Algerie : Changement des régles de l’immobilier
Le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, a exhorté les notaires à s’impliquer davantage dans l’assainissement du secteur de l’immobilier et à exercer pleinement leurs prérogatives de garant dans toute forme de transaction, que ce soit dans l’achat ou la vente de logements, de locaux, de terrains à usage d’habitation ou d’autres biens à usage commercial ou d’investissement.
Désormais, les actes administratifs ne sont plus reconnus pour l’établissement d’un acte notarié, encore moins pour l’obtention d’un acte de propriété au niveau des directions des Domaines. Ces documents constituent, dans la plupart des cas, des pièces à usage de faux et concernent, en majorité, la cession des biens de l’État, comme les ventes intitulées “en pas de porte”, “sur décision” ou encore “avec désistement” qui butent contre des procès de justice interminables pour “double attribution”. Et c’est le ministère de la Justice, département souverain dans la législation, qui vient de donner un coup de pied dans la fourmilière pour mettre fin à la spéculation et aux litiges qui surviennent et qui chutent dans les tribunaux et les cours de justice, d’une part, et mettre de l’ordre dans un secteur jusque-là rongé par l’anarchie et le vide juridique. C’est dire que depuis l’année 2006, il a été décidé de passer à un autre cap de gestion de ce dossier qui a suscité moult interrogations et que la justice même subit directement ou indirectement, y compris lorsque le notaire et le juge de volonté interviennent pour trancher. À ce jour, ce sont 60% des biens immobiliers qui ne sont pas formellement déclarés, et donc, qui ne répondent pas aux normes d’obtention d’un acte de propriété et, par ricochet, qui font souvent l’objet de discorde, voire de drames sociaux, mais aussi de blocage, quand il s’agit d’un investissement économique lourd sur une assiette non répertoriée au niveau des services du cadastre.
Notaires et Domaines, même combat C’est ainsi qu’il a été décidé d’installer des commissions au niveau des directions des Domaines au niveau des wilayas pour superviser toutes les transactions, contrôler les documents et enquêter sur les biens à vendre ou à acheter avant d’établir un acte de propriété. Aujourd’hui, il est clair que près de 99% des litiges sont dus aux actes administratifs délivrés, mais exploités sournoisement par les parties concernées, avant que celles-ci ne tombent dans un conflit inextricable. Hier, en marge du séminaire organisé à l’hôtel Sheraton Club-des-Pins à Alger par la Chambre régionale Centre des notaires, le directeur des affaires juridiques et judiciaires près le ministère de la Justice, Mohamed Amara, a affirmé que “le notaire constitue la sécurité juridique depuis le morcellement de la procédure jusqu’à la fin du processus”. Il rappellera, à cet effet, que des textes de loi existaient déjà, mais étaient insuffisants pour cerner tous les aspects inhérents à ce secteur aussi sensible que névralgique. Du coup, l’installation des commissions de reconnaissance au niveau de 9 wilayas du pays se veut plus qu’un palliatif juridique qui intervient au bon moment. M. Amara liera ce fait nouveau au séminaire avant de déclarer : “Le notaire doit être au courant de tout pour intervenir en qualité de garant avant de délivrer un acte authentique. Et tous les aspects sont liés, à savoir le crédit immobilier tributaire d’un acte réel, l’hypothèque délivrée par acte notarié et la garantie sur l’hypothèque. C’est dire que la commission installée au niveau du ministère de la Justice a été créée pour revoir tout cet environnement. Il s’agit aujourd’hui de parler de sûreté réelle et personnelle !” Notre interlocuteur a révélé que cette commission est composée de magistrats de la Cour suprême, d’experts nationaux et internationaux, ainsi que d’éminents professeurs universitaires. Ceci vient se greffer également aux dispositions formulées et incluses dans le code civil de 2007 et concernant le loyer à usage d’habitation. Quant à la gestion de la copropriété et ses incidences sur le programme présidentiel de 1 million de logements, elle sera revue de fond en comble. Hier, lors de son discours inaugural, le ministre de la Justice, garde des Sceaux, Tayeb Belaïz, a exhorté les notaires à s’impliquer davantage dans l’assainissement du secteur de l’immobilier et à exercer pleinement leurs prérogatives de garant dans toute forme de transaction, que ce soit dans l’achat ou la vente de logements, de locaux ou de terrains à usage d’habitation ou d’autres biens à usage commercial ou d’investissement. Comme il a mis en valeur l’exemple justement du programme du président de la République, Abdelaziz Bouteflika, qui s’est engagé à réaliser 1 million d’unités à l’horizon 2009. M. Belaïz l’a dit d’ailleurs implicitement : il s’agit de réglementer tous les aspects liés à ce sujet et de responsabiliser les notaires en qualité de juges et de témoins d’une transaction honnête, mais surtout légale.
Ventes sur plan : méfiez-vous ! “Méfiez-vous des ventes sur plan !” semblent avertir les notaires. Le président de la Chambre régionale centre des notaires, Chérif Benaggoune, place cet aspect comme un objectif principal de ce séminaire qui s’inscrit en droite ligne dans la formation continue des notaires, y compris ceux issus de la promotion de 2006. “Pour acheter un bien sur plan, l’acquéreur doit obligatoirement, à l’avenir, délivrer un acte notarié qui le protégerait physiquement. C’est un titre juridiquement reconnu par toutes les administrations du pays et qui lui garantit son argent et son bien. Mais bien avant cette procédure, l’acquéreur devra passer par le Fonds de garantie où il doit aussi obligatoirement souscrire. Car, en fait, aucun notaire n’acceptera de lui délivrer un acte s’il n’est pas détenteur d’un document dûment établi par le Fonds de garantie”, nous dit dans le détail M. Benaggoune qui a mis en exergue les recommandations qui découleront de cette rencontre, la troisième du genre, après les rencontre de Sétif (région est) et d’Oran (région ouest). Aux yeux de notre interlocuteur, “les commissions de wilaya doivent bouger. C’est très sensible et il y a trop d’affaires en justice”. Vient ensuite la problématique de l’hypothèque. Celle-ci, telle qu’elle est inscrite dans la loi de finances, est facilitée tant au niveau des banques qu’au niveau d’autres institutions. Mais est-ce suffisant ? Non, évidemment ! Car, en fait, cette même hypothèque ne sera jamais exécutée et l’acquéreur doit distinguer, en passant par le notaire, trois sortes d’hypothèques : légale, conventionnelle et contractuelle. Et ce vide juridique, quand les banques s’en mêlent, accuse un tort majeur à la propriété immobilière nationale. Comment ? Les banques privées, censées octroyer des crédits à usage d’habitation ou de construction aux particuliers, ou à usage d’investissement, usent du droit d’accaparer tout bien si une hypothèque non vérifiée et non garantie est signée avec la partie concernée en difficulté. Du coup, il est prévu également des modifications sur le double plan juridique et législatif et “toute transaction devra être effectuée avec une garantie dûment lue et signée par le promoteur et le bénéficiaire. C’est-à-dire qu’il faudra éviter le litige à la source !” Le président de la Chambre nationale des notaires, M. Achit, a précisé que cette rencontre permettra, sans doute, “de créer des passerelles entre les notaires et les juges de volonté. La formation spécialisée est le credo du ministère de la Justice, notamment au profit des auxiliaires de la justice, comme les notaires”. M. Achit a conclu que “l’acte notarié algérien, un acte latin, est un document reconnu et constitue un modèle”. Il faut dire, en ce sens, que l’Algérie, à travers la Chambre nationale des notaires, a tous les honneurs de figurer à l’Union internationale des notaires et à bien d’autres organismes internationaux.
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Posté Le : 05/07/2008
Posté par : kamichev
Ecrit par : KAMEL
Source : liberté