Le congrès du parti aux racines islamiques a voté à 93,5% pour cette réforme majeure, voulue par son fondateur Rached Ghannouchi.La communicante glisse à l'oreille de la petite main assaillie par les journalistes désireux d'assister aux débats : "Si les délégués sont calmes, fais-les entrer ; si c'est houleux, laisse-les dehors." La porte sera finalement ouverte pour cinq minutes, puis rideaux. Le 10e congrès de Ennahdha, parti aux racines islamiques qui s'est déroulé ce week-end à Hammamet a accouché d'une réforme majeure : la séparation du politique et du religieux. La motion a été adoptée à 93,5% par les quelque 1 200 délégués. Ce large score entérine la politique réformiste lancée par le fondateur du parti, Rached Ghannouchi, réélu dans la nuit de dimanche à lundi au poste de président avec 75,6% des suffrages exprimés.Ce résultat reflète davantage une discipline de vote, forgée par des années de clandestinité, qu'un consensus de la base. "Aujourd'hui, je peux vous assurer qu'il est difficile d'être dans la peau d'un militant de Ennahdha, assure un observateur de la vie politique tunisienne. Une partie non négligeable se pose des questions. Il est impossible d'effacer plus de trente ans [Ennahdha a été officiellement créé en 1981] de connexion entre politique et religion." Les congressistes refusent de s'étendre sur les discussions, "forcément compliquées" concède cependant l'un d'eux à la dérobée. Quand elles se font jour, les critiques publiques restent feutrées : "L'absence de la prédication, déjà minime, va créer un vide religieux, semble regretter Ajmi Lourimi, en charge des questions culturelles à Ennahdha. Le parti n'aura aucun lien avec ce qui est religieux." Un aggiornamento préparé depuis deux ans - le congrès aurait dû avoir lieu en 2014 - par Rached Ghannouchi et ses proches. Pour le dirigeant de 74 ans, après avoir été un mouvement idéologique identitaire dans les années 70, puis un mouvement contestataire durant la dictature, Ennahdha doit devenir "un parti démocratique national qui place l'intérêt de la Tunisie au-dessus des siens". "Le message s'adresse aux occidentaux"Cette mue ne convainc pas tout le monde. "Il reste une ambiguïté, pointe Zied Krichen, rédacteur en chef du quotidien Al-Maghreb. Ennahdha continue à revendiquer des racines islamiques. Les relations entre les associations religieuses et le parti ne vont pas disparaître même s'il n'y a plus de liens organisationnels." Le premier parti à l'assemblée cherche à élargir sa base en ratissant au centre et notamment auprès des anciens électeurs du parti présidentiel Nidaa Tounes, en pleine déliquescence. Le risque de perdre les électeurs plus traditionnels reste quant à lui minime : "Ennahdha n'a pas de concurrent crédible dans le champ politique islamique, constate le sociologue Jean-Baptiste Gallopin, de l'université Yale. Tant que le parti réussit à maintenir sa cohésion interne, ses électeurs mécontents lui resteront fidèles." Pour Zied Krichen, la cible de ce congrès n'est pas tant les électeurs que la communauté internationale. "Le message s'adresse aux Occidentaux : "Regardez, nous ne sommes plus dans l'islam politique. Nous sommes respectables."" Sayida Ounissi, jeune membre du congrès, milite pour que la Tunisie s'inspire du modèle allemand sur la question religieuse. Ennahdha, la future CDU (1) musulmane '
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Posté Le : 24/05/2016
Posté par : presse-algerie
Ecrit par : Le Maghreb
Source : www.lemaghrebdz.com