Algérie

Trêve ou sursis ' Ghaza


Trêve ou sursis '                                    Ghaza
Depuis mercredi soir 21h, plus aucune bombe israélienne n'a touché la bande de Ghaza. Alors que la population a réinvesti les rues, les négociations politiques internationales se poursuivent. De son côté, l'Algérie mise sur l'aide humanitaire.
Après huit jours de guerre israélienne sanglante et destructrice contre la bande de Ghaza et son million et demi d'habitants, un accord de cessez-le-feu a été conclu, mercredi soir, entre les Palestiniens et Israël. Annoncé au cours d'une conférence de presse, depuis Le Caire, par le ministre égyptien des Affaires étrangères, Mohamed Amr, au côté de la secrétaire d'Etat américaine Hillary Clinton, à 19 heures locales, l'accord devait entrer en vigueur deux heures plus tard. Cette annonce, faite alors qu'Israël intensifiait ses frappes partout dans l'enclave palestinienne, a donné l'espoir à la population de voir enfin la fin du cauchemar qu'elle vit depuis une semaine. A l'heure de l'annonce du cessez-le-feu, 155 Palestiniens avaient été tués et plus de 1200 blessés par la machine de guerre israélienne.
Ces deux heures ont été les plus longues de cette semaine sanglante. La poursuite du survol de l'enclave palestinienne par les avions de chasse F16 et les drones, qui continuaient à bombarder même après l'annonce de l'accord de cessez-le-feu, laissait planer le doute quant à son application. A 19h10, ma porte a sonné. Mon voisin Issam, 50 ans, officier fathaoui de l'Autorité palestinienne, sans fonction depuis le putsch armé de l'été 2007 qui a permis au Hamas de contrôler la bande de Ghaza, fatigué et manquant visiblement de sommeil, m'a demandé : «Alors penses-tu que cette fois, Israël va respecter ses engagements et arrêter l'agression'»
Il n'avait pas terminé sa phrase qu'une grosse explosion, qui semblait très proche, a fait vibrer l'immeuble et nous a fait sursauter. Il a tout de suite balancé la tête de gauche à droite : «Non, non, non, je crois qu'ils vont vers l'escalade. Mais c'est Hillary Clinton en personne qui a annoncé le cessez-le-feu. Si c'était n'importe qui d'autre, le secrétaire général des Nations unies, un président arabe ou même un chef d'Etat européen, je t'aurais dit que Netanyahu ne s'en soucierait pas et agirait à sa guise. Mais là, ce sont ses maîtres qui ont parlé.»
Inquiétude
El Khatib, autre voisin de palier, nous rejoint : «Israël respectera le cessez-le-feu, ses dirigeants vont essayer de frapper le plus possible jusqu'à la dernière minute. Ils veulent montrer au peuple israélien qu'ils ont réalisé leurs objectifs, mais les Israéliens eux-mêmes savent qu'ils ont échoué de façon humiliante.» Chacun de nous est ensuite rentré chez lui pour suivre l'évolution de la situation. Mes deux filles Meriem (21 ans) et Fadoua (18 ans) accrochées à l'écran de télévision, semblaient inquiètes même si elles tentaient de le cacher. Quant à mon fils Ahmad, 11 ans, avec lequel j'ai eu une discussion chaude en milieu de journée lorsqu'il a voulu descendre jouer au ballon avec ses copains, il est visiblement las d'être enfermé dans la maison depuis une semaine.
Certains étaient déjà en train de jouer sans se soucier de la présence, au-dessus de leurs têtes, d'un drone qui volait à basse altitude. Un groupe d'enfants qui jouaient avaient été surpris, lundi, par un appareil similaire dans le quartier de Chejaiya, à l'est de la ville de Ghaza ; deux d'entre eux ont été tués, trois autres blessés. J'étais décidé à l'empêcher de descendre, et ce, jusqu'à la fin des hostilités. A 19h40, dans mon quartier El Nasr, à l'ouest de la ville comme dans le reste de Ghaza, les rues étaient toujours désertes. Le silence était entrecoupé par le passage d'un avion de chasse, d'un drone ou par une explosion après un raid aérien. Mais le silence était parfois interrompu, aussi, par le son d'un missile palestinien se dirigeant vers le territoire israélien.
La résistance tenait à montrer à la population israélienne que malgré plus de 1350 raids aériens, leur armée n'avait pas réussi à détruire ses capacités militaires, un des principaux objectifs de la guerre fixés par les dirigeants israéliens. Les minutes passaient lentement. A 20h54, bombardement d'un terrain vague à 60 mètres de l'endroit où jouaient les copains de mon fils en milieu de journée. Plus de peur que de mal, tout le monde avait quitté les lieux. Les craintes de voir le cessez-le-feu non respecté par Israël s'amplifiaient. A 20h58, dans le quartier Cheikh Redouane, un des bastions de la résistance palestinienne, à l'est de notre habitation, un drone israélien a assassiné Mohamed Ayach, un militant des Saraya El Qods, la branche armée du Djihad islamique, et blessé trois citoyens. C'étaient les dernières victimes de la machine de guerre israélienne. A 21h, les drones n'avaient pas quitté le ciel, les bombardements se sont subitement arrêtés.
Cortèges
A 21h05, quelques citoyens ont commencé à s'aventurer hors de leurs maisons. A 21h10, des coups de feu de plus en plus nombreux étaient tirés en l'air. Des feux d'artifices commençaient à orner le ciel obscur de la ville de Ghaza. En quelques minutes, les routes désertes ont été envahies par des dizaines de milliers de citoyens. Les drapeaux palestiniens et les bannières des factions palestiniennes, dont celle du Fatah, se voyaient partout. La joie était immense. C'était presque l'hystérie. «On veut l'union de toutes nos factions. Vive la résistance», criait de toutes ses forces un jeune, arborant la bannière du Fatah, au milieu de centaines d'autres qui se dirigeaient de la rue El Nasr vers le centre-ville.
D'immenses cortèges de voitures bondées d'hommes, de femmes et d'enfants parcouraient les rues de la ville. Le vacarme était grand, mais cette fois c'étaient des chants, des cris de joie et des klaxons. Quelques minutes auparavant, ces rues étaient complètement paralysées. Malheureusement, les coups de feu tirés en signe de joie ont tué un jeune Palestinien et blessé cinq autres. Les responsables du gouvernement Hamas ont appelé à cesser les tirs. Mais, étant une des habitudes ancrées dans la société, on en entendait quelques-uns de temps en temps, pendant toute la nuit.
Malgré la fatigue et le manque de sommeil des citoyens, les fêtes et les célébrations se sont poursuivies jusqu'à l'aube.
Union
A ce moment, on entendit de nouveau les vrombissements des moteurs des drones qui n'avaient toujours pas quitté le ciel de la ville de Ghaza. Hier, tous les magasins ont ouvert leurs portes et les rues étaient animées dès le début de la matinée. Les écoles ne rouvriront leurs portes que demain. Un retour vers leurs maisons, situées près de la clôture de séparation d'avec l'Etat hébreu, de familles qui les avaient quittées ces dernières 24 heures, de crainte de possibles massacres israéliens en cas d'incursion terrestre, était remarquable. La vie reprenait peu à peu son cours. En milieu de journée, un rassemblement populaire, organisé par le gouvernement Hamas, auquel ont participé des dizaines de milliers de citoyens en présence de représentants de toutes les forces actives sur la scène palestinienne, dont Nabil Chaath, membre du comité central du Fatah et représentant personnel du président Mahmoud Abbas, a clos les célébrations de la victoire de Ghaza. Pour Nabil, professeur de psychologie à l'université El Qods, «demain sera un autre jour» : «Il serait dommage de laisser passer l'occasion qu'a donnée l'élan de cette victoire pour réunifier les rangs. Les Palestiniens doivent concrétiser leurs volonté d'union nationale sur le terrain, car c'est la seule arme capable réellement de les aider à recouvrer leurs droits nationaux, dont le droit à la création d'un Etat indépendant avec la ville sainte d'El Qods comme capitale.»
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