Algérie

Travailler mieux pour travailler plus



On sait leformidable défi que pose la massification de l'université à son encadrement.D'un autre point de vue, il y a là de nouvelles opportunités pour investir,revaloriser le travail universitaire.Afin que leniveau général de formation ainsi que le niveau d'expectation de la jeunesse nesoit pas victime d'un tel processus, afin que le travail universitaire puissesuivre la voie de l'effort plutôt que celui du découragement, afin qu'il n'yait pas une dualisation négative du système d'enseignement supérieur, il fauttransformer l'organisation du travail universitaire. On ne peut avoird'équation plus simple: si le travail enseignant et de recherche doit encadrerà un nombre croissant d'étudiants, il n'a pas d'autres options que de setransformer et à son avantage puisqu'il peut y faire face dans de nouvellesconditions.  Les transformations sont donc inéluctables,reste à savoir si elles auront lieu dans le sens d'une nouvelle dynamique dusystème universitaire ou dans le sens d'une rupture de son unité. On ne peutpenser que le choix public (relativement récent, peut être plus contraint ou dedéfi qu'assumé pour les différents secteurs) de la massification ait étéeffectué dans le but de pervertir la démocratisation de l'enseignementsupérieur (ES). Même s'il en avait été ainsi, on ne peut admettre que leschoses pourraient se permettre de suivre un tel cours. Aussi dans cettelogique, le meilleur parti pour les pouvoirs publics serait de préciserdavantage leur démarche, avant qu'ils n'y soient contraints dans de moinsbonnes conditions, afin de redonner espoir et confiance à un secteur importantde la société.  Pour cela, une condition générale est, biensûr, nécessaire. Qui dit organisation du travail, dit travail: latransformation de l'organisation du travail restera formelle si de nouvellesdispositions vis-à-vis du travail en général, collectif en particulier ne fontpas leur apparition, tant du côté de l'administration que des enseignants etdes étudiants. Gagner de l'argent ne doit plus être le résultat d'unedistribution de rentes. La compétition doit aller au travail, au profit et larente doit pouvoir servir à cela. La massification de l'ES constitue uneformidable multiplication des heures d'enseignement en particulier, elleconstitue une formidable occasion de gagner de l'argent. Cela signifie qu'ilfaut permettre aux enseignants de gagner de l'argent en travaillant et non pasen collectionnant les heures supplémentaires tout simplement. Comment? Enpermettant à ceux qui sont en mesure de gagner de l'argent en travaillant de lefaire tout d'abord, ensuite en réglant le problème du contrôle de la qualité etde la quantité du travail rendu. Si la compétition est au travail cela nedevrait pas constituer une grosse difficulté.  Cette condition générale étant admise, onpeut essayer de redéfinir le mode de mise en oeuvre de l'encadrementpédagogique et de recherche, afin de construire son unité et d'augmenter sonrendement pour éviter une dualisation négative du SE. Il s'agit de réfléchirsur la complexité et l'unité du travail universitaire et de proposer unecertaine organisation collective et individuelle de ses tâches à même d'être enmesure de répondre aux défis posés. Une des façons de traiter du problème de larareté des moyens, est de repenser le cadre d'exercice du travail enseignant etde recherche. Il serait possible de recomposer ce travail, en lui permettant dese redéployer dans un nouveau cadre, de nouveaux rapports pour accroître sacapacité d'encadrement. L'idée est de permettre à certains enseignants de seconsacrer temporairement à certaines tâches (aux plus importantes plutôt qu'àl'ensemble) afin qu'elles puissent être revalorisées pour l'ensemble desenseignants. L'innovation consiste à penser l'unité du travail sur diverseséchelles spatio-temporelles et non plus sur une seule.  Il s'agit d'envisager l'organisation dutravail à l'échelle de l'université algérienne dans son ensemble, sur denouvelles échelles plus efficientes, ce que permettent, aujourd'hui, lesTechnologies de l'Information et de la Communication (TIC).  La nouvelle infrastructure qu'offrent cesTIC, peut permettre un nouveau déploiement du travail universitaire, uneinnovation en la matière. Elles peuvent permettre la formation de nouveauxcollectifs d'enseignants en mesure de relever le défi de la massification,quant à la question de l'encadrement. L'Etat a beaucoup investi dans lacomposante de base des infrastructures, il doit investir dans celle décisivedes TIC. En effet, les cadres des facultés et des départements ne sont-ils pasdevenus trop étroits pour certaines activités massives d'enseignement? Desenseignants ne sont-ils pas déjà sollicités à l'échelle de plusieursuniversités sans qu'il ne leur soit possible de réorganiser leur travail pourpouvoir être plus efficaces? Continuera-t-on à dispenser l'enseignement demasse d'une même matière de base de la même façon qu'avant les TIC, par desdizaines d'enseignants de niveau très inégal parce qu'ils sont, eux et desmilliers d'étudiants, séparés dans l'espace? Peut-on toujours parler d'équité(objectif de la prime de zone) lorsque, par exemple, le même enseignement peutêtre donné sur plusieurs universités mais que cela n'est pas fait? A-t-onréellement réfléchi à un enseignement de masse des langues?  Bref, gagner de l'argent, travailler plus(nouvel impératif de la condition enseignante universitaire) ne doit pas êtresynonyme de dégradation du travail. Pour l'heure, il semble qu'on ait décidé àtravailler plus mais sans vouloir être regardant sur la manière de travailler.Pourtant, il faut faire le pas suivant pour ne pas revenir sur le pasprécédent. Nous avons donc là l'occasion de construire des collectifsenseignants performants que l'on n'a pas pu monter dans le cadre des facultésprécisément à cause de leur rareté et leur cherté. Les TIC ne doivent-elles pasentrer dans les universités et donner une autre mesure du travail enseignant?Les nouvelles technologies ne doivent-elles pas configurer de nouveauxcollectifs de travail, de nouveaux rapports de travail? Si nous attendons qued'autres nous y précèdent malgré leurs handicaps (la rigidification des anciensrapports de travail) quel espoir aurons-nous d'avoir une université rayonnante? Pour cela nous pensons qu'étant donnée unecertaine séparation du travail d'enseignement et de recherche pour le premiercycle, ne pourrait-on pas y dispenser des cours de meilleure qualité et à unmoindre coût, s'ils étaient dispensés par des équipes pédagogiques compétentestravaillant à une autre échelle que celle d'une université et se consacrant àcette tâche particulière d'enseignement pendant un certain temps pour produirece que l'on pourrait appeler des «cours de référence»? Cela ne pourrait-il pasêtre attendu des plus anciens enseignants ? Le recours au travail étranger nedeviendrait-il pas intéressant et moins onéreux par ces nouveaux usages?  Ne pourrait-on pas de même séparer la tâched'enseignement de celle d'évaluation, pour le fait qu'elle ne relève pas de lamême compétence mais aussi parce que la première a besoin d'être libérée de laseconde, car quand elles ne sont pas séparées dans les faits, la seconderamenant la première à sa plus simple expression (la gestion des flux imposantsa loi d'une manière ou d'une autre), chose qui ne milite pas pour uneamélioration de la formation du formateur.  Ne pourrait-on pas encourager lesétablissements à coopérer dans une telle perspective en contrepartie de leuréquipement en TIC?  Pensons un instant à ce que cela pourraitdonner pour la majorité des chargés de cours. Des équipes pédagogiquesconsacrant deux à trois années à confectionner un cours de référence, un ouplusieurs manuels, des autres à le rendre accessible aux nombreux chargés decours débutants, ne soulageraient-elles pas l'ensemble des équipes pédagogiquesmobilisées par de tels cours en leur permettant de mieux répartir leur temps detravail entre les diverses tâches pour améliorer leur prestation pédagogique etleur niveau de formation et donc de les préparer à mieux s'investir dans larecherche et leur carrière? N'y a-t-il pas là un meilleur usage des ressourcesexcessivement rares? N'y a-t-il pas là, le moyen de donner une plus grandecohérence au travail collectif? Ne serait-ce pas là un moyen de donner un cadred'expression aux capacités nationales bridées à l'extérieur, un cadred'intervention qui rendrait la coopération internationale aisée et précise?  Ce raisonnement pourrait être développé en cequi concerne la deuxième tâche d'importance. Des équipes mixtes, nationales etinternationales, pourraient s'occuper de la formation doctorale à une échellenationale, au moyen des TIC. Il faudrait que l'Etat stratège pour le long termeet les secteurs sociaux et économiques pour le moyen terme, formulent desdemandes précises qui puissent être assignées comme des objectifs à larecherche. Car l'université a tout d'abord besoin d'avoir une vision del'avenir et de la manière dont il faudra qu'elle s'y engage. De bons exemplesexistent. Cela devrait permettre à la recherche de sortir de ses ghettospersonnels et d'améliorer de manière sensible le niveau général de formationdes formateurs. De telles ambitions sont à la hauteur des investissementsrécents en matière d'infrastructure de base, ne les gâchons pas.


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