Algérie

Trachnia, un douar en détresse



Trachnia, un douar en détresse
Trachnia semble surgir d'un monde où le temps s'est subitement arrêté pour enfanter un hameau n'ayant pu connaitre aucun développement social malgré 50 années d'indépendance. Le douar survit en sombrant encore d'une détresse à une autre et subsiste de privation en privation. L'eau ne se livre qu'une fois par semaine, elle se paye à défaut à 600 dinars la citerne, le gaz se fait rare et se cède à 500 dinars aux plus chanceux, et l'électricité n'a pu toucher malheureusement tous les foyers du douar, elle se transmet toujours de voisin en voisin et de câble en câble'. !
Trachnia est un douar de 300 âmes survivant désespérément d'une attente à l'autre, il relève de la commune de Tazgait qui le distant de quarante kilomètres, qui semble presque l'ignorer, de par l'absence effroyable de toute structure sociale. Seule une route n'ayant pu être revêtue depuis sa création à ce jour, continue de le rattacher au reste du monde et à la commune de Sidi Lakhdar, unique proche localité demeure accessible aux habitants de ce bout de monde mais à fort prix . Les malheureux citoyens parviennent à se rendre difficilement et chèrement à bord de véhicules « clandestins » seuls moyens de transport desservant le bourg et leur permettant de s'approvisionner en produits alimentaires et surtout de se soigner. Le douar manque de tout, le train du développement parait le déserter depuis l'indépendance, le sous- développement le tenaille de bout en bout, aucune structure sociale n'existe, la pauvreté et l'oisiveté se partagent le douar, elles règnent en maitresse des lieux. Les jeunes ne savent où aller et se plaignent affreusement du manque d'un lieu de rencontre. « Nous nous suicidons à long terme » me déclare le jeune T.M, âgé de 24 ans, licencié en sciences commerciales, mais à présent ouvrier agricole à titre temporaire, il désherbe une parcelle de petits pois en attendant mieux' !
Un lieu de culte au triste sort' !
Finalement, Trachnia n'a pu s'offrir un lieu de culte comme le reste des douars de la commune, sa mosquée est abandonnée à son sort cruel depuis presque 05 années. Les travaux de sa construction n'ont pas pu prendre fin par manque de financement. Les 300 personnes vivant au douar, n'ont pu poursuivre sa réalisation car ils ne disposent pas d'assez d'argent pour le consacrer à cette structure cultuelle. Les membres du comité chargé de sa construction de la mosquée ont fini par démissionner, en face du déficit flagrant de finances. Aujourd'hui, la mosquée n'est qu'un ensemble de 04 murs mal crépis qui risquent de s'effondrer à force d'attendre depuis si longtemps une toiture tardant à voir le jour. Dans ce contexte, les pauvres habitants interpellent toutes les âmes charitables à les aider à achever ce lieu de culte qui leur manque tant et les prive d'un lieu de rassemblement pour l'assurance des prières communes, surtout celle du vendredi. « Seul un apport financier conséquent pourra sauver la mosquée de tomber en ruine avant d'être inaugurée un jour » soupire le vieux K.L, âgé de 72 ans qui ne désespère de prier un jour en ce lieu tant la bienfaisance existe' !
Une bâche d'eau vide depuis 2 ans !
L'eau, ce produit vital et précieux se fait tant désirer à Trachnia, ce douar où son insuffisance est si alarmante. Selon les citoyens, l'A.P.C ne la délivre que rarement selon un programme irrégulier au bourg. Il est alimenté une fois par semaine mais insuffisamment car une seule citerne n'a jamais pu répondre aux besoins exprimés en eau par les citoyens qui l'utilisent à tant de fins. En face de ce déficit, les habitants recourent à l'achat de l'eau à des prix forts, la citerne est cédée à 600 dinars pour ceux qui ont l'argent pour se la procurer. Beaucoup d'autres, sont contraints de subir les affres de la soif à l'attente du passage de la prochaine citerne, certains autres dans le dénuement la quémandent de foyer en foyer. L'existence d'une bâche d'eau semble n'être d'aucune autre utilité au douar, elle n'est qu'un point d'eau vide depuis deux longues années, sa construction n'a jamais pu résoudre le problème du manque d'eau tant ressenti par les citoyens. Cet ouvrage hydraulique réalisé pour alimenter la localité en eau, est à présent abandonné, et aucune autre goutte d'eau n'a pu être versée dedans depuis si longtemps selon le citoyen H.B, qui affirme que l'impraticabilité de la piste qui y mène parait être à l'origine de son inutilisation, mais que tant d'autres soutiennent que l'A.P.C avait les moyens également pour bitumer le chemin et continuait à approvisionner la bâche en eau et mettre fin à la soif qui sévit au douar'. !
Un réseau électrique des plus archaïques et des plus dangereux ' !
A Trachnia, certains foyers s'éclairent encore à la bougie et ont perdu l'espoir de voir un jour venir ce câble d'électricité pour mettre fin à tant d'obscurité, les lampes traditionnelles sont toujours en usage et secondent les bougies de temps à autre. Une cinquantaine d'habitations n'ont pu bénéficier à ce jour de l'énergie électrique, car elles restent si éloignées du reste de l'agglomération rurale, les plus proches ont être raccordées à l'aide de longs câbles. Malheureusement, ce réseau électrique « archaïque « ne répondant à aucune norme de conformité en utilisant des câbles moins résistants et troncs d'arbres ne pouvant nullement supporter tant de fils allant en tous sens, demeure un véritable danger exposant en permanence les citoyens à de hauts risques d'électrocution. Plusieurs cas de rupture de câbles, dus aux rafales de vent, nous ont été signalés par des citoyens qui se sentent menacés par ce drôle d'enchevêtrement de fils électriques cernant le douar de coin en coin. Un citoyen, H.G m'atteste que souvent certains citoyens habitant la zone éparse du douar et qui sont reliés « archaïquement » au réseau éclectique, se sentent bien obligés de se terrer chez soi, par ces nuits pluvieuses d'hiver, ils n'osent pas mettre le pied dehors, de crainte de se faire électrocuter de par ces courts circuits qui se déclenchent et plongent le hameau dans le noir total à l'attente du lever du jour' !
Sur le long et dangereux chemin de l'école' !
A ce jour, Trachnia n'a pu disposer d'un établissement scolaire du premier palier malgré la perte tragique d'une écolière, la petite fille M.N, emportée par les eaux furieuses de l'oued en crue, qu'elle était bien obligée de traverser pour se rendre à l'école. Ici, les gens se remémorent douloureusement ce triste évènement qui a endeuillé le douar pendant de longs mois. Aujourd'hui encore les enfants du douar sont obligés d'emprunter ce dangereux itinéraire long de 04 kilomètres pour se rendre à l'école, hiver comme été. Beaucoup de ces écoliers ne se déplacent pas durant les jours de pluies, la peur les paralyse de se faire emporter par les eaux pluviales qui inondent les sentiers qui mènent au lieu d'études. Le manque de transport public et de ramassage scolaire restent les deux principales raisons de l'échec scolaire cuisant et surtout de l'évitement de scolarité des filles au douar. Certains parents développent une peur bleue de laisser étudier les filles, ils craignent qu'elles ne se fassent agresser en cours de route. Le parent, M.H, reste encore réticent pour laisser sa fille reprendre ses cours qu'elle a abandonné en 4ème année, il se sent malade en ces jours où ses deux enfants tardent à se pointer à la maison dès 17 heures, il prend son gourdin et part à leur rencontre et il me déclare qu'il ne peut plus poursuivre de vivre sur des braises en cas du moindre retard de ses fils'. !
Des gourbis tombant en ruines' !
Le logement rural semble se frayer difficilement le chemin en ce lieu où il est d'une nécessité absolue, trop de maisons mal construites tombent en ruine par manque d'entretien. Les citoyens du douar se sentent lésés de ne pas pouvoir bénéficier de ce type de logement en quantités suffisantes. Censé revenir aux personnes résidant en milieu rural au sein d'habitats précaires, le logement rural à Trachnia semble prendre un autre chemin, il revient surtout aux gens qui savent « graisser la patte » à ceux qui le distribuent selon certaines indiscrétions. Certains l'attendent depuis plus d'une dizaine d'années, alors que d'autres, ont pu en bénéficier facilement sans trop d'attente. Un citoyen, M.S, semblant être en colère de ne pas pouvoir disposer d'un de ces logements malgré l'état de sa maison vétuste et surtout de sa condition sociale. Il n'hésite pas à pointer du doigt une certaine personne du douar, proche de l'A.P.C. Il confirme que ce dernier fait à présent la pluie et le beau temps au douar, la distribution du logement rural ne dépend que de ses humeurs et de son bon vouloir. Il suffit juste de lui glisser ce qu'il sollicite et surtout vanter ses bonnes qualités pour avoir le logement tant rêvé'. !
Le transport, le calvaire insurmontable' !
Finalement se déplacer en véhicule vers Trachnia est une opportunité si rare, elle relève du domaine des exploits difficiles à faire. Aucun transport public ne se rend en ce lieu désertique, seuls quelques « clandestins » osent s'y aventurer mais en exigeant d'abord le prix à payer. Les citoyens habitant au douar ont toutes les peines du monde à se rendre vers les autres douars ou à la localité de Sidi Lakhdar qui reste l'unique proche lieu où ils viennent surtout se ravitailler au marché public et faire les différents achats qu'ils ont à faire. Les « clandestins » demeurent les seuls transporteurs qui desservent le lieu, mais qui fixent également le prix de la course qui dépasse largement les 200 dinars en temps ensoleillé, le tarif double par mauvais temps et surtout l'après midi. Dès 14 heures, le transport sur Trachnia devient inexistant, et l'unique alternative restant à prendre, demeure la marche à pied, et tant d'écoliers et de travailleurs n'ont que ce choix à prendre en compte. Un trajet long de presque 14 kilomètres que beaucoup de citoyens du douar, mais surtout le jeune K.M, ouvrier au sein d'une entreprise privée de bâtiments à Sidi Lakhdar se voient obligés de faire presque quotidiennement, surtout le soir où le transport vers Trachnia devient incertain et presque nul'. !
Trachnia, un douar de la mort lente' !
Beaucoup de citoyens ont fini par perdre l'espoir de voir un jour le douar se développer, surtout voir l'eau gargouiller au fond de cette bâche d'eau, devenue un refuge pour quelques pigeons et autres moineaux, l'école primaire manquant tant au bourg puisse un jour voir le jour et mettre fin à ces longs et pénibles trajets qu'endurent quotidiennement de bonne heure les gosses encore endormis grelotant de froid et tressaillant sous la peur matinale. Ils ont encore plus de mal à survivre au sein de ce douar de la mort lente, mais surtout à supporter cette atroce mise en marge de toute une population qui aspire également à un bien être après un demi siècle d'indépendance'. !


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