Réglementé depuis pratiquement quarante années, l’emploi de la main-d’oeuvre étrangère en Algérie n’a commencé à poser réellement problème que ces dernières années, particulièrement avec l’installation dans le pays d’entreprises étrangères réalisant des projets pour le compte de l’Etat.
C’est du moins le constat d’une commission de l’APW de Constantine qui a été chargée de présenter un rapport sur l’emploi de la main-d’oeuvre étrangère dans la capitale de l’Est. Les membres de cette commission, après avoir enquêté auprès de la direction de l’emploi, l’inspection de travail, les services de la wilaya, la sûreté de wilaya, le registre de commerce, l’administration des impôts, la CNAS et la justice, avouent que le problème reste complexe et affirment que les lois édictées en ce sens sont dépassées désormais par le nouveau contexte économique et social.
 Et de ce fait, la réglementation en vigueur actuellement en matière d’emploi de la main-d’oeuvre étrangère, selon la dite commission, a besoin d’un sérieux coup de neuf.
 Ceci, devait-elle avertir, pour éviter ce qu’elle qualifie de véritable rush de travailleurs étrangers à la faveur d’une véritable anarchie qui règne actuellement dans ce domaine. Le rapport rappelle le décret présidentiel numéro 03-251 daté du 19 juillet 2003 modifiant et complétant le décret numéro 66-212 daté du 21 juillet 1966 portant sur l’application de l’instruction 66-21 datée du 21 juillet 1966 et concernant la situation des étrangers en Algérie. Le même rapport fait référence également à la loi numéro 81-10 datée du 11 juillet 1981 relative aux conditions de l’emploi de travailleurs étrangers et le décret présidentiel numéro 82-510, daté du 25 décembre 1982, spécifiant les conditions d’octroi des «passeports» de travail et des permis provisoires de travail pour les étrangers.
 Cet arsenal législatif sera donc convoqué par la commission de l’APW pour alerter les pouvoirs publics sur une situation préoccupante que constitue aujourd’hui la main-d’oeuvre étrangère qui recouvre autant les secteurs économiques public que privé, en plus de la sphère commerciale, outre la présence irrégulière de ressortissants de pays étrangers qui ne disposent d’aucun document officiel justifiant leur présence en Algérie.
 Selon les statistiques officielles arrêtées au 6 mai 2006 et fournies par la direction de l’emploi de la wilaya de Constantine, le nombre de travailleurs étrangers exerçant dans le secteur public et privé atteint 274. Le constat principal tiré par la commission après examen de la situation de ces travailleurs étrangers reste celui qui relève que les postes occupés par ces derniers sont en contradiction avec la réglementation en vigueur. La commission fera référence ainsi à l’article 3 de la loi 81-10 datée du 11 juillet 1981, relative aux conditions de l’emploi de la main-d’oeuvre étrangère qui énonce clairement l’interdiction à tout employeur de recruter, même à titre provisoire, des travailleurs étrangers qui ne jouissent pas d’un niveau de qualification égal au moins à celui de technicien.
 Référence est faite aussi dans le même sens à l’article 5 de la même loi qui énonce qu’un passeport ou permis de travail provisoire ne peut être délivré à un travailleur étranger que dans certains cas.
 A savoir, dans un premier cas, si le poste à pourvoir ne peut être occupé par un travailleur algérien, soit à travers une promotion interne ou à travers le recrutement. Les travailleurs algériens émigrés sont prévus dans ce cas de figure. Dans le second cas, si le travailleur étranger est détenteur de diplômes et de compétences professionnelles nécessaires à son recrutement. Dans le troisième cas, en référence à l’article 7 du décret numéro 82-510 daté du 25 décembre 1982 qui spécifie les conditions d’octroi du permis de travail provisoire et qui exclut toute candidature d’un travailleur étranger à un poste qui peut être occupé par un Algérien.
 Ceci relevé, le rapport revient à la liste fournie par la direction de l’emploi pour constater qu’il existe des postes occupés par des étrangers dont le niveau n’est même pas équivalent à celui de technicien. Et de citer: agent commercial, chef d’équipe, représentant de commerce, gestionnaire de stocks...
Par ailleurs, le rapport fera état d’autres postes occupés par des étrangers qui restent accessibles à des Algériens qui ont les compétences et les diplômes exigés.
 En ce sens, il cite les postes de techniciens, d’ingénieurs en informatique, génie civil, génie climatique, chef d’unité, pharmacien...
 A cet effet, la commission indique que les permis de travail accordés à ces étrangers sont en contradiction avec les lois déjà citées. La même commission objecte toutefois qu’elle a été dans l’impossibilité de connaître si des conventions spéciales ou des contrats ont été passés par les autorités algériennes. Le même rapport ira plus loin en soulignant que ce ne sont pas les seuls exemple de transgression des lois algériennes dans le domaine de l’emploi de la main-d’oeuvre étrangère. Le document cite dans cette veine que la plupart des entreprises étrangères, particulièrement turques et chinoises, exerçant en Algérie ont ramené des travailleurs sans le moindre respect des lois en vigueur. Ainsi, nous saurons que les inspecteurs de travail trouvent des difficultés à contrôler les chantiers de ces entreprises. Nous aurons également la présence de travailleurs étrangers sans permis de travail et sans documents. On apprendra aussi que des travailleurs étrangers occupent des postes autres que ceux consignés dans leur passeport de travail. Comme on apprendra que des travailleurs étrangers exercent dans une wilaya autre que celle qui est indiquée dans leur permis de travail.
Enfin, le rapport relève que des travailleurs étrangers dans le secteur du bâtiment s’engagent dans des travaux de construction de villas pour le compte de particuliers, et de citer dans ce cas précis des travailleurs chinois.
 Un autre volet est abordé par le rapport de la commission, celui des étrangers qui ouvrent commerce dans les villes algériennes. Sur ce chapitre, le rapport indique que la loi sur le commerce ne spécifie pas la nationalité algérienne pour l’ouverture d’un registre de commerce. Ainsi, indique le rapport, des Chinois, Syriens, Tunisiens exercent en Algérie. Ils sont aujourd’hui dans la ville de Constantine au nombre de 26.
 Le comble reste que ces commerçants étrangers emploient au noir des Algériens, relève la commission, qui ajoute que si ce n’est pas le cas, ce sont des employés qui ne disposent d’aucun document justifiant leur travail, encore moins leur résidence sur le sol algérien. Enfin, le rapport relève que des Chinois louent des locaux commerciaux à Constantine pour des sommes très élevées, et de citer l’exemple d’un loyer mensuel de 8 millions de centimes pour un local qui expose des marchandises dont les prix sont dérisoires et la clientèle loin d’être nombreuse. D’où des interrogations. L’autre volet abordé enfin reste celui de la présence illégale de travailleurs étrangers issus de l’immigration clandestine et dont une grande proportion est impliquée dans des affaires de fausse monnaie, d’escroquerie, de charlatanisme. Certains de ces étrangers entrent en Algérie en tant que touristes et s’installent définitivement pour travailler illégalement.
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Posté Le : 09/07/2006
Posté par : hichem
Ecrit par : Mohamed Salah Boureni
Source : www.quotidien-oran.com