Algérie

Trois radiologues pour un million d'habitants !



L'imagerie médicale semble devenue le parent pauvre du secteur de la santé dans la wilaya de Boumerdès.Bien qu'elle soit indispensable pour la bonne prise en charge des patients, cette spécialité pâtit énormément du manque de médecins radiologues. Le secteur public en est doté de trois uniquement, dont deux exercent à l'hôpital de Thénia et un autre à celui de Bordj Menaïel.
La wilaya de Boumerdès, avec ses 930 000 âmes, serait la plus lésée dans ce domaine, surtout lorsqu'on sait que la norme nationale prévoit un médecin spécialiste pour 1000 habitants. Pour les autres spécialités, le problème est de moindre ampleur, puisque la région compte 343 spécialistes, toutes branches confondues, dont 119 à l'EPH de Thénia, 81 à Bordj Menaïel et 59 à Dellys. A l'hôpital de cette dernière commune, on compte 7 pédiatres, 4 pneumo-phtisiologues, mais aucun médecin radiologue.
Aujourd'hui, on peut avancer sans risque de nous tromper que 80% des malades qui partent se soigner dans les structures publiques font leurs radios, y compris les clichés standards, dans les cliniques privées. «Cela fait un mois que je souffre d'une pancréatite. J'ai tout fait chez le privé, y compris les analyses de sang. Le premier jour, vers 20h, j'ai été emmenée par mon fils à l'hôpital de Bordj Menaïel.
Là, on m'a demandé une échographie. Je l'ai faite à 3000 DA la même nuit dans une clinique privée à Tizi Ouzou. Le lendemain, le médecin m'exige un scanner abdomino-pelvien. Je l'ai effectué chez un autre privé à Boumerdès, à raison de 17000 DA. Pourtant, il y a un scanner à l'hôpital, mais on nous a dit que le radiologue ne sait pas interpréter certains clichés. En plus, l'examen se fait avec un produit de contraste et en présence d'un médecin réanimateur. Ce qui n'est toujours pas disponible là-bas ou à l'EPH de Thénia», relate une sexagénaire. Le calvaire de cette dernière ne s'arrête pas là.
Après trois jours d'hospitalisation, on lui demande une IRM. Un examen qu'elle a fini par faire, malgré elle, chez un radiologue privé à 27 000 DA. Le cas de cette patiente n'est qu'un exemple parmi tant d'autres.
A Thénia, le service d'imagerie médicale s'étend sur plus de 1000 m2 et est bien équipé, mais la garde n'est pas assurée 24/24. Le scanner, le mammographe et l'appareil d'échographie, acquis en 2012, ne sont pas d'une grande utilité pour la population locale. En effet, seuls les malades hospitalisés ont droit au scanner dans l'immédiat, mais durant la journée uniquement. Pendant la nuit, on n'y assure que les clichés standards.
Les externes, eux, doivent patienter ou user de leurs contacts et «connaissances» pour espérer passer leurs examens radiologiques dans les meilleurs délais. Les rendez-vous s'étalent parfois sur un mois, quand le scanner n'est pas en panne et que les deux radiologues sont de service. Même chose pour les patient(e)s sollicitant une mammographie ou une échographie, et qui doivent attendre au moins une semaine.
«On a un grand manque en matière d'effectif. Il nous faut au moins 4 radiologues et 15 techniciens pour faire fonctionner le service à plein temps. Certains de mes collègues n'ont pas pris leur congé annuel depuis trois ans, alors que leur exposition en permanence aux rayons X leur recommande de se reposer tous les deux mois», dira un employé du service.
Ce dernier préconise, en guise de solution, la réquisition des médecins privés, l'amélioration des conditions de travail et les salaires des praticiens exerçant dans le secteur public, ainsi que la révision du système de formation des médecins spécialistes, en augmentant le nombre d'admis au concours de résidanat au fil des années.


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