côte d'ivoire), Blaise
Compaoré (Burkina), Thomas Boni Yayi (Bénin), Ellen Johnson Sirleaf (Liberia)
et Mahamadou Issoufou (Niger), réunis en urgence, ont indiqué que la junte
avait jusqu'à lundi «au plus tard» pour rétablir l'ordre constitutionnel. Les
sanctions prévues incluent aussi une interdiction de voyager et un gel des
avoirs dans la région pour les membres de la junte. La situation ne peut que se
compliquer pour les putschistes avec la fermeture des frontières et de l'accès
aux ports des pays côtiers et le gel des comptes du pays à la Banque centrale
ouest-africaine (BCEAO). Les Etats-Unis se sont dits «déçus» d'apprendre que
les dirigeants ouest-africains n'aient pas pu rencontrer les putschistes.
Le MNLA et Ançar Eddine, main dans la main
La Cedeao avait proposé un retour à l'ordre constitutionnel à travers une
transition dirigée par Dioncounda Traoré, président de l'Assemblée nationale
dissoute par la junte. Ce retour rapide à l'ordre constitutionnel n'arrange pas
les putschistes qui cherchent à s'installer durablement au pouvoir. Le Comité
national pour le redressement de la démocratie et la restauration de l'Etat
(CNRDRE, junte) a adopté sa propre constitution qui leur octroie une
prééminence sur le pays jusqu'aux élections dont la date n'est pas fixée. Cette
situation chaotique à Bamako favorise, plus que jamais, la rébellion targuie au
nord où, en dépit de leurs divergences proclamées, le MNLA et Ançar Eddine
agissent ensemble sur le terrain. Ils ont lancé jeudi, leur attaque contre Kidal
où ils ont fait leur entrée, hier vendredi, après que les soldats de l'armée
régulière aient abandonné l'un des deux camps militaire de la ville. Les
militaires affirment avoir abandonné leurs positions à Kidal afin de préparer
une contre-offensive. Cela laisse dubitatifs les observateurs. Le coup d'Etat
des capitaines qui laisse l'armée malienne «sans tête» est en train de donner
un coup d'accélérateur à la rébellion targuie qui a repris en janvier, dans la
foulée du retour au pays de targuis enrôlés par le régime de Kadhafi. Le chef
de la junte militaire Amadou Sanogo, qualifiant la situation de «critique», a
demandé une «aide étrangère» pour faire face à l'offensive des mouvements
targuis. «Notre armée a besoin de l'aide de ses amis pour sauver la population
civile et l'intégrité territoriale du Mali», a-t-il déclaré. Le paradoxe est
qu'il s'agit d'une junte isolée au niveau international qui appelle à l'aide
internationale après avoir, de facto, ouvert un grand boulevard à la rébellion
targuie.
-
Votre commentaire
Votre commentaire s'affichera sur cette page après validation par l'administrateur.
Ceci n'est en aucun cas un formulaire à l'adresse du sujet évoqué,
mais juste un espace d'opinion et d'échange d'idées dans le respect.
Posté Le : 31/03/2012
Posté par : sofiane
Ecrit par : Salem Ferdi
Source : www.lequotidien-oran.com